Nantes Révoltée et d’autres médias engagés censurés par Facebook


Ces derniers jours sur Facebook, aucune publication de notre média n’apparaissait auprès des utilisateurs : l’audience de Nantes Révoltée et d’autre médias engagés a été anéantie brutalement par Facebook. La censure a duré exactement une semaine.


Une illustration de l’opération : les statistiques indiquent que nos publications sont passées de plusieurs centaines de milliers de vues par jour à quelques centaines seulement, d’un coup. Une audience divisée par 1000 :

Nous republions ci dessous un article du 30 août qui détaillait nos explications.

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Depuis maintenant 7 années, Nantes Révoltée contribue, sur internet, à construire un autre récit, une autre parole dans le paysage médiatique. Nous sommes un média local et autonome, créé en 2012 pendant la campagne présidentielle. Depuis, nous couvrons inlassablement les manifestations, les occupations, les révoltes, de la ZAD aux ronds-points, des rues de Nantes aux Champs-Élysées. Nous documentons les violences policières et donnons la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Ces derniers mois, Nantes Révoltée a été au cœur de la révolte des Gilets Jaunes. La page a aussi été très suivie après la disparition de Steve, elle a révélé des vidéos déterminantes sur les agissements de la police à Nantes. Avec près de 110 000 abonnés, nous touchons en moyenne 1 à 2 millions de personnes par semaine. Nous avons publié des milliers d’articles, vidéos, montages, enquêtes et photos originales. La semaine dernière, la page Facebook est devenue invisible. L’audience du média a été, subitement, divisée par 1000, sans explication.

UNE CENSURE QUI NE DIT PAS SON NOM

Nantes Révoltée n’est pas seule : il semble que cette invisibilisation touche d’autres pages Facebook de médias indépendants : Lille Insurgée, Cerveaux non Disponibles, et bien d’autres. Un grand nombre de pages engagées sont concernées. C’est une censure qui ne dit pas son nom, une manœuvre sournoise. La page n’est pas supprimée, elle est «déréférencée» : elle n’apparaît plus sur les comptes de ses abonnés. C’est comme couper l’électricité d’un concert mais dire au chanteur qu’il peut continuer sans micro : il ne sera plus entendu que par le premier rang. Le concert ne sera pas pour autant interdit. La sournoiserie est la marque du régime en place.

POURQUOI ?

Nantes Révoltée a été plusieurs fois la cible de menaces. Des «raids» liés au gouvernement ou à l’extrême-droite signalant massivement la page, une plainte de la procureure de Nantes en 2015 pour avoir dénoncé l’impunité policière et même, pendant les Gilets Jaunes, la rumeur d’une dissolution par le Ministère de l’Intérieur. Mais jamais la page n’avait été invisibilisée de la sorte.

Alors, pourquoi aujourd’hui ? Est-ce une vengeance après la découverte d’une policière infiltrée au sommet du G7 ? Ou pour notre travail sur la disparition de Steve ? Impossible d’affirmer quoi que ce soit. Une chose est sûre : les grands médias ont prouvé leur servilité sans limite ces derniers mois, en relayant tous les éléments de langage du pouvoir. Les réseaux sociaux se sont imposés comme un outil déterminant dans les luttes en cours. Ils ont permis de faire exister la question des violences policières. Sans eux, les médias classiques auraient tout fait passer à la trappe. Il n’y aurait ni affaire Benalla, ni vrais récits de manif, ni images de la répression. C’est dans ce contexte de disparition des contre-pouvoirs que Facebook tente de faire taire les plateformes qui donnent d’autres informations. Pour asphyxier les rares contre-discours qui restent.

FACEBOOK EN FRANCE

En France, Facebook est dirigé par un certain Laurent Solly. C’est un cadre de la droite dure, proche de Nicolas Sarkozy, qui a été plusieurs fois préfet avant d’entrer dans le groupe Bouygues et de rejoindre TF1 où il est numéro 2. Chargé de la campagne présidentielle de Sarkozy en 2007, il avait déclaré : «La réalité n’a aucune importance, il n’y a que la perception qui compte».

En mai dernier, le patron de Facebook, Mark Zuckerberg, et le président, Emmanuel Macron, se rencontraient à l’Élysée pour discuter «des moyens de lutter contre les contenus haineux sur Internet». Autrement dit, le chef de l’État demandait une plus grande marge de manœuvre pour réprimer l’usage contestataire du réseau social. Peu après, Facebook s’engageait à délivrer systématiquement les adresses IP lorsque la justice française le lui demanderait : un sort qui était jusqu’alors réservé aux affaires de pédopornographie ou de terrorisme. Quelques jours plus tôt, on apprenait que l’Assemblée Nationale achevait l’examen d’une nouvelle proposition de loi «visant à lutter contre la haine sur internet».

QUE FAIRE ?

Il s’agit donc probablement d’une nouvelle offensive d’un pouvoir en difficulté contre tout ce qui pourrait s’opposer à lui. En ce qui concerne l’invisibilisation de notre page Facebook, des solutions existent. Nous publions depuis deux ans une revue sur papier, pour s’émanciper des grands groupes numériques. Elle est trouvable dans toutes les bonnes librairies et bars de Nantes et d’ailleurs. Nous sommes aussi présents sur Twitter, Youtube et Instagram.

Rien n’indique que cette page ne soit pas à nouveau «déréférencée» voire supprimée sur demande du pouvoir. Pour l’instant, vous pouvez cliquer sur «voir en premier» en vous abonnant à la page, vous recevrez ainsi toutes nos publications. Vous pouvez aussi partager nos articles, et nos revues.

Alors que les médias classiques n’ont jamais été autant à la botte du pouvoir et que les plateaux télés ne sont plus composés que de chroniqueurs allant de la droite extrême à l’extrême droite, quand ils ne sont pas directement issus de la police, la bulle d’oxygène que constituent encore les réseaux sociaux est ciblée par le régime de Macron.


Développons nos propres médias !


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