Cela fait plus de 5 ans que Clément Méric a perdu la vie. C’était le soir du 5 juin 2013.

À l’époque, l’extrême droite descend dans les rues pendant des semaines pour manifester son homophobie. Lors des « Manif pour tous », plusieurs émeutes d’extrême droite ont lieu en plein cœur de Paris. Les agressions homophobes se multiplient. Les groupes les plus violents prennent la confiance et passent à l’acte. Les médias ne prennent même pas la peine de cacher leur complaisance avec la droite la plus dure : chaque rassemblement passe longuement en prime time, avant tout le reste.
C’est dans ce contexte qu’une bande de néo-nazis est aperçue le 5 juin en train de parader en plein cœur de la capitale avec des T-Shirts : «White power» et «100% pure race». Ce qui aurait été, il n’y a pas si longtemps, un réflexe minimal et partagé – s’opposer à la présence de nazis dans nos rues – n’était assumé ce jour là que par une poignée de militants. Nous avons changé d’époque. Ce soir là, Clément, 18 ans, refuse de baisser les yeux face à l’extrême droite raciste et violente. Frappé à coups de poing américain en plein visage, il perd la vie. Une vie volée. Celle d’un trop jeune camarade.
Dans les jours qui suivent ce drame, on assiste à un incroyable retournement de situation. Les antifascistes qui ont été les seuls à avoir une réaction saine en répondant aux néo-nazis sont traînés dans la boue. Et même qualifiés d’agresseurs. La mémoire de Clément est souillé post-mortem. La chaîne France 2 diffuse au JT un montage en images de synthèses qui met en scène Clément en train d’attaquer de dos. Un énorme mensonge, aujourd’hui démontré par l’enquête. Mais qui se soucie aujourd’hui de la vérité ? Comble de l’ignominie, on invite alors des militants néo-nazis tels que Serge Ayoub à venir s’expliquer tranquillement sur les plateaux télés. De la même manière que pour Benalla, les crapules ont toujours le droit à des tribunes médiatiques après avoir commis leurs méfaits. La voix des premiers concernés, elle, est alors réduite à néant, dans une cacophonie politicienne et médiatique. Et l’extrême droite, fidèle à son abjection, se régale de la mort d’un jeune de 18 ans sur les réseaux sociaux.
Cinq années ont passé
Nous savons à présent que les néo-nazis impliqué dans l’affrontement se sont vantés par SMS le soir même : « j’ai frappé avec ton poing américain», «on les a défoncés». On sait que le tueur de Clément a arboré pendant des années des tatouages fascistes, qu’il vient d’effacer la veille du procès. On sait que la bande d’extrême droite était proche d’un autre groupe criminel, appelé « Picard Crew », arrêté depuis pour banditisme, détentions de nombreuses armes, violences et tentatives d’homicides. On connaît les liens entre l’extrême droite radicale et certaines franges de la police, notamment à Lille, où un militant identitaire trafiquait des armes de guerre avec la complicité d’un gendarme.
On constate surtout depuis 5 ans l’explosion des violences fascistes, sur fond de libération générale de la parole raciste. L’an dernier, le 7 mai 2017, deux adolescents étaient tabassés par une bande de 5 néo-nazis à Nantes. L’un des jeunes, Erwan, faisait un arrêt cardiaque. Sauvé de justesse, il gardera à vie des séquelles d’une agression dont presque personne ne parle en dehors de Nantes.
Ce mardi 4 septembre, le procès des agresseurs néo-nazis à l’origine de la mort de Clément commence. Ils comparaîtront face aux amis de Clément. Nos amis. La justice va sans doute essayer de maquiller une agression fasciste en « bagarre entre bandes ». De mettre à égalité des nostalgiques d’Hitler et des militants pour la justice et l’égalité. C’est aussi la stratégie du gouvernement en place, qui met dos à dos « les extrêmes », mais laisse agir les groupes comme Génération Identitaire, alors qu’il réprime avec une extrême férocité les luttes étudiantes, lycéennes, ou salariales. De même, les députés En Marche votent à l’unisson, avec le FN, les lois qui s’attaquent avec une violence inédite aux exilés.
Pour Clément, mais aussi pour Erwan, agressé à Nantes en 2017, ou Hervé, tué à Lille en 2013, et toutes les personnes attaquées par l’extrême droite, plus un pas en arrière face aux fascistes.
Alors que des émeutes néo-nazies ont lieu en Allemagne, qu’un fasciste est au gouvernement en Italie, et que l’extrême droite monte partout en Europe, l’antifascisme est, plus que jamais, l’affaire de toutes et tous.
Pour aller plus loin :
- « Ouverture du procès des assassins de Clément Méric : à Lille comme à Paris, l’extrême droite tue »
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