Le Livret A aux mains d’une clique de braqueurs va-t-en-guerre


Deux annonces simultanées : l’épargne française aux mains d’un pouvoir militariste


L’argent des plus pauvres perd de la valeur

Le 13 juillet, Bruno Le Maire annonce le blocage du taux d’intérêt du Livret A à 3% pour les 18 prochains mois. Le Livret A, c’est le moyen le plus simple (et gratuit) de mettre de côté un peu d’argent afin d’anticiper de grosses dépenses (achat de voiture, travaux dans son logement, etc). C’est un peu comme le bas de laine de nos grand-mères, sauf que celui-ci apporte un taux d’intérêt permettant de compenser l’inflation et éviter de trop perdre en pouvoir d’achat.

En théorie, le taux du Livret A doit donc accompagner l’inflation : son rendement augmente avec les prix selon un mode de calcul complexe. Il aurait dû être revalorisé à 4,1% en ce début d’été, mais Bruno Le Maire en a décidé autrement pour limiter le “coût du crédit pour les PME […] et le logement social”. Mais le journal libéral Les Échos ne s’y trompe pas en titrant son article “Livret A : avec le gel du taux, les banques remportent une victoire”. Bruno Le Maire, lorsqu’il ne parle pas de renflements bruns dans ses bouquins médiocres, est un larbin du système bancaire. Et payer des taux d’intérêt aux épargnant-es, les banques n’aiment pas ça.

Car si le Livret A n’est plus assez rémunérateur pour protéger l’épargne des français-es, où placer l’argent qu’on a mis de côté ? Dans des fonds plus rémunérateurs, plus alléchants, mais aussi plus risqués : dans des placements boursiers notamment. En gros, pendant que les plus modestes vont voir leurs économies diminuer, les plus riches vont pouvoir spéculer tranquillement grâce au dynamisme de PME (qui peuvent emprunter à des taux avantageux avec la mesure de Le Maire) qui vont porter les grosses sociétés boursières. Le mécanisme est clair : il vise à maintenir encore un peu plus longtemps un système à bout de souffle, qui explosera bientôt, celui du capitalisme financier.

L’armée financée au détriment du logement social et de la transition écologique

La deuxième annonce, passée plus inaperçue et pourtant très symbolique, nous vient de la loi de programmation militaire 2024-2030. Dès l’année prochaine l’argent déposé sur les Livrets A pourra permettre de financer des entreprises d’armement, alors qu’il était jusqu’ici réservé au financement du logement social (construction ou rénovation) ainsi qu’à la transition énergétique. Thomas Gassilloud, président de la commission défense à l’Assemblée nationale, explique à Europe 1 que “Le but c’est de donner une impulsion au secteur bancaire pour les pousser à s’intéresser au financement des entreprises de défense. C’est un secteur qui a parfois mauvaise presse, c’est plus facile de financer des panneaux solaires que des chars par exemple. Pour autant, l’un et l’autre sont des conditions de la durabilité de notre société”.

“La durabilité de notre société”, c’est donc de fabriquer des armes de guerre dont 80% sont exportées vers l’étranger. La France est en effet déjà le troisième exportateur d’armes au monde, cette industrie est florissante, mais les va-t-en-guerre n’en ont jamais assez. Sur fond de guerre en Ukraine, de discours militaristes, d’endoctrinement de la jeunesse et de répression des quartiers populaires, le timing est idéal pour ponctionner l’épargne des français-es et financer les armes qui nous tuent ou nous mutilent. La France entre dans un état de guerre permanent, c’est “durable”.

La création d’un livret spécial défense a même été validée par le Sénat, sur une idée d’un sénateur LR et d’un autre du PS. Pascal Allizard, socialiste en carton mais vrai militariste, voit même dans la création de ce “livret d’épargne souveraineté” une dimension “pédagogique et même patriotique” selon la chaîne Public Sénat. Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, accueille l’idée avec bienveillance car “on ne peut pas aider des entreprises qui seraient en lien avec des armes, je cite, de destruction massive”.

Les pauvres entreprises qui sèment la mort à travers le monde ont du mal à emprunter, heureusement que le pouvoir veille à ponctionner dans le logement social et la transition écologique pour les aider à exporter encore plus d’armes pour la grandeur de la France.

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