Contre Stérin : Nantes tient le terrain


1.000 manifestant·e·s sous la pluie, 150 personnes au gala d’extrême droite sur 800 places, des centaines de flics, plusieurs associations décommandées : récit de la mobilisation anti-Stérin à Nantes.


Alors que les organisations syndicales, associations et collectifs autonomes ont fait monter la pression ces dernières semaines, la mal nommée «Nuit du Bien Commun», véritable gala d’extrême droite, a finalement eu lieu ce jeudi 5 juin à Nantes. Malgré un dispositif policier démentiel et hors de prix, une interdiction de manifester par un préfet qui fait les yeux doux aux fascistes et une météo peu favorable, Nantes a su montrer qu’elle reste une terre de résistance.

Un quartier bunkerisé

Dès 14h, le centre ville de Nantes est quadrillé par une vingtaine de camions de CRS et de gendarmerie, vite rejoints par la BAC. Les transports en commun sont coupés dès la fin d’après-midi. À la sortie du travail, de nombreuses personnes se font contrôler : on ne sait jamais, au cas où de dangereux gauchistes se cacheraient sous le costume d’un-e employé-e de banque. Rarement Nantes aura connu un tel dispositif, qui a probablement coûté des centaines de milliers d’euros d’argent public.

Avant le début du gala, la soirée s’annonce mal : seules 8 associations sur 11 sont présentes, les 3 autres ayant finalement renoncé à leur venue. Ces structures sont pourtant le faire-valoir de ces soirées prétendument « caritatives ». Les associations ont d’ailleurs été sommées par les autorités de se rendre sur place dès 14h, avant la mise en place d’un véritable no man’s land autour de la Cité des Congrès. Le quartier est complètement bouclé pour protéger les fascistes. Pour rappel, les Nuits du bien commun font partie de la stratégie de Pierre-Édouard Stérin pour faire gagner l’extrême droite dans les esprits et les urnes en 2027.

À 17h, un blocage syndical démarre devant le pont Aristide Briand, sur l’île de Nantes, réunissant 200 personnes. Celles-ci font face à une compagnie de CRS qui s’occupe de bloquer totalement le pont. La police fait le travail à notre place, merci à elle, pour une fois qu’elle sert à quelque chose d’utile. Néanmoins, une scène inquiétante a lieu : alors qu’un petit groupe tient un barrage filtrant pour informer les automobilistes, un véhicule roule à gauche avant de foncer délibérément sur plusieurs syndicalistes qui s’écartent. Le conducteur sort de sa voiture avec une gazeuse à la main pour s’attaquer aux militant-es. Il est désarmé mais voulait clairement agresser des manifestant-es. Le tout sous les yeux des forces de l’ordre qui non seulement ont laissé faire, mais en plus qui déclarent aux syndicalistes qu’ils «l’avaient bien cherché».

Vous avez dit violences policières ?

Sous une pluie battante, un autre point de rassemblement anti-Stérin se met en place devant le CHU de Nantes, juste à côté de la zone d’interdiction de manifester. Tout est cerné d’uniformes, et les services de renseignement observent la foule depuis le toit de l’hôpital. Anxiogène.

Timide au démarrage, la foule grossit progressivement, jusqu’à atteindre 1.000 personnes au plus fort de la manifestation. Le cortège se met en route au son de la chorale et des batucadas, derrière trois banderoles de tête annonçant la couleur : «Nuit blanche pour les fascistes», «Fuck Stérin» et «Stérin SCAS-toi», suivies de près par les CRS et la BAC.

Arrivée au pont de la Rotonde, une première percée est tentée pour pénétrer dans la zone rouge, mais elle est repoussée. Le nombre de policiers est colossal. Commence alors un jeu du chat et de la souris entre manifestant-es et forces de l’ordre. La mobilité du cortège lui permet de tenter de se saisir des opportunités : un passage vers la gare, remonter vers Foch, faire demi-tour… Si les manifestant-es doivent avoir un cardio bien accroché, il en va de même pour les flics, qui doivent cavaler pour suivre le rythme. Pas un seul tir de lacrymo n’est lancé pour disperser le cortège, les CRS et agents de la BAC préfèrent charger régulièrement dans la foule à coups de matraques, tentant de couper la manifestation afin d’isoler des participant-es. 7 personnes sont interpellées.

Peu à peu l’étau se resserre, et une nasse démarre au miroir d’eau, toujours au son de la chorale qui ne se décourage pas. Comprenant que la foule ne se désolidarisera pas, la police finit par disperser les dernier-es manifestant-es. Il faut croire que les forces de l’ordre n’ont pas apprécié cette soirée sportive : avant de rouvrir la nasse, les CRS bloquent les manifestant-es le long des grilles de la voie ferrée, puis les font sortir 10 par 10 de force. Brutalité inutile et illégale, les flics distribuent des coups de matraques à la volée et sans motif, blessant plusieurs personnes. Soyons clairs : la police était venue casser du manifestant.

Finalement, même si le gala a bien eu lieu, le centre-ville de Nantes s’est retrouvé complètement paralysé par le dispositif policier, bien plus que par la manifestation. À force de bunkeriser la Cité des Congrès, cette dernière est devenue clairement inaccessible, et ce même pour les personnes que la mobilisation tentait d’empêcher de s’y rendre : alors que la salle peut accueillir 800 personnes, seules 150 ont été présentes au gala des fachos. C’est un échec numérique. Il y avait quasiment 10 flics pour protéger chaque soutien de Stérin venu à Nantes. Quant à la somme récoltée par «les Nuits du bien commun», elle s’élève à moins de 500.000 euros. On se demande si elle n’est pas inférieure au coût du dispositif policier !

Après Lyon et Tours, Nantes est la troisième ville à s’être levée contre Stérin et ses Nuits du Bien Commun. À chaque fois, la mobilisation est montée en puissance. Maintenons le cap : Rouen, Toulouse, Rennes, Marseille ou encore Angers sont les prochaines sur la liste. On compte sur vous.


Images : Estelle Ruiz, CA

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