L’armée tente de coloniser les esprits

La propagande de l'armée pour recruter sur une table de bar et sur le trottoir devant un lycée. En bas, un entraînement dans les rues de Carcassonne.

À Nantes comme sur le reste du territoire, la publicité pour l’armée envahit l’espace public. En plus des traditionnelles campagnes publicitaires, les clients des bars de la Place du Bouffay ont eu la stupéfaction de découvrir, en sirotant un muscadet ou une menthe à l’eau, des visuels affreux sous leurs boissons, placés dans les tables. Des soldats en uniforme qui rigolent avec ce slogan qui sonne comme un défi «Avoir des frères d’arme pour famille. Peux tu le faire ?» Autrement dit : aller à la guerre, même pas cap’ !

Encore plus stupéfiant, des pochoirs sont apparus devant des lycées de Nantes avec le même slogan «Peux tu le faire ?», le logo de l’armée française, et un numéro pour s’engager. L’opération est manifestement illégale. On rappelle que certains manifestants ont été arrêtés et jugés pour des tags. Que fait la police et la brigade anti-graffitis de la mairie de Nantes ? Par contre, on imagine mal des soldats en treillis sortir la nuit avec des bombes aérosol pour faire des petits pochoirs. Il s’agit probablement de l’œuvre d’une équipe de communicants professionnels. Qui la paie ? Avec quelle autorisation de taguer l’espace public ?

Troisième acte en quelques jours toujours à Nantes : un «Village de l’emploi» a été organisé le 24 juin dans le quartier Malakoff. Un quartier populaire marqué par le chômage, où les autorités annoncent fièrement une «action de proximité», selon le site internet dédié. Devinez quels emplois sont proposés à la jeunesse prolétaire ? En uniformes de flics ou de militaires ! Le village comportait un stand de la police municipale mais aussi celui de la Légion étrangère, avec un soldat en uniforme chargé de recruter des volontaires.

La Légion étrangère, c’est celle qui est envoyée en première ligne, le bataillon de choc dans les guerres coloniales, le plus violent. Celui qui subit le plus de pertes aussi. La Légion pousse l’esprit de corps jusqu’à changer le nom des recrues, pour leur retirer toute attache et identité, et qu’elles se consacrent entièrement à l’armée. Comme dans une secte.

Alors que le «réarmement» et la course à la guerre sont martelés par le pouvoir et que des centaines de milliards d’euros ont été débloqués pour l’armée, la propagande militariste s’intensifie. Dans les bars, les lycées, les quartiers : il sera bientôt impossible d’échapper à l’imaginaire kaki. Surtout quand on est jeune, et donc le cœur de cible des campagnes de recrutement.

Vendredi 27 juin, 800 militaires et une centaine de véhicules blindés jouaient à la guerre dans les rues de Carcassonne. Enfin, jouer est un bien grand mot puisque les scènes étaient réellement effrayantes. Les militaires se sont entraînés au milieu des passants en condition réelle, tirant à blanc, comme dans une guerre urbaine. «C’est vraiment une manœuvre de combat, de guerre, dans un scénario de haute intensité, et il est important, je pense, que les Français se rendent compte que leur armée est prête» expliquait un colonel. Rassurant. Là encore, il s’agissait d’une coûteuse opération de propagande destinée à impressionner la population.

En 2023 déjà, 7.000 militaires mettaient en scène une bataille dans la ville de Cahors. Les soldats en équipement complet devaient attaquer des positions, sauter en parachute sur des cibles, tenir les ponts de la ville avec des mitrailleuses… Le tout au milieu de la population.

À quoi sert cette débauche de moyens ? Pourquoi nous habituer à des scènes de guerre dans les villes de France ? Quel message souhaite faire passer le gouvernement ?

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