Ikea : surveillance des salariés, des policiers impliqués


Des flics soudoyés pour aider l’entreprise à espionner et fouiller la vie privée de ses salariés


Ce lundi 22 mars, des anciens dirigeants de la filiale française d’Ikéa étaient jugés pour avoir mis en place un système de surveillance de leurs salariés. Leur procès va durer jusque début avril. C’est en 2012 que l’affaire est révélée, par le Canard Enchaîné et Médiapart, qui ébranlent le géant d’ameublement.

Il s’agit là d’une affaire incroyable. Plusieurs centaines de personnes, salarié.e.s et candidat.e.s à l’embauche, ont été espionnées. La filiale payait des sociétés d’investigation privées pour faire ce travail de collecte d’informations personnelles. Les recherches portaient aussi bien sur les comptes bancaires, sur le train de vie, sur les antécédents judiciaires que sur le passé de proches de salarié.e.s et de candidat.e.s à l’embauche ! Ikéa France parvient ainsi à accéder à des fichiers administratifs et judiciaires, sans y être habilité. Et ce, avec la complicité de policiers.

Il faut croire que tout cela n’était pas suffisant, puisque la société va jusqu’à faire appel à deux « consultantes de terrain », c’est-à-dire des infiltrées, pour surveiller des salariés syndiqués à FO ! Des pratiques de barbouzes pour tenter d’empêcher que les salarié.e.s revendiquent leurs droits.

Dans le même temps, elle remerciait les policiers en leur offrant des bons d’achat. On se croirait dans un véritable film d’espionnage et de corruption.

Cette affaire n’est, malheureusement, pas la seule de ce type, même si elle impressionne par la durée des faits (on suppose au moins 10 ans mais le procès qui s’est ouvert ne couvre pas toutes ces années). L’entreprise Castorama s’est aussi retrouvée dans le viseur lorsque le directeur du magasin d’Antibes a été condamné pour avoir fouillé dans les antécédents judiciaires de certains agents de sécurité.

En 2014, c’est la Halle aux Chaussures qui est condamnée par le tribunal des Prud’hommes pour avoir licencié un salarié parce que l’entreprise estimait qu’il prenait trop de pauses…elle l’avait « su » en surveillant le scanner que le salarié portait sur lui : si le scanner, prévu pour scanner des codes, était inactif, cela voulait dire que le salarié prenait des « pauses sauvages » !

Les employeurs jouent avec la loi. Sans même parler des dispositifs de surveillance qui ne sont pas déclarés, les directeurs de magasins utilisent parfois « de façon abusive » des systèmes de surveillance tout à fait légaux en soi. Par exemple, dans de très nombreuses grandes surfaces, des caméras sont postées au-dessus des caisses. Les chefs ne sont pas censés les utiliser pour surveiller en permanence leurs employé.e.s. Mais il est difficile de savoir ce qu’il en est réellement…

En réalité, ce que révèle ce type d’affaire, c’est tout simplement que les outils de surveillance ne devraient pas exister. Les employeurs d’Ikéa ont finalement fait comme la police : ils ont fouillé la vie des gens. La police est-elle plus légitime à le faire ? Certainement pas. L’existence même des fichiers de police doit être remise en cause. Ils portent en eux le germe de la dérivation vers une surveillance généralisée, tout comme les caméras de vidéo-surveillance.

Sur cette affaire qui implique Ikéa France, la connivence entre des policiers et des patrons est tout à fait révélatrice du problème politique que posent les outils de surveillance

.La crise sanitaire constitue le prétexte rêvé pour renforcer la surveillance. On se souvient des drones utilisés par la police pour procéder à des contrôles de personnes soupçonnées de braver le confinement. Dans le cadre du travail, le développement du télétravail a permis d’introduire des logiciels qui, par exemple, suivent la souris à distance voire prennent des captures d’écran pour vérifier si le/la salarié.e visé.e est assidu.e. Il est à craindre que les entreprises usent de l’argument de la pression économique, de la nécessité de la reprise, pour mettre en place des dispositifs de surveillance pour augmenter la productivité de ses salarié.e.s.


Que ce soit dans la rue ou au travail, commandé par la police ou par les patrons, ne nous laissons pas surveiller !


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