« Entre-soi, Le séparatisme des riches », de Gwenn Dubourthoumieu et Monique Pinçon-Charlot, Éditions Pyramyd, 2024
Le 23 juillet 2021, l’Assemblée Nationale adoptait la loi séparatisme, l’occasion de taper sur les minorités et de mettre au pas l’opposition politique. Une loi autoritaire, une de plus, de la part d’un pouvoir bourgeois pourtant si doux avec les plus riches qui cultivent l’entre-soi. Car il est établi depuis bien longtemps que le séparatisme des élites est, lui, bien réel, et qu’il ne dérange en rien les pouvoirs publics.
La nouveauté du livre « Entre-soi », de Gwenn Dubourthoumieu et Monique Pinçon-Charlot, n’est pas dans le propos mais dans ce qu’il illustre avec précision ce séparatisme des élites. La photographie de Gwenn Dubourthoumieu sert le discours de Monique Pinçon-Charlot, elle le rend concret, tangible.
À travers cinq chapitres composés de courts textes et de photos prises dans des lieux habituellement fermés à nos regards (Cercles prestigieux, écoles hors de prix, rallies où la « haute » sélectionne les fréquentations de ses enfants, constitution d’une dynastie…) ce livre est à la fois une porte d’entrée vers la sociologie de la bourgeoisie, mais aussi un outil de dénonciation des inégalités. S’alarmer face à la précarité et dénoncer les ultra-riches est fondamental, mais trop souvent inopérant tant nous n’imaginons pas les vies parallèles qui se mènent au sommet de la hiérarchie sociale. Ce sont ces vies que l’ouvrage donne à voir.
La sociologie est une science du dévoilement : sa nature même est de dévoiler ce qui, habituellement, reste caché au regard, ce qui est « normal » donc qui n’est pas dit ou mis en lumière. Les photographies de Gwenn Dubourthoumieu jouent ce même rôle de dévoilement, accompagnées de notices explicatives des codes de la « haute ». Nœuds de cravate, rapport au corps et au sport, être à l’aise en toutes circonstances et s’approprier jusqu’à la rue, en toute décontraction.
Si le militantisme des ultra-riches est si difficile à photographier, c’est qu’il n’est pas vraiment un militantisme : c’est plutôt une manière de vivre. Monique Pinçon-Charlot le décrit comme « une forme de communisme de luxe et de pouvoir, de collectivisme pratique au sommet de la société ». La prédation capitaliste s’arrête ainsi là où commence la préservation des intérêts de la bourgeoisie.
Une réflexion au sujet de « Entre-soi : le séparatisme en images »
Excellente chronique de lecture !
Merci la contre attaque 🙂