Hommage : Maurice Rajsfus


«Il y a entre la police et moi un vieux compte qui ne sera jamais réglé»
Maurice Rajsfus, 1928-2020


«Si tu leur réponds, il y a outrage. Si tu résistes, il y a rébellion. Si tu prends la foule à témoin, il y a incitation à l’émeute.» Voilà comment Maurice Rajsfus arrivait, en une seule formule fulgurante, à décrire l’impunité et la toute puissance policière. Il est décédé hier, après une vie entière de combats.

Maurice Rajsfus est un rescapé de la Shoah, sa famille est arrêtée et déportée par des policiers français lors de la rafle du Vel-d’Hiv. Il a 14 ans, ses parents ne reviendront jamais. «Les policiers français ont volé des années de vie à mes parents. Tous ont participé aux rafles quand ils étaient requis. Pratiquement pas un seul n’a démissionné. Si la police française ne s’était pas mise aux ordres, jamais il n’y aurait eu autant de dégâts. Il y a eu 250.000 déportés de France, dont 76.000 juifs, les autres étant, pour l’essentiel, des communistes et des gaullistes…»

Il ne pardonnera jamais à la police sa collaboration. Ni ses violences passées et présentes. Autodidacte, il devient historien des violences policières, qu’il recense à partir de 1968 et ce pendant près de cinquante ans, notamment au travers du bulletin «Que fait la police ?».

«Infatigable militant antiraciste et antifasciste», il sera de tous les combats, pour les peuples algérien et palestinien, contre l’extrême droite, contre les violences policières en banlieue, pour les libertés. Il fonde l’Observatoire des libertés publiques en 1994, suite au meurtre du jeune Makomé dans un commissariat du 18e arrondissement de Paris.

Jusqu’à son dernier souffle, il a soutenu les familles de victimes des violences d’État. Il laisse derrière lui plusieurs décennies de travail d’archive et plusieurs livres. Il est décédé au moment où les luttes contre les violences policières trouvent un nouveau souffle. Il avait confié il y a quelques années «Si j’avais un vœu à formuler après ma mort, c’est que mes cendres soient répandues le long des murs de la préfecture de police à Paris, le lieu du crime de la rafle du 16 mai 1942 et aussi du 17 octobre 1961».


Il reste vivant dans nos luttes


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