13 mai 1985, le bombardement de MOVE : un crime d’État oublié


Histoire du racisme et de la répression aux États-Unis


Le mouvement MOVE est fondé en 1972 dans la ville de Philadelphie aux USA. Composé de militants et militantes noires qui vivent en communauté, le mouvement est anticapitaliste, anti-raciste et écologiste. Ses membres sont végétariens, s’opposent à la répression et critiquent le militarisme. Ils organisent des protestations dans des zoos, des manifestations, donnent des cours à domicile…

Au sein de MOVE, les afro-descendant-es changent leur nom de famille, souvent issu des propriétaires esclavagistes, pour le nom Africa, de la même manière que Malcolm X ou Mohammed Ali ont changé leurs noms d’origine.

À la fin des années 1970, MOVE s’installe dans une copropriété dans une résidence calme, dans un quartier de classe moyenne de Philadelphie. Les voisins se plaignent notamment d’ordures ménagères autour du pâté de maison, et de slogans chantés au mégaphone devant la propriété. Des faits anodins, qui provoquent pourtant le choix de la mairie d’arrêter plusieurs membres de MOVE et de les expulser.

Le 13 mai 1985, il y a 38 ans presque jour pour jour, la police donne l’assaut. Près de 500 policiers et le chef de la police municipale entourent le pâté de maison et font évacuer tout le voisinage. Sept adultes et six enfants sont présents dans la maison de MOVE. L’eau et l’électricité sont coupés pour déloger les habitant-es. Des grenades lacrymogènes sont tirées dans le logement. Une fusillade éclate. À 14h le commissaire ordonne le bombardement du bâtiment. Des hélicoptères larguent des bombes incendiaires sur la maison, qui s’enflamme rapidement. 11 personnes sont brûlées vives, dont 5 enfants. Deux personnes seulement, une femme et un enfant, parviennent à s’échapper et survivent, malgré des tirs policiers en leur direction.

Lors de l’incendie, la police laisse volontairement brûler tout le bloc. 61 maisons sont entièrement brûlées sur deux pâtés de maisons, et 250 personnes sont sans logement.

Ramona Africa, survivante de 29 ans, qui s’est échappée avec un enfant de 13 ans, sont brûlés mais saufs. Ramona Africa est arrêtée et condamnée à sept ans de prison pour «émeute» et «complot».

Un procès devant un tribunal fédéral admettra que la ville a utilisé une «force excessive» et violé les droits constitutionnels, mais aucun décisionnaire n’a jamais été poursuivi pour ce massacre raciste.

Rappelons qu’en 1982, toujours à Philadelphie, Mumia Abou Jamal, militant afro-américain de proche de MOVE, avait été condamné à la peine capitale pour la mort d’un policier, malgré les éléments contradictoires de l’enquête. Il est toujours derrière les barreaux aujourd’hui, c’est l’un des plus anciens prisonniers politiques du monde.

Aux USA, les années 1980 sont celles du retour à l’ordre après la décennie de révolte des années 1970. Le président Reagan va neutraliser les foyers de résistance par une répression atroce, en particulier contre le mouvement Noir, et des politiques anti-sociales brutales. Le bombardement de MOVE, terrible crime d’État de ces années de néolibéralisme autoritaire triomphant, est aujourd’hui largement oublié.

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