Contre le capitalisme : la nature se défend

Des câbles de fibre optique coupés au milieu de la nuit, mardi dernier à 1h du matin. Les raccords sectionnés permettaient la diffusion des épreuves des Jeux Olympiques dans une fan zone au Château de Vincennes. Dans un contexte de surveillance totale, le site était protégé par un dispositif de surveillance et aucune alarme ne s’était déclenchée. Les enquêteurs étaient sur les dents : qui pouvaient être ces saboteurs hors-pairs ? Encore un coup de la fameuse ultra-gauche qui arrête les trains ? Mais par quel prodige ?

Les câbles avaient été réparés le matin même… mais ils avaient de nouveau été abîmés à plusieurs endroits dès les nuit suivante ! De quoi donner des insomnies à la police. En parallèle, la chaîne RMC évoquait «des actes de sabotage».

France Info révèle ce dimanche 4 août que l’enquête est classée sans suite : c’est une fouine qui grignotait les fils. Imparable et indétectable. On espère que le petit mammifère nocturne ne sera pas rattrapée par des humains hostiles et pourra continuer ses facéties sans indigestion.

Ce n’est pas la première fois que la nature joue des tours au capitalisme. Par exemple dans l’un des plus prestigieux quartiers privés de Buenos Aires, la capitale de l’Argentine. Pour entrer dans cette zone privée nommée Nordelta, il faut être invité, passer des contrôles de sécurité, traverser des murs et des barbelés. À l’intérieur, les riches vivent dans des résidences de luxe, avec des bureaux, un centre commercial, des lacs artificiels et entourés de terrains de golf. Cet enclos de privilégiés a été construit sur une zone humide il y a 20 ans. En septembre 2021, des centaines de capybaras ont envahi la zone, détruisant les parterres de fleurs, déféquant dans les jardins et causant des accidents de la route.

Le capybara est un animal typique de l’Amérique du Sud qui peut peser plus de 50 kilos pour 1 mètre de longueur : c’est le plus gros rongeur du monde, qui fait penser à nos ragondins européens. Il ne s’agit pas d’une invasion mais d’une reconquête. Les capybaras sont également populaires chez les pauvres de la capitale argentine : la construction de projets immobiliers haut de gamme sur les zones humides de Buenos Aires empêchent les sols d’absorber les pluies intenses et provoquent des inondations dans les quartiers voisins. Une revanche écologique et sociale.

En Europe, régulièrement, des sangliers dévastent des terrains de golf. Par exemple au Pays-Basque, où «au moins six sangliers» sont entrés sur les greens du golf d’Ilbarritz en août 2021, puis rebelote en septembre sur un golf 18 trous de Vieille-Toulouse, dans l’Ain en aout 2023 ou en Sologne en mars dernier. Les propriétaires parlent d’organiser des battues, de mettre en place des ultrasons et même des clôtures électriques. En plus d’être un sport réservé aux bourgeois, le golf est une aberration écologique, ultra-gourmand en eau. Courage aux cochons sauvages.

Il arrive même que la nature sabote la surveillance. Les goélands sont la première menace pour les drones policiers, notamment à Paris. Le journal Le Monde expliquait en 2019 qu’aucun des «quinze multicoptères» n’avait encore été détruit, mais que les flics chargés de télépiloter «ont dû procéder à quelques replis stratégiques et atterrissages d’urgence pour échapper à la vindicte des goélands». Depuis, à Paris comme à Rennes, les drones sont chahutés par ces oiseaux et doivent parfois arrêter de surveiller les manifestations.

D’autres attaques, par des corneilles cette fois, avaient été recensées durant les manifestations de Gilets Jaunes. Autre exemple en Autriche, un particulier utilisait un drone dans le Tyrol. Un aigle royal avait fondu sur la proie mécanique et l’avait emmenée entre ses serres, jusqu’à son nid. En revanche, l’armée a tenté de dresser des aigles pour «intercepter des drones non identifiés», sans succès pour l’instant. Les aigles seraient «trop désobéissants» et le dressage trop coûteux.


Fouines, capybaras, sangliers et goélands : la faune sauvage est l’adversaire le plus ingénieux des infrastructures du capitalisme triomphant et de la domestication de l’espace.


Faire un don à Contre Attaque pour financer nos articles en accès libre.

Pour ne rien manquer de nos publications, suivez-nous sur nos réseaux



Laisser un commentaire