Arizona : grève massive en Belgique contre le nouveau gouvernement alliant les libéraux et l’extrême droite


Le début d’un « marathon de la résistance »


Il ne s’agit pas de cette contrée aride du sud-ouest des États-Unis : l’Arizona est le curieux nom du nouvel accord de gouvernement Belge. Une coalition allant des centristes à l’extrême droite.

Le 31 janvier 2025, le nouveau premier ministre Bart De Wever, un nationaliste flamand très à droite, a composé un gouvernement fédéral comprenant son parti, mais aussi le Mouvement Réformateur – MR – qui est grosso modo l’équivalent du parti français Les Républicains tendance Eric Ciotti : une droite radicale et néolibérale qui avance main dans la main avec l’extrême droite. La coalition comprend d’autres partis, notamment «les Engagés» – une sorte de macronisme belge – et Vooruit – équivalent flamand du PS. Ce pot pourri, dominé par les réactionnaires, va diriger la Belgique jusqu’en 2029. Sauf si le gouvernement chute d’ici là.

Sitôt en place, l’Arizona annonce un plan de bataille anti-social, autoritaire, xénophobe et militariste. C’est la fin d’une époque en Belgique, un pays qui résistait jusqu’ici mieux que ses voisins à la montée de l’extrême droite. L’accord gouvernemental repose sur un rapport de 200 pages qui contient une série d’offensives néolibérales, comme la baisse des pensions, le gel des salaires, le plafonnement des allocations chômage, la fin de l’interdiction du travail de nuit, du dimanche et des jours fériés…

Ces mesures s’accompagnent d’annonces liberticides, notamment l’extension de l’interdiction de manifester. Une idée qui avait été proposée par le gouvernement précédent, mais abandonnée face à l’opposition syndicale. Si cette loi passe, elle frappera les mouvements ouvriers et anti-colonialistes.

Alors que les exploité-es sont chargé-es de payer la crise à travers ce plan d’austérité, le budget de l’armée belge, lui, va exploser. Le gouvernement veut le hisser à hauteur de 2,5% du PIB du pays, pour établir «une nouvelle culture de la sécurité», mettre en place une défense aérienne ou encore créer «une réserve de défense territoriale». Moins d’argent pour la population, toujours plus pour la guerre : l’Arizona marche dans les pas des gouvernements allemands et français, qui débloquent des centaines de milliards d’euros pour militariser massivement l’Europe.

Enfin, à l’image de la fascisation du reste de l’Europe, l’Arizona annonce des mesures racistes : l’augmentation des contrôles aux frontières, la réduction de l’immigration, la traque renforcée des exilé-es… Un alignement sur les politiques xénophobes de l’Europe forteresse. Dans la foulée, les autorités belges lancent l’expérimentation de caméras équipées de système d’intelligence artificielle à reconnaissance faciale.

Décidément, l’avenir s’assombrit partout, et la guerre menée par les dirigeants emprunte les mêmes chemins de Bruxelles à Paris.

Mais rien n’est perdu tant qu’il y a de la résistance. Et les belges viennent d’en offrir une démonstration magistrale le jeudi 13 février, avec une grève massive et une manifestation gigantesque dans les rues de Bruxelles. Entre 60.000 (selon la police) et 100.000 personnes ont manifesté pour «dénoncer les coupes budgétaires et la casse des services publics, et montrer leur désaccord avec le gouvernement», explique le média Bruxelles Dévie. Les aéroports, métros et bus ont été mis à l’arrêt, de même que de nombreuses écoles et institutions : un sérieux coup de pression contre l’Arizona.

Cette première sommation à l’égard du gouvernement n’a pas seulement été une marée humaine, elle a aussi démontré son offensivité et sa diversité, en réunissant au même moment différents fronts des luttes en cours : les syndicats et tous les secteurs du monde du travail étaient représentés, mais aussi des groupes antifascistes et anti-colonialistes, venus avec leurs propres slogans.

Sur le parcours, des affrontements ont eu lieu devant le siège du parti «Les engagés», qui fait partie du gouvernement. Les locaux ont été visés par des jets de peinture, la police a répondu par une violente charge. Même chose devant le siège du MR, où des gaz et des canons à eau ont été utilisés.

Face à la répression, une foule composée de syndicalistes, parfois équipés de boucliers, et de mouvements révolutionnaires et antifascistes a fait front. Sur le parcours, des enseignes capitalistes ont vu leurs vitres brisées et de nombreux tags ont été réalisés, ciblant notamment les enseignes Carrefour, entreprise soutenant Israël. 17 personnes ont été interpellées.

Mieux encore, les organisations engagées dans cette grande grève du 13 février annoncent d’ors et déjà un «marathon de résistance» qui doit durer jusqu’aux prochaines élections, prévues dans 4 ans et demi. Les syndicats appellent à des manifestations tous les 13 du mois, ainsi qu’à une grève générale le lundi 31 mars. D’autres collectifs appellent également à multiplier les actions hors du calendrier syndical.

Autrement dit, alors que les offensives du gouvernement belge ressemblent énormément à ce que fait Macron en France, c’est une stratégie totalement différente et bien plus intéressante qui est déployée. L’objectif est de proposer des dates régulières et de créer un climat de conflictualité sur le long terme, pour faire céder le bloc néolibéral et réactionnaire. Et si on s’en inspirait ?


Photos : Lydie Nesvabda, Bruxelles Dévie, Révolution Permanente, Le Soir

Pour plus d’infos sur les luttes en Belgique : @bruxelles.devie et https://bruxellesdevie.com/

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