Des dizaines d’universités sont bloquées. La grève des cheminots, très suivie, est reconduite. Des secteurs se joignent aux appels à la grève. Alors que le mouvement social contre Macron et son monde ne cesse de monter en puissance, revue de presse de la situation :
MOUVEMENT ÉTUDIANT : INVISIBILISATION ET DÉSINFORMATION
La sélection à l’université, qui prévoit de mettre fin à l’accès aux études pour tous les bacheliers, a été annoncée cet automne par le gouvernement. Depuis le début du mois de février, plusieurs universités sont mobilisées contre le projet : Assemblées Générales, manifestions, actions … Depuis début mars, des universités sont bloquées, et les Assemblées Générales regroupent plusieurs milliers d’étudiants. Ces derniers jours, ces blocages se multiplient, s’intensifient, et plusieurs facs ont voté le blocage « illimité ». On parle donc d’un mouvement étudiant commencé cet hiver, massif, dur, long. Sans précédent depuis plus de dix ans, comparable à celui du CPE (en 2006). Mais les médias semblent l’avoir « découvert » depuis quelques jours seulement, après les agressions commises à Montpellier ! Nantes, qui fait partie des universités les plus mobilisée depuis le début, est tout simplement « oubliée » par la plupart des médias. Par exemple, un article du journal Le Monde le 4 avril évoque seulement une poignée de facs sur la trentaine actuellement en mouvement, et ne parle de Nantes que pour noter des « dégradations » sur la présidence de l’université… La presse nationale préfère donc valoriser un tag sur un mur plutôt que des milliers de jeunes mobilisés depuis des semaines. Ça laisse songeur.
Ouest-France et son impartialité légendaire publie le 5 avril son 19ème article en quelques jours contre le mouvement étudiant, en donnant la parole, unilatéralement et sans point de vue contradictoire, à une militante anti-blocus. Les journalistes auraient pu dire qu’on n’a jamais vu autant de monde en AG depuis plus de dix ans. Que le mouvement monte dans toute la France. Que les étudiant pro-blocus étaient une très large majorité, dans une AG de plus de 1500 étudiants. Mais non, informer n’est manifestement pas la priorité.
Sources :
- http://www.lemonde.fr/campus/article/2018/04/04/reforme-des-universites-deblocage-vote-a-nice-violences-a-nantes-et-grenoble_5280706_4401467.html
- https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/nantes-anti-blocus-sur-le-campus-apres-la-colere-l-inquietude-5673408
ÉPOUVANTAIL
Mardi 3 avril, à Nantes, après une grande assemblée générale, 2000 lycéens et étudiants défilent dans le centre-ville contre les attaques de Macron contre l’éducation. Gazés gratuitement devant la gare, ou la jeunesse voulait apporter son soutien aux cheminots, les manifestants se dirigent vers la Présidence de l’Université, responsable d’expulsions sur la fac d’une grande hostilité au mouvement étudiant. Deux tags sont faits sur un mur. Les médias, y compris nationaux, parleront de «violences» et de «dégradations» sur le bâtiment. La présidente de Région, appartenant à la droite Filloniste, va plus loin : elle accuse les «ZADistes». «La présence de la ZAD, zone de non-droit à quelques kilomètres de Nantes, n’est sans doute pas étrangère aux évènements de ces dernières semaines à Nantes.Tant que la ZAD n’aura pas été évacuée, les Nantais resteront à la merci des casseurs». Bref, la ZAD est devenu un véritable épouvantail de toutes les luttes. Par cette déclaration, les réactionnaires veulent légitimer une possible évacuation de la zone autant qu’ils dépolitisent et délégitiment la colère de plus en plus grande que manifeste la jeunesse nantaise. Mais plus personne ne croit à ces mensonges, pas même ceux qui les propagent.
VERS L’EXPULSION DE LA ZAD ?
