Renforcement de l’état d’exception, impunité policière, chasse à l’immigré : un nouveau bilan de la France sous État d’urgence.
Comme nous le prédisions dès le mois de novembre, François Hollande veut « proroger l’état d’urgence et aller au plus vite pour faire adopter la réforme constitutionnelle ». Quelques jours plus tard, Valls ajoute que l’état d’exception sera maintenu «jusqu’à ce que DAESH soit vaincu». Autrement dit, un état d’urgence permanent, prolongeable à l’infini. La gauche va donc plus loin que les gouvernements en place pendant la guerre d’Algérie. Pour rappel, le plan Vigipirate était déjà un outil sécuritaire d’exception, inventé en 1995 pour «prévenir la menace terroriste». Il n’a jamais été levé. L’antiterrorisme s’impose donc définitivement comme mode de gouvernement.
«Quand j’entends le mot culture, je sors mon revolver»
Des flingues dans les musées. Des incidents ont éclaté à Paris entre des vigiles qui surveillent l’entrée de musées, et des policiers qui veulent absolument conserver leur arme de service sur eux, partout, tout le temps. Plusieurs flics voulaient aller se cultiver avec leur Sig Sauer à la ceinture, contre l’avis des vigiles. Les syndicats policiers s’insurgent de telles «tracasseries » et ajoutent : «on devrait plutôt nous accueillir à bras ouverts puisque notre présence garantit une certaine sécurité».
Bientôt dans ton supermarché de quartier : la BAC qui fait ses courses fusil à pompe en bandoulière.
Saint-Denis : privés de logement par l’opération anti-terroriste
Après les attentats du Bataclan, le RAID avait donné l’assaut dans un immeuble vétuste de Saint-Denis. Les flics d’élite avaient fait exploser une partie du bâtiment, déchiqueté les assaillants, et tiré plusieurs milliers de munitions. Les habitants du lieu, victimes collatérales de l’assaut, se sont donc retrouvés à la rue. Les familles sont toujours sans solution deux mois après les événements. Pire, 17 familles sans-papier sont menacées d’expulsion, certaines ont même écopé d’une OQTF.
Civisme
Albanais et sans-papier, il ramène un portefeuille perdu, bourré d’argent, au commissariat. Les gendarmes font du zèle, l’interrogent. Le civisme est récompensé par une menace d’expulsion et… une assignation à résidence !
La police assassine, la justice acquitte
Colmar, août 2014 : un détenu est transféré menotté dans une voiture de la gendarmerie. Au cours du trajet, il est exécuté d’une balle dans la tête par l’un des militaires. Les deux gendarmes parlent de «légitime défense». Facile : il n’y a pas d’autres témoins. La justice prononce un non lieu.
Un bilan de l’État d’urgence à Nantes
Le préfet a fait un bilan des perquisitions administratives en pays nantais pour la presse. On recense donc «seulement» 40 perquisitions liées a l’état d’urgence en Loire Atlantique. En revanche, le préfet précise l’esprit de l’état d’exception, et la définition extensive du «terrorisme» : «ces perquisitions touchent des domaines différents, mais toujours en lien avec le terrorisme : le port d’armes prohibées, la détention de stupéfiants, le risque de radicalisation violente ou d’enrôlement djihadiste». Vendre quelques barrettes de shit ou fumer de l’herbe est donc devenu une entreprise terroriste. Plusieurs millions de personnes sont concernées en France.
Militarisation du maintien de l’ordre
Le 14 janvier à Saint-Denis, des militaires sont envoyés pour encadrer un rassemblement réclamant plus de moyens pour l’enseignement, et rassemblant 70 personnes : parents et instits. Ou quand la frontière entre police et armée, entre maintien de l’ordre et guerre, s’efface progressivement.
https://paris-luttes.info/saint-denis-des-militaires-envoyes-4728
Pas d’état d’urgence pour l’extrême droite
En Gironde, 200 kilos d’armes de guerre et des explosifs artisanaux sont retrouvés chez une famille de militants d’extrême droite. Imaginez le tsunami médiatique et judiciaire si l’on avait retrouvé le dixième de cet arsenal chez des militants d’extrême gauche, des ZADistes ou des musulmans. Alors que la quasi-totalité des 3000 perquisitions menées depuis les attentats n’ont rien donné, c’est donc finalement dans un groupe fasciste que l’on trouve un véritable arsenal de guerre. Cette information n’a pourtant pas fait la Une du JT.
Cette affaire rappelle l’événement de Calais survenus le 23 janvier dernier : un néo-nazi avait pointé un fusil de chasse sur des manifestants, sans être réellement inquiété.
ZAD
Le quotidien Ouest-France évoque ainsi une possible opération d’expulsion de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes : «Si évacuation il y a dans les mois à venir, si François Hollande en prend le risque, l’opération sera d’une envergure jamais connue. Incomparable avec César et Sivens. Gendarmes mobiles et CRS trouveront face à eux des anti-aéroport organisés, déterminés et entraînés. […]
Les forces de l’ordre, tirant les leçons de l’échec de 2012, ne reviendront pas non plus la fleur au fusil. Un plan d’intervention à grands renforts d’hommes et de véhicules est au chaud depuis plusieurs mois».
Une telle opération peut avoir lieu demain comme dans plusieurs mois. Mais les nouvelles possibilités offertes par l’état d’urgence ne préfigurent rien de rassurant du côté des autocrates qui nous gouvernent.