Les cheminots anglais annulent leur grève suite à la mort de la reine
L’Angleterre était, pour la première fois depuis très longtemps, traversée par de forts conflits sociaux. Plusieurs grèves importantes ont eu lieu durant l’été dans des secteurs stratégiques comme les transports, les ports ou la Poste. Des centaines de milliers d’anglais appellent à ne plus payer les factures d’énergie. Des journées de mobilisations syndicales devaient avoir lieu ces prochains jours et effrayaient déjà le gouvernement.
Mais il a suffi qu’une tête couronnée s’éteigne à l’âge vénérable de 96 ans pour tout arrêter. Oui, la mort de la reine d’Angleterre a provoqué l’annulation des mobilisations. Les grèves à la Royal Mail et celles des chemins de fer prévues à la mi-septembre ont été annulées par les directions syndicales, par «respect» pour la famille royale. Le syndicat des cheminots communique qu’il «se joint à toute la nation pour rendre hommage à la reine Elizabeth. Le mouvement de grève ferroviaire prévu les 15 et 17 septembre est suspendu. Nous exprimons nos plus sincères condoléances à sa famille, à ses amis et au pays». Il n’est pas seul : le syndicat Unite envoie également ses «pensées» à la famille royale. Et la plus grande confédération syndicale du pays apporte ses condoléances et annonce le report de leur congrès en signe de «respect». Kamoulox.
C’est une trahison pure et simple du mouvement social, mais aussi un hommage à une figure de la noblesse, ennemie héréditaire des luttes ouvrières. Dans sa bigoterie monarchique, le Royaume-Uni organise un deuil de 10 jours, jusqu’à l’enterrement de la reine. Toutes les revendications sur l’inflation, les salaires, le prix de l’énergie sont mises en sourdine. Un présentateur de la BBC résumait la joie de la classe dominante hier, en déclarant à l’antenne que la crise du prix de l’énergie était «évidemment insignifiante maintenant […] face à la gravité de la situation [de l’état de santé de la Reine». L’Unité nationale pour tuer les luttes.
Elizabeth II n’était pas juste un reste folklorique et rigolo des vieilles dynasties, ni même un aspirateur à argent public – la famille royale coûte 100 millions d’euros par an aux contribuables anglais. En tant que représentante de l’un des plus grands empires du monde, elle a accompagné pendant 70 ans la répression coloniale, de l’Irlande au Kenya.
Les médias français, qui sont les équivalents contemporains des bouffons et des valets des Cours d’Ancien Régime regardent avec gourmandise l’Angleterre. Ils s’aplatissent déjà devant un président, mais les couronnes pleines de diamants et les aventures de la famille royale les font saliver. Les rejetons Windsor remplissent la presse people française, comme si cela nous faisait rêver. Les JT tentent de nous attendrir sur la dynastie anglaise comme s’il s’agissait d’une actualité décisive.
Encore plus ridicule, des figures de la gauche française pleurent pour la Reine nonagénaire. La sociale-démocrate Sandrine Rousseau écrit qu’Elizabeth II «a marqué notre époque» et insiste : «elle fut une figure féminine qui a accompagné les moments les plus forts de la seconde moitié du XXe siècle», avant de louer son «talent» et son «sens politique».
Quant au mangeur de saucisse Fabien Roussel il écrit, ému : «On a vécu avec elle». Le communiste copain de Darmanin poursuit : «on éprouve une tristesse sincère». Notre tristesse sincère va plutôt aux millions de victimes du capitalisme et du colonialisme britannique.
En France, la Convention Nationale a voté la décapitation du Roi Louis XVI en 1792. Les têtes couronnées de toute l’Europe ont tremblé. En 2022, une partie de la gauche marche dans les pas des contre-révolutionnaires et des royalistes.