En Tunisie : un jeune homme mort après l’utilisation massive de gaz lacrymogène


Affrontements à Sfax. Des grenades françaises utilisées. Plusieurs cas d’asphyxie par lacrymogène recensés.


La région de Sfax en Tunisie connait un mouvement de protestation contre la réouverture d’une décharge d’ordure. Dans la ville d’Agareb, les forces de l’ordre ont tiré une très grande quantité de grenades lacrymogènes sur les manifestants. Un jeune homme, Abderazzek Lachheb, est décédé, asphyxié par les gaz selon les manifestants. Comme en France, le ministère de l’Intérieur a préféré indiquer que le défunt «souffrait de problèmes respiratoires et a nié dans un communiqué toute responsabilité dans la mort de la victime».

Pour le pouvoir, le jeune homme est «décédé à la suite d’un malaise». Sa famille contredit cette version et assure que leur proche était «en bonne santé» et «se trouvait parmi les protestataires au moment des faits». Sa sœur a déclaré qu’«il avait été visé à trois reprises par du gaz lacrymogène et qu’il y a des témoins oculaires. Les policiers l’ont suivi jusqu’à l’hôpital». Plusieurs témoignages rapportent que des tirs de grenades ont eu lieu jusque devant l’hôpital.

Le 10 novembre, la ville d’Agareb était en grève générale à l’appel du grand syndicat tunisien l’UGTT. Le même jour, l’hôpital de la ville expliquait avoir reçu 17 cas d’asphyxie – qui n’ont heureusement pas provoqué de décès – par lacrymogène, à la suite de nouveaux affrontements. Un commissariat a été saccagé et l’armée déployée dans la zone.

Quelles sont les munitions utilisées ? Les protestataires montrent deux types de grenades. D’abord celles de l’entreprise française Alsetex, les mêmes qui sont utilisées contre les cortèges en France. Il s’agit de la boite qui fabrique la plupart des munitions explosives et lacrymogènes, mais aussi les balles en caoutchouc des LBD. Les photos montrent aussi des grenades de la marque espagnole Falken, qui appartient aussi au groupe Français Lacroix, propriétaire d’Alsetex. Il s’agit donc d’une répression made in France.

Pour rappel, le gaz lacrymogène n’est pas «non létal». Cette substance chimique n’est pas anodine. Durant la vague d’insurrections qui s’est emparée du monde arabe en 2011, les policiers du Bahreïn, un petit royaume du Golfe, ont asphyxié des dizaines de manifestants en tirant des grenades lacrymogènes françaises directement dans leurs domiciles. 43 personnes sont décédées des suites de leur exposition au gaz lacrymogène, dont un jeune garçon de 8 ans et un vieillard de 87 ans.

À l’automne 2014, au Burkina Faso, une série d’émeutes chassent le chef d’État Blaise Compaoré, qui s’accroche au pouvoir. Il y a plusieurs morts et des blessés. Les manifestants dénoncent les tirs de grenades lacrymogènes françaises.

Les munitions fabriquées par la France sont exportées dans le monde entier, et ont été récemment utilisées au Liban. Quand il ne tue pas, les effets du gaz lacrymogène sont inconnus, car les autorités entretiennent l’opacité. Plusieurs rapports indépendants évoquent des risques pour les femmes : douleurs, règles abondantes, et même enfants morts-nés.

Un rapport de la société de toxicologie-chimie de juin 2020 explique que les molécules «CS» présentes dans le gaz lacrymogène peuvent se métaboliser, une fois absorbées par le corps humain, en deux molécules de cyanure, toxique.


Emmanuel Macron a fait tirer plusieurs dizaines de milliers de grenades lacrymogènes sur la population durant son mandat.


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