La France en 2025 : chasse à l’homme raciste dans la Creuse


«La chasse au n**** est ouverte»


Manifestation contre le racisme dans un village de la Creuse après la chasse à l'homme négrophobe.

La banalisation de la parole raciste, l’application du programme du RN par le gouvernement, avec l’appui de milliardaires d’extrême droite qui contrôlent les médias : tout cela a des conséquences très concrètes et détruit des vies. Les violences racistes explosent en France dans une indifférence glaçante. Dernier exemple en date : une chasse à l’homme négrophobe organisée dans la Creuse.

Nous sommes le 15 août 2025, à Royère-de-Vassivière, localité de 500 habitant-es. Il est 1h30 du matin, une fête de village organisée dans la commune touché à sa fin lorsqu’un groupe d’une quinzaine d’individus commence à s’en prendre à un homme, seule personne noire présente, lui lançant des insultes raciste : «Sale Noir, tu n’as rien à faire ici».

Les amis du jeune homme, blancs, tentent de s’interposer, mais ceux-ci se font «tour à tour injurier, frapper, étrangler, pousser au sol» rapporte leur avocate. Une personne perd connaissance. Devant la violence de l’agression, ils tentent de quitter les lieux. C’est une chasse à l’homme raciste qui démarre alors. Les agresseurs avinés, dont un élu municipal et le président de la société de chasse locale, les prennent en chasse dans un pick up blanc en continuant à les insulter, hurlant «la chasse au n**** est ouverte» et «viens, on va te tuer sale noir». Les agresseurs parlent d’une simple bagarre entre personnes alcoolisées.

Cédric Lecomte, conseiller municipal de Royère-de-Vassivière, ment éhontément auprès de La Montagne : «Alors qu’on était en train de partir, on a vu un groupe d’une dizaine de jeunes qui squattaient, qui traînaient sur une table, et qui essayaient de piquer des gobelets. Ils ont commencé à nous jeter des bouteilles, et on ne s’est pas laissé faire. Ils sont partis en courant après. Mais oui, ça s’est engueulé, c’est sûr.» Ils ont été jusqu’à porter plainte pour diffamation contre les victimes.

Mais les 7 amis ayant subi l’agression qui ont porté plainte ont entre 6 et 15 jours d’ITT, preuve de la grande violence de l’attaque. Ils souffrent tous de syndrome de stress post traumatique. «Nous avons vécu un tabassage en bande organisée, sous fond d’injures à caractère racial et notre seule réponse était la fuite» explique l’un d’eux. Un autre explique être victime d’intimidations depuis l’agression. Tous vivent dans la peur des représailles. Une enquête a été ouverte pour violence en réunion en état d’ivresse et à caractère raciste, et pour injure publique et provocation à la violence et à la haine à caractère raciste.

En réaction à ce déchaînement de haine, un rassemblement de soutien était organisé le 25 août. 300 personnes se sont réunies avec une banderole sur laquelle on pouvait lire «Dans nos villages pas de racisme, pas de violences». Face à eux, un groupe de personnes soutenant les agresseurs, effectue des saluts nazis. L’un d’eux lance à l’avocate Me Colline Bouillon : «La prochaine fois on viendra avec les fusils et les cartouches». Les fascistes n’ont plus peur de rien. Quant au maire socialiste de la commune, il a lâchement refusé de s’exprimer prétextant qu’il s’agit d’une «affaire privée».

Les actes racistes se sont multipliés ces dernières années en France. Entre 2016 et 2024, les infractions à caractère raciste ont augmenté de 10% selon le rapport de la  la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH). Ce sont les hommes racisés de 25 à 54 ans et les ressortissants de pays d’Afrique qui sont surreprésentés parmi les victimes : 11% des agressions, alors qu’ils ne représentent que 4% de la population. En outre, ces chiffres ne représentent que les personnes ayant signalé les infractions. Or, une autre étude du Ministère de l’Intérieur intitulée «Vécu et ressenti en matière de sécurité (VRS)» met en lumière qu’au moins 1,2 million de personnes de plus de 14 ans se déclarent victimes d’atteintes à caractère raciste au moins une fois par an en 2022. Seules 3% portent plainte. Sur les 8282 affaires traitées par la justice en 2023, seules 1594 ont été suivies d’effet.

«Le taux de classement sans suite demeure très élevé, bien au-dessus du contentieux général» explique le rapport de la CNCDH de 2024. «Ce faible nombre des condamnations [nourrit] le sentiment d’impunité des auteurs, la défiance des minorités vis-à-vis des institutions comme leur sentiment d’insécurité.» Ainsi, les agressions racistes explosent, l’impunité perdure.

Derniers exemples marquants en date : Aboubakar Cissé, jeune homme de 22 ans, assassiné le 25 avril dans une mosquée par Olivier Hadzovic de 57 coups de couteau. Bruno Retailleau, pourtant fanatique ultra sécuritaire, n’avait pas modifié son agenda pour dénoncer ce crime odieux. Le RN, fidèle à lui-même, avait refusé de participer à la minute de silence organisée par la France insoumise. Et la procureure de Nimes, Cécile Gensac, expliquait que le criminel avait «agi dans un contexte isolé, sans revendication idéologique ou lien avec une organisation». Et d’ajouter que «l’insulte scellant le crime haineux n’est pas caractérisée». «Il est noir, je vais le faire» et «je l’ai fait, ton Allah de merde» : tels étaient pourtant les mots du meurtrier. On ne fait pas plus éloquent.

Autre crime raciste : dans la nuit du 31 mai au dimanche 1er juin dernier, à Puget-sur-Argens dans le Var, Christophe B. avait débarqué armé chez son voisin tunisien, Hichem, où avait lieu une soirée. Il avait assassiné cet homme et blessé par balles deux autres personnes. Dans ses vidéos de revendication, publiées avant et après son attentat, Christophe B. déclarait «qu’il [fallait] tuer les Arabes», «se révolter et tirer sur la population maghrébine».

Il assénait en vidéo : «Tenez-vous à carreau les bicots, car des mecs comme moi, il va y en avoir plein, plein, tenez-vous à carreau». Cette phrase montre bien qu’il s’agit de semer la terreur au sein des minorités vivant en France. Depuis des années, sur internet, Christophe B. affichait un soutien sans faille au RN. Sur Facebook, il appelait à «cartonner les sans-papiers» et affichait son soutien à Marine le Pen et Jordan Bardella.

Après la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024, alors que les plateaux télé annonçaient la victoire certaine du Rassemblement National aux élections législatives, les agressions racistes avaient explosé. Les fascistes se voyaient déjà au pouvoir et se déchaînaient. Dans l’indifférence générale.


Le salut ne viendra pas des autorités mais de l’autodéfense populaire


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