Nantes : la communauté rom en lutte pour sa dignité


Mardi 13 mai, devant la mairie de Nantes, il y avait des mines grave et une soif commune de justice. Des membres de la communauté Rom de Nantes venaient porter leurs revendications avant la manifestation prévue ce samedi 17 mai.


La communauté rom de Nantes se mobilise devant la mairie avant la manifestation du 17 mai.

Dans l’agglomération nantaise, plus de 3500 personnes vivent dans des bidonvilles, principalement des familles roms. Une partie vit sur les terrains où la métropole implante un grand projet immobilier, dans le quartier de Doulon-Gohards et le reste au bord de la Loire, dans le quartier de la Prairie de Mauve. Le projet de Doulon va bétonner des espaces végétalisés pour étendre l’agglomération et risque de chasser ces familles.

Depuis 2022, la mairie socialiste leur promet des solutions, sans jamais tenir sa parole. Ces familles sont déplacées d’un terrain à un autre, au gré des projets urbains et des tensions avec les riverains.

La première intervention des porte-paroles vise à rappeler que les Roms sont des travailleurs et des travailleuses, contrairement à que ce laisse penser le discours dominant raciste. Viorel, l’un d’entre eux, insiste : «Nous sommes des travailleurs mais on n’a pas de respect. On n’a pas de pause, nous sommes des esclaves. les patrons ne respectent pas les roms».

En effet ces travailleurs, précaires parmi les précaires, triment essentiellement dans le maraîchage autour de Nantes. Ils taillent les vignes qui produisent le muscadet, cueillent les pommes et les fraises, ramassent le muguet, entre autre… Ils subissent une exploitation décuplée : non respect des contrats de travail, interdiction des pauses pour aller aux toilettes, licenciements expéditifs.

«Les roms signent des contrats alors que certains ne savent pas lire. Les patrons en profitent, jettent les contrats, ils ne paient pas les assurances maladies» et pourtant, localement, «les gros maraîchers ne pourraient pas fonctionner sans les roms» soulignent les intervenants.

«On n’a pas de protection» explique le père de famille. Un militant associatif qui leur vient en aide évoque le sort d’une femme rom travaillant dans les vergers de pommiers bourrés de pesticides, et dont les mains ont été rongées par les produits chimiques faute de gants adaptés. Et quand les roms qui travaillent dans les champs rentrent dans leurs bidonvilles, leurs vêtements sont imprégnés de pesticides dont il est difficile de se défaire.

Autre problématique majeure : l’accès concret des enfants à l’école. Plus de 500 mineur-es seraient en âge d’être scolarisé-es, et près de la moitié ne peuvent pas s’y rendre : les enfants sont dispersé-es sur de nombreuses écoles de la métropole, certaines situées très loin de leur terrain, et aucun transport en commun ne passe à proximité de leur lieu de vie.

Un père de famille explique qu’il part travailler à 5 heures du matin, et ne peut donc pas emmener ses enfants en classe. Cette situation entraîne un cercle vicieux : les autorités peuvent ainsi stigmatiser ces familles dont les enfants seraient «déscolarisés». Pourtant, un des porte-parole insiste sur la volonté de permettre à ses enfants d’accéder à une scolarité qui leur permettrait de s’extraire de la misère.

Sur le logement enfin, aucune promesse n’est tenue par la mairie. Sur les terrains de Doulon-Gohards et de la Prairie de mauve, plus de 1000 personnes auraient dû recevoir des propositions de relogement, il n’en a rien été. Les Roms demandent l’ouverture d’un vrai dialogue pour trouver des solutions. Par exemple, l’un d’eux propose la légalisation de terrains pérennes, qui seraient raccordés à l’eau et l’électricité en échange d’un loyer payé par les familles.

Tous insistent : il serait temps que les «concertations» mises en scène par la mairie écoutent réellement les concernés, qui ont des solutions concrètes à exposer, et un savoir faire en terme d’aménagement de terrains en habitat léger. Cela impliquerait de respecter de la parole donnée, et accepter que les roms soient considérés comme des habitant-es à part entière, qui peuvent exprimer leurs propositions sans la médiation d’experts hors sol.

Pour toutes ces raisons, les représentant-es de la communauté Rom ont posé le poing levé devant le portail de la mairie de Nantes, afin d’appeler à une manifestation de soutien ce samedi. Cette date n’est pas choisie au hasard : le 16 mai 1944, les familles tziganes du camp de Birkenau se sont soulevées contre les nazis. Cette date est désormais une journée de commémoration du génocide des Roms et des Tsiganes par les nazis. Un crime trop souvent passé sous silence.

La marche, qui partira à 17h du miroir d’eau, prolongera celle, contre le projet de Centre de Rétention et contre la dissolution du collectif Urgence Palestine. Un lien unit ces revendications : une exigence de dignité et un refus du racisme d’État.


Plus d’informations sur la page : Sauvons les Gohards

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