Aide aux migrants – Cédric Herrou : « La justice applique des idées d’extrême droite »


Agriculteur militant, principale figure de l’association Roya Citoyenne, il dit « faire le travail de l’État » en hébergeant des migrants. Poursuivi pour « aide à l’immigration clandestine », Cédric Herrou réagit à sa condamnation en appel à quatre mois avec sursis ce mardi 8 août. Il pense que sa médiatisation a joué dans la sévérité du verdict. Et annonce d’emblée qu’il compte se pourvoir en cassation :


« Je suis en colère, mais je ne m’arrêterai pas du tout. Au contraire, on va mieux s’organiser pour mieux continuer. D’ailleurs, on va en cassation. »

– La cour d’appel d’Aix-en-Provence vous condamne à quatre mois de prison avec sursis. La sanction est plus sévère qu’en première instance, est-ce que c’est une surprise ?

– Bien sûr ! Au départ, j’ai voulu médiatiser tout ça pour alerter la justice. J’avais confiance en elle, je pensais qu’elle était indépendante… Aujourd’hui, la schizophrénie de la justice me surprend. On me dit ce qu’il ne faut pas faire, mais jamais quoi faire : un exemple, j’ai une vingtaine de mineurs isolés, qui attendent d’être pris en charge. On nous dit « non on ne peut pas les prendre ». Puis on me reproche de les garder.

La question n’est pas d’être pour ou contre, d’aimer les frontières ou non. On est en France, on se doit de respecter les droits de l’homme, la protection des enfants. A quoi bon avoir cette stature, cette image de pays des droits de l’homme à l’étranger si on en arrive là ? Si on en arrive à incriminer les gens au faciès, au prétexte qu’ils sont noirs ou étrangers ?

– Que voulez vous dire quand vous parlez de schizophrénie de la justice ? S’agit-il à vos yeux d’une décision politique ?

– Ça fait vingt ans qu’on nous dit d’aller voter, faire barrage au Front national et aux idées d’extrême droite. Mais ces idées d’extrême droite elles sont là, elles sont appliquées par la justice ! Il y a un problème ! Si je dois passer un message, j’irai en prison. Franchement, je me sentirai beaucoup plus libre en prison que ces gens censés représenter la justice et qui se font manipuler par une politique dégueulasse de droite extrême. On va vraiment vers des années noires. J’ai fait un appel à Macron, je demande vraiment à ce qu’il réagisse.

– Pensez-vous que votre médiatisation a influencé la sévérité de ce verdict ?

– Les faits parlent d’eux-mêmes. Quand je n’étais pas médiatisé, l’affaire était classée sans-suite, on brandissait l’immunité humanitaire alors même que j’avais été attrapé en flagrant délit en train de faire passer des gens à la frontière. Pour être plus crédible, je me suis dit qu’il fallait que j’arrête les actions illégales. J’ai médiatisé à mort pour être entendu par la justice, les politiques…

Maintenant, il n’y a aucune flagrance de passage à la frontière, rien, je revendique seulement le fait d’accueillir des gens qui ont passé la frontière par leurs propres moyens. La réponse c’est quatre mois avec sursis.

– Cette condamnation a-t-elle vocation, selon vous, à dissuader, à servir d’exemple ?

– Quand je repense à toutes ces caméras dans la salle d’audience, c’est fou. On est aux Etats-Unis ou quoi ? Ils se servent de moi pour faire peur aux autres. Mais, ça ne sert pas à ça la justice… Tous les gamins, les gens que j’ai aidés, ceux qui ont été pris en charge, qui vont à l’école, ont des papiers, sont intégrés… Ça vaut quoi, ça vaut rien ? »


Source : http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/migrants/20170808.OBS3110/aide-aux-migrants-cedric-herrou-la-justice-applique-des-idees-d-extreme-droite.html

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