C’est une autre fake news caractérisée, qui a été diffusée par tous les grands médias nationaux, et qui a contribuer à renforcer le climat réactionnaire et sécuritaire en France. Décryptage.
Le Figaro, grand quotidien de droite, lance en premier l’offensive dans un article paru le 17 août : «les propriétaires de piscines ont de quoi avoir des sueurs froides […] Chaque été, des individus n’hésitent pas à squatter des piscines […]. Le squat peut durer le temps d’une simple baignade mais il peut virer au cauchemar pour la copropriété. C’est arrivé à Toulouse où un individu s’est blessé gravement après avoir squatté une piscine. Aujourd’hui, il est tétraplégique et a attaqué en justice la copropriété…pour négligence.»
Le média Marie France titre que «les propriétaires sont sommés de verser une somme folle» à l’homme qui s’est blessé dans leur piscine. L’info a de quoi scandaliser les braves gens : non seulement leur bien peut être squatté, mais en plus il faudrait indemniser les envahisseurs ! On n’est plus chez nous mon bon monsieur ! Sauf que Marie France ne dit rien de la prétendue «somme folle» dans son article. C’est normal, la somme n’existe pas.
BFM embraye, et consacre plusieurs sujets à l’affaire. Ils ont été discrètement supprimé sur internet depuis, mais les titres apparaissent encore sur les moteurs de recherche. Le 20 août, TF1 aussi s’empare de ce prétendu scandale, et son éditorialiste de droite Alba Ventura s’étrangle : «Cette façon de tout judiciariser comme aux États-Unis, c’est détestable.»
Dans la foulée, les sites d’extrême droite comme Fdesouche montent l’histoire en épingle. C’est une aubaine pour alimenter le discours ambiant contre les prétendus squatteurs, forcément étrangers, qui auraient tous les droits. Une pétition lancée sur le site «mes opinions» et intitulé «pour que les squatteurs de piscines soient pénalement responsables» récolte près de 6000 signatures en deux jours. Le tollé est national, unanime.
Au sein de toutes ces rédactions, absolument personne n’est allé vérifier la véracité des faits, ni même interroger le blessé. 0% de travail journalistique, 100% de propagande.
Finalement, c’est France 3, l’un des deniers média public à faire encore du journalisme et à avoir un ancrage local, qui fait le boulot. L’affaire remonte en fait à l’été 2022, et France 3 explique que «dans cette affaire aucune plainte n’est déposée». Les pauvres propriétaires obligés de payer pour le «squatteur» n’existent tout simplement pas. Quant aux faits eux mêmes : «un doute subsiste sur le statut de “squatteur”» explique France 3. En effet, le jeune homme devenu tétraplégique après un accident dans cette piscine est en fait une connaissance du gardien de la copropriété, qui l’avait invité à se baigner.
Alors d’où est partie l’intox ? L’avocat du blessé explique que, comme dans chaque accident, une procédure civile est engagée pour éventuellement indemniser la victime. Une procédure nécessaire pour faire marcher les assurances par exemple. Ce genre de procédure est engagée dans n’importe quel un accident de la route ou domestique, mais encore une fois, aucune plainte contre les propriétaires n’a été déposée, ce que confirme le parquet.
Si certains articles qui ont fait monter l’affaire ont été supprimés ou modifiés depuis l’enquête de France 3, bien peu de gens auront connaissance de ces démentis, et le mal est fait. L’intox est entrée dans les esprits. Ceci étant dit, on comprend mieux pourquoi l’extrême droite et les macronistes menacent France 3 : c’est l’un des derniers médias nationaux à ne pas se vautrer systématiquement dans les fake news réactionnaires.
Ce mensonge, en plus de manipuler l’opinion et de salir un jeune homme dont la vie a été détruite par un triste accident, n’est pas isolée. Comme nous l’expliquions il y a quelques jours, une autre intox massive contre «les squatteurs» a été diffusée au même moment. Le quotidien La Dépêche avait publié le 17 août un article qui fait grand bruit, titré : «Elle expulse ses squatteurs, fait disparaître tous leurs effets personnels et risque désormais la prison». En fait, il n’y a jamais eu de «squatteurs» dans cette maison, mais une famille de locataires avec deux enfants, qui louaient ce bien à une propriétaire qui vit la plupart du temps hors de France. En 2022, la famille a rencontré un différend avec la propriétaire, à propos du montant des loyers. Dans l’attente d’une décision judiciaire, la famille a continué à verser les loyers, mais auprès d’une banque qui les bloquait jusqu’au délibéré. Sauf que la propriétaire a débarqué en l’absence des habitants et a vidé illégalement la maison, et tout mis dans la rue, où l’intégralité des biens a été volée. Elle reconnaissait elle même : «J’étais excédée, ce que j’ai fait, c’est innommable, c’est vrai qu’ils n’ont absolument plus rien». Et cette dame ne risque pas pour autant “la prison” comme cela a été écrit. Une réalité très éloignée des titres de presse qui laissaient penser qu’une pauvre dame aurait été délogée de chez elle, et serait poursuivie pour s’être défendue.
Rappelons que les affaires de squats ne concernent que 0,005% des logements recensés dans ce pays, 170 affaires par an. Et jamais des logements principaux. L’habitant «chassé de chez lui» par des squatteurs après être parti en week-end, ça n’existe tout simplement pas.
En cette fin d’été, les médias de masse habituellement occupé à taper sur les musulmans ont donc temporairement lancé une salve de mensonges contre les «squatteurs». Une autre façon de renforcer les affects sécuritaires et la méfiance de tous contre tous plutôt que l’accueil et la solidarité.
Ces précisions peuvent paraître anodines, mais ces mensonges impriment un imaginaire, même inconscient. La population française est prise en otage par les médias des milliardaires, qui installent quotidiennement une ambiance toxique, empoisonnent les esprits avec des affaires montées de toutes pièces. Et pendant que la vindicte est instrumentalisée contre «les squatteurs», les immigrés, les pauvres, ou la gauche, le fascisme continue de progresser et les riches continuent de s’enrichir. Machiavélique, et efficace.
Une réflexion au sujet de « Médias des milliardaires : encore une intox stratosphérique »
Les torchons des milliardaires intoxiquent le peuple et sont tellement dégueulasses qu’ils craient des difficultés jusque dans l’allumage du barbecue.