Une interview passionnante de l’écrivain de Science fiction Alain Damasio, par le média Reporterre est à lire sur leur site. Extraits :
Ce gouvernement nous martèle depuis deux ans : «Nous sommes l’innovation, nous sommes la réactivité, nous sommes la performance», et au moment crucial où il faudrait «performer», plus personne ! Jugeons Macron et ses laquais sur leurs propres critères, c’est-à-dire en tant que managers supposés de «la start-up nation».
Même se procurer des masques, négocier les achats, ils en ont été incapables. C’est une faillite complète. Et si l’on met ça en regard avec ces infirmières qu’on a matraquées et gazées à bout portant un mois avant le déclenchement de la pandémie, avec les grèves et démissions des médecins qui ont été traités avec un mépris absolu avant d’être érigés en héros, oui, ça fout la rage !
Pour prendre un exemple : j’ai été sidéré que l’interdiction faite aux proches d’aller soutenir leurs parents alors qu’ils sont en train d’agoniser, de «partir», ait été acceptée si facilement. À titre personnel, ça me paraît inadmissible et scandaleux. Mon père ou ma mère serait en train de crever, j’entrerais de nuit dans l’Ehpad, je sauterais les grilles avec mon frère, j’escaladerais la façade, je ferais n’importe quoi mais je ne les laisserais jamais mourir seul sous respirateur… L’accompagnement des vivants auprès des morts fait partie du lien le plus fondamental. On se rend compte que le refoulement de la mort est devenu tellement puissant, sa conjuration tellement ancrée dans nos sociétés que, quand la mort ressurgit, qu’on nous la met devant les yeux, on la fuit.
Pour le déconfinement, je rêve d’une chose simple : un vrai carnaval des fous, comme au Moyen-Âge, qui renverse nos rois de pacotille. Un carnaval immense, dès le 12 mai. Avec des masques fabriqués, artisanaux, inventifs, et ce mot de désordre : «Stop ! On ne reprend pas les choses comme avant ! On ne reprend pas ce monde tel qu’il est. Gardez-le, ce monde du burn-out, de l’exploitation de tous par tous, du pillage généralisé du vivant ! Halte-là ! On ne reprend aucun de vos produits : ils sont périmés !»