Un médiocre secrétaire d’État était venu sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, il y a deux semaines, pour annoncer les intentions du gouvernement : «Le compte à rebours est lancé. Dès le début du mois d’avril, les personnes qui n’ont plus rien à faire sur cette zone ont vocation à partir». Malgré les négociations menées par les opposants, Macron annonçait donc son intention d’expulser la zone, ou au moins une partie des occupants ZADistes. On parle quand même, selon les médias, de 2500 gendarmes et de centaines de CRS déployés à Rennes et Nantes. Bref, un gigantesque déploiement militaire. Le gouvernement peut-il se permettre d’envoyer de telles forces dans le bocage nantais alors qu’un mouvement de colère monte de jour en jour dans tous le pays ? Cherchera-t-il, justement, à mettre en scène l’expulsion d’une partie de la ZAD pour faire diversion, à grand renfort d’images de lacrymogènes dans les champs ? Ne risque-t-il pas, vue l’effervescence de la situation sociale, de provoquer un embrasement généralisé ? Réponse le 9 avril.
OUTRAGE
3 avril, après une manifestation étudiante violentée et repoussée par la police à Nantes, les participants se dispersent tranquillement. Certains vont s’asseoir en terrasse de cafés. C’est sans compter sur la BAC, cagoulée et armée, qui n’a sans doute pas eu sa ration quotidienne de violence. Une étudiante est violemment arrachée de la terrasse où elle était assise avec ses potes par les policiers, et emmenée au commissariat. Son crime ? La BAC l’aurait vue en train de… montrer ses fesses. Accusée «d’outrage», elle est relâchée dans la soirée. Il s’agissait surtout d’intimider, une fois de plus, les étudiants mobilisés.
VIOLENCES
Mardi 3 avril, une manifestation parisienne voit converger les cheminots et les étudiants en lutte. La police charge. Un journaliste indépendant s’effondre, le visage ensanglanté. «Frappé à la tête puis au niveau des jambes, le photographe était pourtant, selon son collectif, parfaitement identifiable et aurait levé son appareil en l’air de manière visible. Les Street Medics de Paris lui ont apporté les premiers secours». Le blessé sortira de l’hôpital quelques heures plus tard avec sept agrafes sur le crâne et un enfoncement osseux. À Nantes, plusieurs blessures au visage par les armes de la police ont été recensées lors de la manifestation du 22 mars. Alors que le mouvement commence à peine, la police a déjà blessé de nombreux manifestants, notamment à Nantes, Paris et Caen.
Source : https://reporterre.net/Un-photographe-blesse-par-la-police
MIRACLE
La majorité des français soutiennent la grève des cheminots. Depuis des semaines, les médias à l’unissons sont les plus fervents ennemis du mouvement social. Les cheminots sont décrits comme des «privilégiés», des «preneurs d’otages» par des chroniqueurs grassement payés. Quant au mouvement étudiant, pourtant historique, il est tout simplement invisibilisé. Si les médias n’en parlent pas, c’est qu’il n’existe pas. Certains journaux ont «découvert» il y a quelques jours seulement que des facs sont bloquées et occupées depuis des semaines. Bref, vue l’intense propagande faite contre celles et ceux qui luttent, un petit miracle s’est produit. «La grève est de plus en plus soutenue» explique BFM TV, qui publie un sondage qui donne une large majorité de sondés qui demandent au gouvernement de «modifier sa réforme». France Info évoque un autre sondage qui donne une large majorité de français soutenant la grève des cheminots.
«GRÉVICULTURE»
Il y a quelques jours, le porte parole du gouvernement, Gabriel Attal, utilisait l’expression : «gréviculture» pour attaquer les cheminots mobilisés. Une nouvelle preuve de l’arrogance sans limite des gouvernants de ce pays. Mais les mots ont un sens et une histoire. Ce terme a été inventé à la fin du 19ème siècle par le camp royaliste, antisémite et contre-révolutionnaire, pour critiquer le syndicalisme naissant. Puis il a été repris par la «Fédération des Jaunes», ces organisations droitières qui avaient pour but de briser les grèves des travailleurs. Plus tard, l’expression sera reprise par la frange la plus à droite du pouvoir Gaulliste, et par Jean-Marie Le Pen. Bref, derrière des sourires Colgate et des «éléments de langages» travaillés, le Macronisme est l’héritier direct des pires tendances réactionnaires de l’histoire politique française.