L’usine Alsetex, qui fabrique les grenades, dans la Sarthe, entourée par des Gilets Jaunes
L’action avait circulé partout en France depuis des semaines, à l’appel de nombreux blessés par la police et de collectifs. Finalement, ces deux jours de blocages de la plus grosse usine d’armes du maintien de l’ordre en France auront réuni trop peu de personnes.
Alsetex est pourtant une cible évidente et idéale pour les Gilets Jaunes et toutes celles et ceux qui luttent contre ce régime injuste. L’entreprise fabrique les munitions qui mutilent la population depuis des années : grenades mortelles contenant de la TNT, grenades de désencerclement qui projettent des plots mutilants, balles en caoutchouc, grenades lacrymogènes… Rien que ces derniers mois le bilan et effroyable : une femme tuée, 22 personnes éborgnées, des centaines gravement blessées au visage. Un bilan à mettre sur le compte d’Alsetex, qui engrange des millions d’euros en vendant son matériel au gouvernement. C’est une évidence partagée : le pouvoir se maintient grâce à une répression féroce. Et cette répression n’est possible que grâce aux usines d’armes. Comme Alsetex.
Vendredi 29 mars, une petite cinquantaine de personnes se retrouvent donc dans la Sarthe et longent l’usine d’armement. Malgré un petit dispositif de gendarmes et un hélicoptère, les participant-es, emmené-es par des personnes blessées lors de manifestations, peuvent atteindre sans grande difficulté le portail d’entrée pour y déployer une banderole. Rendez-vous le lendemain.
Samedi 30 mars, c’est sous un grand soleil qu’une soixantaine de personnes se retrouvent dans la commune de Louailles, qui borde l’usine. Pour le deuxième jour, la participation est en-dessous des attentes. Cette fois c’est à travers la forêt et des chemins en terre que le groupe réussit, sans peine, à atteindre les grilles de l’usine classée SEVESO. Deux motocross de gendarmes vont suivre le groupe jusqu’à l’entrée principale, à travers la campagne. Il aurait suffit d’un peu plus de monde pour que cette action soit une vraie réussite. Cette deuxième journée termine devant une ligne de gendarmes, à discuter avec des habitants, dans la bonne humeur.
Un autre blocage, organisé simultanément contre une usine de grenades lacrymogènes à Pont-de-Buis, dans le Finistère, aura réuni une petite centaine de personnes qui n’ont pas pu approcher du lieu.
Ailleurs en France, l’Acte 20 n’est pas sorti de la routine, avec les tensions et la répression désormais tristement habituelles. Le blocage des usines d’armement proposait une autre perspective. Moins dangereuse, plus efficace et spectaculaire pour les luttes en cours : mettre en lumière et dénoncer directement les infrastructures qui nous répriment. Au-delà des belles rencontres du week-end, on ne peut donc qu’être amer. Un appel vu par des centaines de milliers de personnes et relayé par plus de 6000 internautes a réuni moins de 100 personnes dans la réalité.
“Liker” ne suffit pas. Il aurait pourtant suffit de quelques centaines de manifestant-es seulement pour mettre en grande difficulté une infrastructure majeure du maintien de l’ordre français.
«Ce ne sont pas les raisons qui font les révolutions, ce sont les corps. Et les corps sont devant des écrans.»
Photos : Street Zad Action Medic