«Nous sommes en guerre» : un conseil restreint composé de militaires gère le pays pendant la crise sanitaire

En période de crise et d’état d’urgence sanitaire, ce ne sont plus les élus qui détiennent le pouvoir, mais un comité restreint politico-militaire, le «conseil de défense et de sécurité nationale». Ce conseil prend racine au début du siècle dernier, il s’inspire en 1906 du «comité de Défense impériale britannique». En France, il rassemble le président, quelques ministres et les hautes autorités militaires. Dans les années 1980, un «Conseil de sécurité intérieure» est créé par la droite en réaction à une vague d’attentats. À partir de 2007, Sarkozy veut un «Conseil de sécurité nationale» sur le modèle américain. Chose faite en 2009 par décret. Ce «Conseil de défense» définit les grandes orientations militaires, les opérations de guerre et doit gérer les «crises majeures». Nous y sommes. C’est ce conseil qui a pris la décision de confiner par exemple.
Ce conseil, qui est sensé rester exceptionnel, est utilisé massivement ces dernières années. En 2015, François Hollande utilise ce format après les attentats : 10 réunions cette année-là, puis 32 en 2016, et 42 en 2017. Avec Macron, la décision est prise de réunir le conseil «une fois par semaine», le président veut «en faire un moment clef d’examen de l’évolution des dossiers et de la prise de décision». Cette année, c’est un record : depuis janvier, 40 réunions ont déjà été organisées, dont trois pour la seule semaine du 26 octobre. C’est le lieu majeur de préparation des décisions du président de la République sur les enjeux essentiels de la sécurité du pays, selon le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Il a aujourd’hui quasiment remplacé le Conseil des ministres, c’est donc ce «conseil de sécurité» qui gouverne de facto la France depuis le début de l’état d’urgence sanitaire, sans avoir de compte à rendre, puisque toutes les réunions ont lieu sous «secret défense».
Mais alors, qui compose ce cercle restreint proche du pouvoir ? En plus du Président de la République, on trouve le général François Lecointre, chef d’État-Major des armées, M. Stéphane Bouillon, secrétaire général de la Défense et de la Sécurité nationale, M. Bernard Émié, directeur général de la sécurité extérieure, M. Nicolas Lerner, directeur de la Sécurité intérieure. Des militaires et des chefs des services de sécurité donc, et pas spécialistes des questions de crise sanitaire. Ils sont entourés de M. Jean Castex, Premier ministre, Florence Parly, ministre de la Défense, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, Olivier Véran, ministre de la Santé.
C’est donc un cercle militarisé qui commande depuis des mois en France pour «gérer» la crise sanitaire. Une gestion particulièrement brillante comme tout le monde l’aura remarqué. Ce conseil comprend donc une moitié de militaires et d’agents de sécurité, et seulement un ministre ayant des compétences en matière de santé. Et une seule femme. Depuis 2015, entre l’état d’urgence prolongé contre le terrorisme ou le Coronavirus, la France connaît un état d’exception quasiment permanent, ponctué d’utilisation du 49.3 et d’ordonnances pour imposer les mesures les plus contestées. Le tout à coups de grenades sur les récalcitrants si nécessaire. Le Régime politique actuel est hybride : il n’est plus démocratique au sens courant du terme, mais pas encore dictatorial : il évolue. Dormez bien.
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