Deux poids, deux mesures


Deux enseignantes se sont vues menacées de mort cette semaine. Il n’y en a pourtant qu’une seule qui intéresse la presse bourgeoise.


Une salle de classe aussi vide que la déontologie de BFM quand il s'agit de se jeter sur des menaces de mort pour alimenter le racisme ambiant

L’ennemi intérieur fait les gros titres

L’information a fait la Une de BFM ce vendredi 13 septembre : “Un lycéen interpelé pour avoir menacé de mort sa professeure sur Telegram”. Alors qu’il avait simulé un tir au pistolet en rendant un devoir, une enquête se met en marche et un service de renseignement tombe sur des menaces proclamées par l’adolescent sur la messagerie Telegram.

Immédiatement, l’élève est perquisitionné et la police découvre deux couteaux et un drapeau de Daesh chez lui. Il n’en faut pas plus pour que les flics alertent BFM, contre la volonté de l’enseignante, selon une source syndicale. Cette histoire, certes gravissime, est l’occasion rêvée d’alimenter l’image d’un ennemi intérieur toujours prêt à frapper. Christelle Morançais, la très à droite présidente de Région des Pays de la Loire y voit d’ailleurs “une preuve supplémentaire que le combat contre la menace islamiste doit demeurer total”.

Le rectorat avait pourtant bien réagi, pour une fois, en plaçant l’enseignante sous le régime de la “protection fonctionnelle”. L’adolescent, lui, est mis en examen pour menaces de mort et apologie du terrorisme. Il a été placé hors du département dans un foyer du Ministère de la Justice. Tout est fait pour éviter un nouveau Samuel Paty, tant mieux.

Le racisme passe inaperçu

Une autre histoire de menaces de mort reçues par une enseignante s’est déroulée cette même semaine, et presque personne n’en a parlé. On peut pourtant y ajouter des menaces de viol, ainsi que la récidive puisque c’est la deuxième lettre de ce type reçue en moins d’un an par cette professeure de Libourne, en Gironde. Une enveloppe déposée sous la porte de sa salle contenait des insultes racistes, la qualifiant notamment de “bougnoule” et appelant à “tuer les arabes du lycée”. En dehors de quelques brèves dans la presse locale du sud ouest, seul le média Brut consacre un reportage digne de ce nom à l’événement.

L’élève qui a déposé la première lettre appelait à saigner la prof “comme les cochons de son grand-père”. Il n’avait pas été retrouvé. Une nouvelle enquête a été ouverte cette semaine, mais n’a rien donné pour le moment. Pas de fuites policières discrètes, pas de gros titre dans les médias des milliardaires, pas d’emballement politique pour soutenir cette enseignante menacée parce que non blanche.


Dans les deux cas, il s’agit pourtant d’une forme de fascisme : terroriser une enseignante pour des motifs racistes ou soi-disant religieux. Mais il faut croire que pour menacer une prof, il vaut mieux être raciste que racisé… Et que les victimes du racisme ne comptent pas.

Les grandes chaines de télé ne parlent des profs en danger que quand ils peuvent caser les mots “Islam” ou “immigration”. Quant au mal-être général et grandissant au sein de l’Éducation Nationale, et au sentiment d’abandon du corps enseignant dû aux pressions hiérarchiques et au manque de moyens, on repassera pour qu’il fasse les gros titres.

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2 réflexions au sujet de « Deux poids, deux mesures »

  1. Ici, dans l’agglo de Nevers, un parent d’élève a appelé au lynchage (c’est le terme utilisé) d’un collègue sur FB. Aucune réaction du rectorat, car son nom n’était pas explicitement cité (juste identifiable du fait de l’établissement et de la matière). Mais le parent est un “bon blanc” …

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