Abstention majoritaire, macronisme affaibli mais prêt à l’attaque, retour de la gauche plurielle
Un mois après le hold-up électoral macroniste, les résultats des élections législatives viennent de tomber. Ils sont historiques à plus d’un titre. Analyse à chaud :
- L’abstention est écrasante, elle atteint 53%. Un record sous la Cinquième République. Le divorce entre la classe politique et la population est consommé. Sur 100 électeurs, 53 ne sont donc pas allé voter, 12 ont glissé un bulletin NUPES, 12 ont voté pour le clan Macron, 9 pour l’extrême droite, et 6 pour Les Républicains. Les élus ne représentent qu’eux mêmes. Si nous étions en «démocratie», ces élections seraient annulées puisque l’abstention est majoritaire.
- Le Macronisme en déroute. La haine de Macron domine le pays. C’est la première fois depuis 1958 que le parti présidentiel n’est pas en tête au premier tour. Plus incroyable et inattendu, depuis 20 ans, les législatives sont placées juste après les présidentielles pour permettre au Président élu d’obtenir une forte majorité sans contre-pouvoir. Aujourd’hui, pour la première fois, cela ne marche pas. C’est donc un choc politique pour le Macronisme, dont la légitimité est très faible. Mais le score du bloc Macron reste trop élevé, étant donné son plan de bataille terrifiant. Alors qu’il arrive deuxième, le mode de scrutin va probablement permettre à Macron d’obtenir un nombre suffisant de députés pour imposer son programme de guerre sociale. Au pire, il n’aura qu’à nouer des alliances avec la droite et l’extrême droite, comme il l’a déjà fait, pour pouvoir gouverner. Le contre-pouvoir sera dans la rue.
- Bloc bourgeois radicalisé : parmi les bonnes nouvelles, l’infâme Blanquer qui a fait tant de mal à l’Éducation Nationale est éliminé dès le Premier tour. Il rejoint Valls sur le banc des perdants détestables. De nombreux ministres sont en difficulté, notamment celle de la «transition écologique» : Amélie de Montchalin. Cela a pour effet de provoquer une radicalisation du bloc bourgeois. Blanquer a déclaré : «Je le dis solennellement, l’extrême-gauche est autant un danger que l’extrême-droite». La porte parole du gouvernement Olivia Grégoire refuse d’appeler à voter pour la NUPES pour faire barrage à l’extrême-droite. Macron et ses porte paroles de même. Le «front républicain» et le «barrage» n’ont servi qu’à faire réélire Macron. Il ne fait aucun doute que ces gens auraient préféré Hitler au Front Populaire.
- Recul des fascistes dans les urnes ? Alors qu’elle était au second tour, Marine Le Pen n’a pas fait campagne et a même appelé plusieurs fois à donner à Macron une majorité au Parlement. Le RN réalise donc un score assez faible par rapport à la présidentielle, et n’est pas certain d’avoir un groupe parlementaire. Du côté de Reconquête, Éric Zemmour, Guillaume Peltier, Marion Maréchal et Damien Rieu sont éliminés dès le premier tour. Tout comme le policier fasciste Bruno Attal. Ce soir, Eric Zemmour a annulé l’ensemble de ses plateaux. Une fessée. Rappelons que malgré son score assez faible, Zemmour a bénéficié de 80% du temps d’antenne pendant des mois au début de la présidentielle. Ce recul relatif des fascistes, même si leur score reste plus élevé qu’il y a 5 ans, est un recul de circonstance. L’extrême droite bénéficie toujours de réseaux puissants dans les médias, dans la police et dans le patronat. Ses militants s’arment et commettent des agressions partout. Et surtout, les mots et les idées de l’extrême droite s’imposent dans tout le spectre politique. Il faudra bien plus que des bulletins pour les mettre hors d’état de nuire.
- Le retour de la gauche plurielle. La coalition rose et verte NUPES arrive en tête. Un tour de force politique en seulement un mois de campagne, même si elle arrive tout juste devant en additionnant le score de tous ces partis aux précédents scrutins. Plus inquiétant, cette coalition de circonstance signe le grand retour de la sociale-démocratie, en aucun cas un programme de rupture. Même si Mélenchon a tenu des propos courageux sur la police notamment, la NUPES a fait le choix de ne pas présenter de figures issues des luttes – à de rares exceptions près –, ni de projet anticapitaliste, mais des candidats issus des appareils, répartis en fonction des accords politiciens. En Loire-Atlantique par exemple, la NUPES a présenté un policier dans le vignoble et un socialiste bien flasque au nord de Nantes. À Nantes, le «soutien» mis en avant sur les tracts de la NUPES est celui de Johanna Rolland, la maire Vallsiste, qui met des policiers et des caméras partout, qui gentrifie la ville, expulse et impose des projets infects. Voir le PS, qui était en état de décomposition avancé, revenir en force est une vraie défaite. Alors oui, c’est moins pire que le clan Macron. C’est juste la refondation d’un PS 2.0, sur des positions moins radicales que celles de Mitterrand en 1981. Mèneront-ils le combat social contre la bourgeoisie et la police militarisée ? Attention au mirage.
- Vers une dissolution de l’Assemblée ? Dimanche prochain, soit Macron obtient la majorité absolue, et il lancera immédiatement sa destruction au lance-roquette de tout ce qu’il reste de droits sociaux. Soit il ne l’obtient pas et il dissoudra l’Assemblée cet automne. En clair, il ne s’agit que d’un répit. Même si la situation a le mérite de montrer que le roi est nu.