Les «juges rouges» sont un mythe, les juges bruns existent réellement


Un, deux, trois magistrats d’extrême droite : comment les juges bruns utilisent leurs fonctions pour servir leur agenda néofasciste


Charles Prats, Tom Collen-Renaux et Thomas Toussaint : trois juges bruns qui mettent l'institution judiciaire au service de leur idéologie fasciste et raciste.

La légende des «juges rouges» a la dent dure, on a encore pu le constater lors du procès de Nicolas Sarkozy ou après la condamnation de Marine Le Pen. La classe bourgeoise s’est unie sur les plateaux télé pour dénoncer une prétendue justice «de gauche» avide du sang des bourgeois. Des éditorialistes ont même osé affirmer que les juges seraient serait trop «laxistes» envers les personnes racisées et les petits délinquants, mais d’une grande sévérité envers les riches et les puissants. Une inversion totale du réel.

Les juges sont tout à fait aux ordres de la bourgeoisie, elle-même en cours de fascisation à vitesse grand V. Et lorsqu’ils occupent des postes ayant trait aux droits des étrangers ou des personnes racisées, on se doute de l’enfer qu’ils peuvent leur faire vivre. Voici le portrait de trois authentiques juges bruns.

Tom Collen-Renaux, un candidat RN qui tranche les affaires de droit des étrangers au tribunal administratif de Melun

Le RN est un parti profondément raciste et xénophobe, tout le monde le sait. On ne sera donc pas surpris des choix de carrière de Tom Collen-Renaux, magistrat au tribunal administratif de Melun le jour, candidat RN aux municipales de 2026 à Amilly, dans le Loiret, la nuit. Nos confères et consœurs de StreetPress ont pu consulter ses décisions judiciaires depuis son arrivée en juillet 2024.

Tom Collen-Renaux a rejeté absolument toutes les demandes adressées depuis sa prise de fonction. Parmi elles, la demande de renouvellement de titre de séjour d’un Malien arrivé en France en 2012 et régularisé par son travail dès 2021. Le juge néofasciste a refusé d’annuler son Obligation de quitter le territoire français – OQTF. Utiliser sa fonction pour servir un agenda politique raciste, pourquoi s’en priver ? Ce conflit d’intérêt évident aurait été validé par le Conseil d’État selon les dires du magistrat, mais le Conseil réfute s’être prononcé sur ce cas.

Bien que StreetPress explique que la situation serait «très mal vécue au tribunal», ce cumul n’est pas illégal. La seule règle à respecter est qu’il «peut mentionner sa fonction mais sans préciser son tribunal d’exercice». Une faille que Tom Collen-Renaux s’est empressé d’exploiter. Il est un frontiste forcené : encarté dès ses 16 ans, collaborateur parlementaire du politicien d’extrême droite Ludovic Pajot, il suit le chemin du bon petit soldat et se rêve donc maire brun dont la priorité sera bien entendue : l’insécurité. Et ce petit juge néofasciste de 26 ans entend bien conserver la double casquette s’il est élu.

Thomas Toussaint, un juge raciste à la Cour nationale du droit d’asile

Le média Les Jours avait déjà révélé la présence de juges racistes à la CNDA : Isabelle Agier, responsable de près de 10% des ordonnances de rejet sans même tenir d’audience, ou bien Jean-Marie Argoud, qui affichait son islamophobie et son antisémitisme sur les réseaux sociaux.

Voilà qu’un troisième a été épinglé : Thomas Toussaint, militaire de carrière passé général en 2021. Ce dernier est devenu juge assesseur en octobre 2024, et officiait sur le sort des demandeurs d’asile déboutés par l’Ofpra, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. Il a pourtant la particularité d’avoir été écarté par le RN en vertu de ses positions trop… extrêmes, notamment ses position pro-russes affichées. « En route pour la vitrification ! J’espère que Poutine commencera par Lyon qui a voté à 80% pour Macron» avait-il écrit sur une boucle Whatsapp.

