Il y a 6 ans : Jérôme Laronze, paysan abattu par les gendarmes

Jérôme Laronze au pas sur son cheval

C’était il y a 6 ans jour pour jour, le 20 mai 2017 en Saône-et-Loire. Jérôme Laronze, paysan de 37 ans, somnole dans sa voiture. Il fuit les autorités depuis plusieurs jours. Les gendarmes le considèrent comme «dangereux», après des contrôles administratifs dans sa ferme qui se sont mal passés. Ce jour-là, Jérôme est réveillé par le bruit des gendarmes, démarre. Les militaires tirent. 6 balles. Il est tué : 3 balles sur le côté, deux balles dans le dos. Les gendarmes parlent de «légitime défense». À l’époque, cet homicide commis par les forces de l’ordre trouve très peu d’écho. Cette affaire scandaleuse est, aujourd’hui encore, trop méconnue.

Qu’est-ce qui a mené à cet engrenage mortel ? La détresse d’un homme engagé à la Confédération Paysanne, traqué par les services administratifs et en difficulté personnelle. Des contrôles répétitifs dans une ferme, notamment une descente qui a provoqué une panique dans le cheptel, tuant plusieurs vaches qui se sont écrasées les unes sur les autres. Un paysan non conventionnel et engagé, qui résistait aux injonctions des autorités. Et surtout, des agents à qui l’État a donné un permis de tuer.

Dans les semaines qui précédaient, Jérôme Laronze avait écrit à la presse locale, écrit un manifeste, effectué des recours. Il avait même eu des pensées suicidaires, comme beaucoup d’autres paysans. Mais les services de l’État n’ont pas relâché leur étau et continuaient à menacer le paysan de détruire le travail d’une vie. Il était donc en «cavale» pour quelques jours, dormant dans sa voiture au milieu de la campagne. Rien ne justifiait de le tuer.

En 2020, le tribunal administratif de Dijon finit par déclarer «irréguliers et nuls» trois contrôles réalisés sur la ferme de Jérôme Laronze. Ces inspections ont porté atteinte au domicile de l’éleveur ainsi qu’à ses droits fondamentaux estime la justice. Tout ça pour rien. Mais Jérôme Laronze ne l’a jamais su, puisqu’il est décédé bien avant cette décision.

Dans le chemin où ont eu lieu les tirs mortels du 20 mai 2017, deux douilles seulement ont été retrouvées, sur 6 balles qui ont atteint le véhicule. Les tireurs ont donc maquillé les preuves. De plus, le paysan a été laissé sans secours alors qu’il agonisait. Les deux gendarmes n’ont pas apporté les premiers soins à la victime, ni leurs collègues arrivés sur place par la suite. Il est déclaré mort par le SAMU une heure plus tard.

6 ans après, une centaine de personnes s’est rassemblée devant le palais de justice de Chalon-sur-Saône pour honorer la mémoire de Jérôme Laronze. La famille attend toujours que la justice avance. «Cela fait six ans, il n’y a toujours pas de procès. On attend la justice. Un homme est mort, on lui a tiré dans le dos. Un procès public est incontournable, il y a suffisamment d’éléments alors pourquoi attendre six ans ?» rappelle la sœur du défunt, elle-même avocate.

Pour comprendre la détresse du monde paysan et l’engrenage qui a conduit à la mort de Jérôme Laronze, un documentaire vient de sortir sur Arte.

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Une réflexion au sujet de « Il y a 6 ans : Jérôme Laronze, paysan abattu par les gendarmes »

  1. Je viens de visionner le documentaire « Sacrifice Paysan » . Bien qu’ancienne éleveuse, je n’avais pas connaissance de ce drame.. je suis troublée de voir que 40ans après mes constatations sur la lourdeur administrative de la PAC.. et autres tracasseries administratives… qu’un paysan puisse tomber sous les balles de gendarmes commandités par l’aveugle administration agricole. Ce film est très bien documenté et exemplaire.
    Retirer la garde d’animaux à un éleveur… je tombe des nues… pour des problèmes de boucles et de déclaration de naissance… Où est l’Humain dans tout ça?

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