Mercredi 16 novembre. La nuit est tombée sur la place du Bouffay et le sol est trempé par une bruine incessante. Une soixantaine de personnes se retrouvent autour d’un barnum et de banderoles, un an après le début de l’état d’urgence.
Le micro est ouvert. On revient sur l’état d’exception qui s’impose comme un nouveau paradigme de gouvernement, sur les cibles touchées par une répression accrue ces derniers mois : musulmans, pauvres, opposants politiques. Alors que les menaces s’amplifient à nouveau sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, depuis que la justice a donné un feu vert aux expulsions, on présage à nouveau une utilisation de l’arsenal anti-terroriste contre celles et ceux qui comptent résister au saccage du bocage.
L’armement de la police municipale de Nantes est évoqué. La mairie socialiste compte distribuer des Lanceurs de Balles de Défense à ses policiers. Quelques instants plus tôt, une dizaine de municipaux harcelaient quelques SDF qui faisaient la manche sur la place. Les auxiliaires de la gentrification à la nantaise seront donc puissamment armés dans les mois qui viennent.
Malgré le retour à l’ordre et le début d’une campagne présidentielle qui s’annonce désastreuse, les perspectives sont abordées. Il s’agira de reprendre l’initiative pour ranimer les braises qui couvent depuis le printemps, en s’inspirant par exemple de la mobilisation qui avait fait annuler l’université d’été du PS à la rentrée.
Puis, tranquillement, un petit cortège s’improvise pour se faire entendre dans les ruelles de Bouffay. Mais un autre cortège, au moins aussi conséquent, d’hommes casqués, cagoulés et armés talonne les manifestants. Arrivés à Decré, la BAC charge sans sommation, en hurlant. Paniqués, les manifestants se dispersent en courant. Les rues seront bouclées dans les minutes qui suivent par des dizaines de policiers en armures, prêts à tirer. Une véritable souricière avait été préparée.
Il ne reste plus au détour d’une ruelle, qu’une banderole «Contre l’état d’urgence, résistance !», abandonnée sur le pavé luisant.