Mise en examen, la photographe Maya Huasca raconte
On s’y sera finalement fait. Les policiers cagoulés, les portes défoncées, les insultes, les menottes et tout le petit manège judiciaire qui s’enclenche en même temps que les annonces tonitruantes dans la presse. La répression politique en France est devenue un fait divers. Médiatiquement en tous cas ; pour les personnes ciblées, c’est une autre histoire. Qui se souvient de l’information principale du 7 décembre dernier ?
À Bordeaux, plusieurs dizaines de policiers de la BRI (Brigade de Recherche et d’Intervention) interpellent 16 gilets-jaunes-blackblocs-d’ultragauche-radicalisés qui se «préparaient ensemble à la guerilla» selon nos confrères du Parisien. On leur reproche des tags dans le quartier et on les arrête dans un «appartement conspiratif» où sera découvert rien de moins qu’un «atelier de confection d’engins explosifs». «On n’avait jamais vu ça auparavant» confiait un haut responsable policier bordelais au même Parisien. Médiatiquement, cette affaire n’a jamais connue de suite. Que reprochait-on réellement aux 16 interpelés ? Qu’est-ce que l’enquête judiciaire est venue confirmer ou infirmer ? Dans quelle mesure cette «affaire» était-elle d’abord un objet de communication policier et préfectoral ? Qu’est-il arrivé aux interpellés ? Il semblerait que les dizaines de rédactions ayant repris ce «fait divers» pour le diffuser massivement ne se soient pas posées ces questions. La répression politique sait trouver des relais peu regardants.
Maya Huasca fait partie de ces 16 interpellés et mis en examen. Nous publions aujourd’hui son récit depuis les premières loges de cette opération de la BRI contre les «gilets-jaunes d’ultragauche radicalisés», illustré par Slyz. Nos lectrices et lecteurs pourront dès lors apprécier le décalage entre la propagande que cette opération aura servie et le vécu des personnes instrumentalisées.
« Explosion en bas, suivie d’un hurlement de femme, vacarme des pas dans l’escalier. Des hommes hurlent, on capte que c’est la police. L. me regarde, sidéré, assis sur le lit. Je me lève, je pense à m’enfuir par le vélux, me cacher sous le lit, je me ravise. La porte de la chambre s’ouvre brutalement sous le coup de pied d’un policier cagoulé, arme au poing. Il hurle, colle son flingue à deux centimètres de mon crâne et me crie de m’allonger sur le ventre, les mains dans le dos. Je sens son corps sur le mien, m’écrasant de tout son poids pour m’attacher les poignets. Je crie de douleur. «C’est trop serré» il me répond «Je m’en branle». »
Le récit complet à lire et partager ici