Militarisation : des contrôles dans les trains avec des fusils d’assaut


Cette photo paraît sortie d’une scène de guerre, d’une dictature ou d’un film dystopique, mais elle a pourtant été prise dans un train, en France, en 2025.


Dans un train du sud-est de la France, un contrôle de billets a lieu sous le regard d'un gendarme lourdement armé.

Voici le message publié le 5 décembre par le compte officielle de la gendarmerie sur le réseau X : «Dans le cadre de l’opération européenne Railpol, les gendarmes de Haute-Savoie ont réalisé un contrôle commun avec la sûreté du groupe SNCF dans les gares et à bord des trains. #ContrôleDesFlux»

On y voit un gendarme avec un fusil d’assaut HK G36 au premier plan, et un contrôleur de la SNCF qui vérifie avec bonhommie le ticket d’un passager à l’arrière. Voilà la nouvelle normalité dans ce pays. Vérifier des titres de transport en présence d’armes de guerre. Habituer des fonctionnaires du rail à mener des missions banales en présence d’armes lourdes.

Le HK G36 est une arme de guerre produit par la firme allemande Heckler et Koch, calibre 5,56 mm. Ce fusil tire jusqu’à 750 coups par minute, les balles de ce calibre éclatent au contact d’un os ou perforent le corps, elles sont destinées à faire le plus de dégâts possible sur un champ de bataille. Leur usage est militaire. La police et la gendarmerie en ont été dotée au nom de l’antiterrorisme à partir de 2015.

Initialement destinés à faire face aux attentats, les HK G36 ont envahi l’espace public, notamment aux abord des manifestations. À Nantes, un CRS était photographié en train de brandir ce fusil le 18 mars 2023, lors d’une mobilisation pour défendre les retraites, au milieu de charges et d’affrontements. En 2022, le soir de la réélection d’Emmanuel Macron, près de la Préfecture de Paris, un policier avait mitraillé un véhicule et ses occupants avec ce fusil, pour un simple refus d’obtempérer. Plus de 10 balles tirées en quelques seconde et deux frères, noirs, morts sur le coup. L’enquête a montré que les munitions ont frappé les deux hommes par l’arrière : ils ont donc été exécutés. Le policier a été mis en examen pour «homicide volontaire».

Ces armes ne servent donc pas uniquement à effrayer ou à faire de la figuration. En 2019, après le déclenchement du mouvement des Gilets jaunes, le Ministère de l’Intérieur commandait simultanément des milliers de grenades pour le maintien de l’ordre et 25 millions de cartouches destinées aux HK G36. Nous sommes désormais entourés de milliers d’armes de ce type, pouvant causer des dégâts considérables. Pourtant, quand l’État a distribué les premiers Flash-Balls puis LBD, c’était soi-disant pour éviter aux policiers d’utiliser les tirs à balles réelles. Ces engins devaient remplacer les pistolets, empêcher l’usage d’armes mortelles. C’est exactement l’inverse qui s’est produit.

À présent, au nom d’un simple «contrôle des flux» dans les trains, les communicants du Ministère de l’Intérieur choisissent d’exhiber ces fusils. Ils habituent tout le monde à un climat de guerre.

En 1995, le gouvernement lançait le plan Vigipirate sur fond d’attentats. Au nom de la lutte anti-terroriste, des militaires étaient déployés dans l’espace public, et la population commençait à s’accoutumer à la présence de treillis et d’armes dans les gares, les aéroports et dans les rues. Prévu pour être temporaire, Vigipirate a été sans cesse prolongé, durci, puis complété par l’Opération Sentinelle en 2015. Les touristes venus de pays voisins, comme la Suisse, l’Espagne ou l’Italie, sont stupéfaits de voir des soldats en uniformes et armés patrouiller dans des marchés de Noël ou sur des places fréquentées.

Ces «plans» n’ont jamais été suspendus, mais au contraire sans cesse augmentés, au point que, comme on le voit, de simples gendarmes armés comme des soldats en guerre mènent des missions qui étaient jadis banales. Nous vivons déjà dans un état de guerre de basse intensité, que nous avons peu à peu fini par ne même plus remarquer.

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