Vénissieux : encore un conducteur et son passager tués par la police


Explosion des peines de morts administrées par les forces de l’ordre


Deux morts près de Lyon, dans la nuit de jeudi à vendredi dernier. Adam avait 20 ans et Reihane 26 ans. Des policiers ont vu une voiture garée sur un parking et ont voulu la contrôler. La voiture a démarré. 8 munitions ont été tirées, tuant les deux occupants : le conducteur et le passager. Pas un média n’a questionné les faits.

On entend depuis deux jours en boucle parler des «dangers du refus d’obtempérer», du casier des deux défunts et l’avocat des policiers répéter que «les éléments de la légitime défense sont réunis». Pourtant, malgré les récits rocambolesques des policiers, dont l’un dit avoir été «renversé» et «traîné sur le capot», la version officielle ne parle que de «légères blessures aux jambes». Un refus d’obtempérer mérite donc la peine de mort. Et la vie d’une «victime collatérale», passager d’un véhicule, n’a aucune valeur.

Ce double homicide s’inscrit dans une longue série. Le soir du second tour de la Présidentielle, au cœur de Paris, un policier dégaine un fusil d’assaut. Une arme de guerre extrêmement puissante, en principe réservée aux situations antiterroristes. La menace ? Un refus d’obtempérer. Une voiture a démarré lors d’un contrôle. L’agent tire une rafale de munitions de mitrailleuse sur le véhicule. Deux frères sont tués sur le coup. Un troisième homme, passager, est gravement blessé.

Deux morts par balles en pleine rue par une rafale policière. Du jamais vu en France depuis des décennies. La presse de préfecture s’empresse de dire que le policier était en «légitime défense» et qu’il a eu «peur pour sa vie». Mais les éléments sont tellement accablants que le tireur est mis en examen pour «homicide volontaire», fait rarissime. Les syndicats policiers manifestent même pour soutenir le fou de la gâchette. Deux mois après, tous les témoins, dont un policier étranger à l’affaire, assurent qu’aucun des agents n’était face à la voiture. Les victimes sont mortes de balles dans le dos, à l’arrière de la tête. Le tireur a fait un carton avec son fusil d’assaut. Il a tiré dix fois. Il a menti, ses collègues ont menti pour lui. Deux hommes ont été exécutés sommairement.

Le 4 juin, des policiers à vélo tirent une dizaine de munitions en pleine rue, en plein jour, pour un «refus d’obtempérer» à Paris. Au milieu des passants. La jeune passagère, Rayana, meurt d’une balle en pleine tête. Le conducteur est gravement blessé. Une jeune femme a été tuée parce qu’elle était assise là. Par hasard. Les témoins disent qu’il n’y avait pas de danger. Une autre exécution.

Le 26 mars dernier, un père de famille était tué au volant dans la ville de Sevran. Même motif, «refus d’obtempérer». Là encore, il s’avère après enquête que les policiers ont menti. Le tireur a fait feu alors que ni sa vie, ni aucune autre n’étaient directement en danger. La balle s’est logée dans le dos de la victime.

Le nombre de tirs à balles réelles par la police française explose ces dernières années. Il n’est plus exceptionnel de voir les forces de l’ordre sortir leur arme à feu, voire même de tirer sur des véhicules ou des individus. En France, la police se militarise. Et elle se donne le droit de mettre à mort.

Lorsque le gouvernement distribuait pour la première fois le Flash-Ball puis le LBD, il justifiait ces nouvelles armes en les présentant comme «anti-bavures» : elles devaient permettre aux policiers de «tirer sans tuer» lorsque leur vie était menacée. C’est tout l’inverse qui s’est passé. Non seulement les armes dites «non létales» sont massivement utilisées et mutilent régulièrement, mais les tirs à balles réelles n’ont pas arrêté d’augmenter. Et il ne s’agit pas de tirer dans les roues pour arrêter un véhicule, mais de tirer pour tuer. Les policiers se sont décomplexés de la gâchette.

Sous la présidence de Jacques Chirac de 2002 à 2007, 48 personnes ont été tuées lors d’interventions de police. En moyenne 9 par an. Sous Sarkozy, le bilan monte à 74, soit 14 par an. Avec Hollande, 89 en 5 ans, 17 par an. Sous le premier quinquennat de Macron, de 2017 à 2022, 131 morts. 26 par an. Ce bilan n’inclut par les personnes tuées par des policiers hors service ni dans le cadre de l’antiterrorisme. Cette explosion de décès se justifie-t-elle parce que la dangerosité augmente ? Non. Le nombre d’agents morts en exercice n’a pas cessé de baisser, il est quasiment 3 fois moindre qu’il y a 40 ans.


C’est donc la nouvelle règle en France : une mise à mort pour un délit. Et la mort de victimes collatérales autorisée.


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