Macron met en place le retour du service militaire pour 2 milliards d’euros, les médias de masse font le service après-vente

Il l'avait annoncé et pour une fois Macron tient sa promesse, comme si le rêve des jeunes était de mourir pour des marchands d’armes.

Il l’avait annoncé et pour une fois il tient sa promesse. Dans un discours du 13 juillet dernier, Macron avait parlé «d’acceptation du sacrifice, jusqu’au sacrifice ultime», un mot qu’il avait déjà employé auparavant, comme s’il rêvait de sacrifier la jeunesse plutôt que de lui offrir un avenir désirable. Il avait dit vouloir «donner à la jeunesse un nouveau cadre pour servir, selon d’autres modalités, au sein de nos armées» pour lui «offrir un débouché à cette formidable envie d’engagement». Comme si le rêve des jeunes était d’enfiler un uniforme et mourir pour des marchands d’armes.

Le Chef d’État Major des Armées de l’époque disait qu’il voulait «pouvoir mobiliser de la masse». Son successeur vient de demander à la population d’accepter de «perdre ses enfants». Les choses avancent vite : un «service militaire volontaire» sera bien mis en place.

Ce jeudi 26 novembre, Macron se rendra en Isère sur un site de l’armée, et va «proposer aux jeunes français âgés de 18 ans un service militaire basé sur le volontariat» dès 2026. Conscient de la difficulté à embrigader la jeunesse sans contrepartie, en tout cas dans l’immédiat, ce plan prévoit de payer entre 900 et 1000 € par mois les jeunes recrues, pour une durée de 10 mois. L’objectif est d’embaucher 50.000 réservistes supplémentaires. Cela va coûter 2 milliards d’euros d’argent public. Nous n’avons pas cessé de le répéter, mais il y a toujours de l’argent illimité pour l’armée et la police. Le néolibéralisme est en pleine reconfiguration : il détruit ce qu’il reste de l’État social pour redistribuer l’argent prélevé à la Santé, l’Éducation ou aux minimas sociaux pour l’injecter directement dans la machine militaire et répressive. Il n’y a pas de «réduction» des dépenses, comme le prétendent les économistes aux ordres, mais des choix budgétaires.

Quel est l’objectif de ce nouveau «service militaire volontaire» ? D’abord, réhabituer la jeunesse à entrer massivement dans les rangs de l’armée, à endosser le treillis, à tenir des armes de guerre sous les ordres d’officiers. C’est une opération d’endoctrinement de masse des nouvelles générations, qui s’accompagne d’une propagande accrue dans les écoles ou sur les réseaux sociaux. Il s’agit d’une première étape avant, à terme, de rétablir le services militaire général.

Pour l’instant, l’État français n’a pas les moyens d’enrôler de force des millions de jeunes dans l’armée, il faudrait plus d’infrastructures et d’instructeurs. Mais ce service «volontaire» pose les bases d’un retour de la conscription. Le Chef d’État major de l’Armée Fabien Mandon déclare d’ailleurs que «de nombreux voisins en Europe sont en train de réintroduire un service national» et qu’il s’agit «d’éléments qui sont à observer dans notre pays».

Surtout, l’idée est de renforcer la réserve de l’armée : les généraux parlent de construire une armée «hybride» : mi-professionnelle, mi-citoyenne. En effet, l’armée française compte environ 200.000 soldats professionnels, payés, ce qu’on appelle les militaires d’active. Ils sont formés, vivent en caserne, coûtent cher à entretenir. Il y a aussi 47.000 réservistes, qui savent utiliser des armes et peuvent être appelés pour renforcer ponctuellement les soldats professionnels, pour des patrouilles, des déploiement ou même en cas de guerre. Le gouvernement veut renforcer cette réserve.

Le général Schill ne passe pas par quatre chemins : «J’ai besoin d’une masse importante, notamment compte tenu des risques de conflits plus importants. En tout cas, j’ai besoin de pouvoir mobiliser de la masse mais sans forcément l’avoir sous les drapeaux en permanence». Une sorte d’armée de réserve de jeunes endoctrinés qu’on peut envoyer au front en cas de besoin, mais qui coute moins cher que des soldats entretenus en permanence.

Le modèle, cela pourrait être Israël. Dans cet État colonial et génocidaire, il y a une armée professionnelle, mais tous les citoyens sont aussi des soldats potentiels. Ils ont fait le service, et peuvent être mobilisés à tout moment. Presque tous les israéliens ont déjà été envoyés à Gaza, en Cisjordanie ou au Liban. En dehors du front, les israéliens peuvent aussi être armés dans l’espace public. Israël est l’incarnation de l’État hyper-militarisé ou tout le monde peut faire la guerre en fonction des circonstances, et où toute la population s’identifie à son armée.

Face à cet horizon terrifiant, les médias de masse ne donnent toujours pas la parole à la moindre voix dissidente. Pourtant, personne n’a voté pour la guerre et le réarmement, il n’y a eu aucun débat sur le service militaire. Il est tout simplement ahurissant qu’aucun média, de Médiapart à Cnews, n’offre la moindre tribune aux paroles antimilitaristes. À lire la presse française, il y aurait une unanimité totale derrière les projets guerriers du pouvoir, ce qui est un problème démocratique majeur. Il y a pourtant, en France, des livres, des collectifs, des auteurs et autrices qui écrivent, pensent et agissent contre la guerre, l’industrie des armes et l’armée. Même avant la guerre de 1914, l’antimilitarisme était plus relayé qu’actuellement, où l’on observe une omerta totale.

Quand ils n’invisibilisent pas les idées antimilitaristes, les médias organisent carrément le service après-vente du gouvernement. Le journal 20 Minutes titre un article : «À partir de quel salaire seriez-vous prêt à faire votre service militaire volontaire ? Racontez-nous». Il s’agit de rendre acceptable le fait de monnayer sa violence et sa vie. Doit-on rappeler que dans la Russie Poutinienne, le gouvernement promet aussi de fortes sommes et des dédommagements aux familles qui envoient un membre sur le front ukrainien ?

De même, Libération publie une tribune sidérante expliquant que «La France n’est pas prête à la guerre» et «vit dans un rêve de paix éternelle», que notre pays «refuse obstinément de se confronter au réel». Le réel vu par Libération, c’est de foncer tête baissée vers l’abattoir.

Raphaël Glucksmann, entre deux interventions télévisées catastrophiques, réclame tout simplement «d’aller plus loin» avec «un service obligatoire» pour «assurer la cohésion de la Nation». Louis Sarkozy plaide pour l’incorporation forcée des immigrés, en tirant au sort 10% des personnes étrangères pour les envoyer à l’armée. «De quoi» selon lui, «dissuader les migrants de rejoindre la France et, surtout de favoriser la cohésion nationale. La leçon est simple : que la caserne serve à fabriquer des Français». C’est tout simplement une mesure qui date de l’Empire : les autorités de Napoléon tiraient au sort des jeunes hommes dans chaque commune pour les envoyer à la mort.


Dans cette surenchère de propositions horribles, faire vivre des contre-discours et discréditer l’armée est une priorité politique vitale pour le camp de l’émancipation.


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