Deux nantais condamnés pour une « pendaison » symbolique de Macron


Le retour du crime de lèse majesté


Au milieu d'une manifestation, des personnes fixent un mannequin à l'effigie de Macron à un gibet pour mettre en scène sa pendaison.

Les faits ont eu lieu à Nantes, bien avant le mouvement des Gilets Jaunes.

Le 7 avril 2018, lors d’une manifestation bon-enfant contre la politique du gouvernement, une marionnette en papier et en chiffon est jugée symboliquement par les participants. Sur cette marionnette, le visage d’Emmanuel Macron. Dans une cérémonie collective, avec des rires et des slogans, la marionnette est pendue. L’action est ironique, non-violente, banale, digne d’un carnaval. Cela fait des décennies que les figures au pouvoir sont caricaturées ou punies symboliquement dans les manifestations. Mais à présent, plus aucune contestation n’est tolérée par le pouvoir. Sans peur du ridicule, l’ensemble de la classe politique avait alors dénoncé dans les médias et sur le net un acte «inqualifiable».

Mardi 18 juin 2019, plus d’un an après les faits, deux nantais passent en procès. Ils sont condamnés pour «outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique en réunion» par le tribunal correctionnel de Nantes. La peine est légère mais la condamnation, bien réelle, risque de faire jurisprudence pour tous les autres cas de pendaison ou de condamnation symbolique de Macron, effectuées par les Gilets Jaunes récemment. Le «crime de lèse majesté» est de retour.

Au-delà de la peine, ce sont les moyens totalement délirants qui ont été mis en place qui doivent nous inquiéter. Pendant deux mois, une équipe de la Police Judiciaire de Nantes avait enquêté sur ce «crime de lèse majesté». Réprimer les contestataires est une priorité de la police nantaise, qui avait mis les grands moyens. Les enquêteurs avait récupéré des photos de journalistes, violant le secret des sources. Un manifestant avait été interpellé à son travail, placé en garde à vue et perquisitionné comme un criminel ! Un autre, à la santé défaillante, avait aussi été placé en cellule. La presse avait écrit sans rire : «on le soupçonne d’avoir frappé la marionnette». Enfin, un mineur soupçonné d’avoir participé à l’action avait lui aussi été convoqué au commissariat. Surréaliste.

Bref, l’État français met des moyens colossaux pour faire taire et terroriser tout discours alternatif, toute action de désobéissance, toute critique du gouvernement. Même si elle est ironique ou non violente.

Un pouvoir qui met de tels moyens pour traquer les auteurs d’une telle action est un pouvoir bien fragile. Ou totalement paranoïaque. Probablement les deux.


Source : https://www.lindependant.fr/2019/06/18/deux-hommes-condamnes-pour-avoir-pendu-un-mannequin-de-macron,8263989.php

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