Guerre psychologique sur les réseaux sociaux


Utilisation “d’influenceurs” et censure de contenus pour endiguer les émeutes


La responsable de Snapchat devant les parlementaires

La contre-insurrection est une méthode de répression théorisée par l’État français depuis la Guerre d’Algérie. Cette doctrine politique et militaire vise à obtenir le soutien de la population dans le cadre d’un conflit entre les autorités et leurs adversaires. La guerre contre-insurrectionnelle repose sur deux principes : frapper le plus violemment possible les opposant-es et, en parallèle, les isoler en menant des actions de propagande pour obtenir l’adhésion des habitant-es. Cette guerre dans les esprits est autant, voire plus importante que la guerre sur le terrain militaire. Il s’agit «d’opérations psychologiques», ou «psy-op». Cette doctrine a été utilisée lors des guerres coloniales et anti-communistes, puis exportée dans de nombreux régimes autoritaires. Elle est désormais appliquée partout.

Récemment, nous avons vu des manifestant-es et même des passant-es plongé-es dans le coma après des tirs policiers, deux tués en quelques jours par la police, des unités anti-terroristes envoyées dans les rues, des centaines de peines de prison ferme. Voilà pour la répression violente, militaire.

Nous avons aussi vu tous les grands médias mainstream, à l’unisson, salir les révoltes, mentir avec acharnement, diffuser en boucle la parole policière. Voilà pour la propagande. Mais cela ne suffit pas : il y a désormais les réseaux sociaux, qui jouent un rôle d’influence de plus en plus important.

Le gouvernement français tente donc de censurer et contraindre les réseaux sociaux. Il a convoqué à l’Assemblée Nationale les responsables de différentes plate-formes en ligne. Notamment le réseau Snapchat, qui permet de diffuser en temps réel de courtes vidéos, très utilisé par la jeunesse de banlieue.

Ce lundi 10 juillet Sarah Bouchahoua, responsable des affaires publiques Snapchat France, intervenait devant des parlementaires. Elle déclarait à propos de la révolte suite à la mort de Nahel :

«Plusieurs de nos créateurs de contenus ont pris la parole afin de sensibiliser leurs audiences et appeler au calme».

«Nous avons travaillé conjointement avec le ministère de l’Intérieur et les différentes autorités pour endiguer le plus rapidement possible les dérapages».

«L’ensemble des story qui étaient publiés sur la map [une carte de France répertoriant les vidéo selon leur lieu de tournage] étaient des utilisateurs de Snapchart qui se plaignaient des émeutes».

«Nous sommes fiers d’avoir pu collaborer entre le privé et le public».

Utilisation d’influenceurs rémunérés pour endiguer la révolte, censure des images d’affrontements, mise en avant systématique de vidéos critiquant les émeutes. Il s’agit typiquement d’une manipulation organisée : une «psy-op» contre-insurrectionnelle. L’étau se resserre.


L’intervention en vidéo : https://twitter.com/i/status/1678659834286157825


AJOUT : Nous apprenons par Olivier Tesquet sur Twitter que Sarah Bouchahoua, désormais cadre de Snapchat, était l’ancienne collaboratrice de Laëtitia Avia, députée LREM. Une belle collaboration public-privé qui ressemble comme deux gouttes d’eau à du pantouflage.

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3 réflexions au sujet de « Guerre psychologique sur les réseaux sociaux »

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