Il avait également évoqué le risque de «guerre civile» qui serait une «menace plus terrifiante que le réchauffement climatique». Il a depuis rejoint le parti Spartacus, qui n’a rien à voir avec la révolution allemande, mais qui est le nom d’un parti poujadiste qui regroupe les déçus du RN. Le juge Toussaint est tête de liste dans le VIe arrondissement de Lyon pour les municipales.

Depuis les révélations des Jours, ce magistrat nazillon a finalement été écarté de la CNDA, selon le pôle presse de cette dernière. Il est plus qu’inquiétant qu’il ait fallu qu’un média indépendant mette son nez dans les affaires de l’institution pour que cette dernière soit contrainte de prendre des mesures.

Charles Prats, le magistrat cow-boy qui fait la chasse à la «fraude sociale» pour servir un agenda raciste

Charles Prats, candidat RN-LR de Haute-Savoie, est un magistrat très médiatisé, dont la marotte favorite est la fraude sociale qu’il instrumentalise pour servir son agenda raciste. Quitte à dire à peu près n’importe quoi, notamment lors de ses passages sur Cnews : ses propos étant systématiquement débunkés par n’importe quel média un peu sérieux. Il intervient aussi régulièrement sur BFM et sur des sites d’extrême droite comme Boulevard Voltaire – fondé par le frontiste Robert Ménard – ou TV Libertés, chaîne liée au Front National. Pour lui, lutter contre la fraude sociale (qui, rappelons-le, est infinitésimale comparée à la fraude fiscale, et est majoritairement due aux fraudes des professionnels de santé eux-mêmes) c’est lutter contre l’immigration.

L’un de ses chevaux de bataille était, bien évidemment, la suppression de l’aide médicale d’État (AME) pour les étrangers. En 2024, il se voyait déjà ministre de Jordan Bardella, affirmant «Il faudrait être fou pour refuser le ministère des finances» après la dissolution de l’Assemblée nationale.

En janvier 2023, Charles Prats était rappelé à l’ordre par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) qui lui infligea une sanction disciplinaire suite à des tweets appelant les gilets jaunes la «peste noire» et évoquant les «Khmers verts», cette marotte de l’extrême-droite assimilant les écologistes aux Khmers rouges ayant assassiné près d’un tiers de la population du Cambodge dans les années 70.

Médiapart avait en outre contacté une dizaine de ses anciens collègues, qui sont unanimes : cet homme est un incompétent. Il cultive son image de «cow-boy», s’affichant carrément avec un gilet pare-balle : «Ouais et alors ? Je m’en servais parce que j’aimais accompagner la PJ sur certaines interpellations». Il exerce toujours à ce jour.

Avant cela, Charles Prats, pourtant militant d’extrême droite, a été chargé par la justice d’une affaire emblématiques concernant des antifascistes. C’est lui qui a maintenu pendant de longs mois le militant Antonin Bernanos en détention, suite à une altercation avec des militants néo-nazis. Un enfermement exigé sans l’ombre d’une preuve, par pure vengeance.

Il n’est pas étonnant que Charles Prats utilise sa fonction de magistrat pour écraser les opposants à l’extrême droite, puisqu’il s’attaque fréquemment aux «antifas» sur Twitter et s’en prend à ceux qu’il appelle les «nervis d’extrême gauche». Pour le devoir de réserve, on repassera. Imaginez qu’un juge tienne le dixième de tels propos à gauche, il subirait des campagnes médiatiques intensives pendant des semaines, et serait probablement révoqué par le Ministre de la justice Darmanin.


Ainsi, la légende des «juges rouges» paraît bien éloignée de la réalité : celle des juges bruns, qui avancent à visage découvert et peuvent impunément utiliser leur fonction au service de leur idéologie. Ils sont déjà prêts pour un basculement fasciste.


AIDEZ CONTRE ATTAQUE

Depuis 2012, nous vous offrons une information de qualité, libre et gratuite. Pour continuer ce travail essentiel nous avons besoin de votre aide.

Faites un don à Contre Attaque, chaque euro compte.