À lire : un livre de critique de la ville au service des riches


Parution d’un ouvrage sur la métropole, la gentrification et la répression urbaine


Le Jeudi 12 Septembre sort en librairie un excellent ouvrage signé Chroniques du Désert, intitulé Le Désert Urbain. Ce livre d’enquête politique regroupe des contributions sur les transformations urbaines à partir d’enquêtes menées à Nantes, Caen, Rennes, Dijon, la Banlieue Parisienne, Genève, Lausanne et Zurich, Lille.

Il s’accompagne d’un entretien avec La rue ou rien, d’une contribution sur la question des échelles dans la géographie radicale, d’une réédition d’un entretien avec Henri Lefebvre sur le terrorisme et la violence politique, d’un texte pour une politique de l’enquête, de nouvelles et de poésie.

Ce livre est vendu 14€ en librairie, pour 300 pages accompagnées d’un travail photographique réalisé avec Christophe Halais.


Extrait de la partie sur Nantes : «Nantes est, peut-être avec Paris, la seule ville de France où j’ai l’impression que peut m’arriver quelque chose». André Breton, 1928. Les grues et les chantiers constellent la ville. Des bâtiments neufs à l’architecture uniforme et fonctionnelle sont érigés. Des squares sont remplacés par des surfaces commerciales, la marchandise colonise le territoire. Des caméras de surveillance sont installés par dizaines dans les rues. Nantes change. L’histoire de la ville se lit comme un palimpseste.

Capitale du duché de Bretagne jusqu’au XVIe siècle, grand port colonial enrichi sur le commerce esclavagiste deux siècles plus tard, centre industriel et naval au XIXe, et ville de conflits, agitée par les remous sociaux et syndicaux de notre époque. Nantes entend aujourd’hui incarner un modèle de métropole contemporaine. « Compétitive », «attractive», « verte » et « connectée ». Jadis admirée par les surréalistes comme un lieu de possibles, la ville se transforme en désert urbain contemporain. Bastion du Parti Socialiste depuis près de 30 ans, Nantes s’est considérablement transformée, tant sur le plan morphologique que sociologique. Elle est devenue un véritable laboratoire des politiques urbaines du socialisme municipal.

En octobre 1986, le dernier navire construit à Nantes, Le Bougainville, est mis à flot. Une foule de spectateurs se presse sur le quai de la Fosse pour ce dernier lancement, les télévisions locales filment les ouvriers en pleurs. Une page de deux siècles d’histoire portuaire et ouvrière de Nantes se tourne. Les Chantiers Navals de Nantes, qui employaient des milliers de travailleurs au cœur de la ville et incarnaient sa dimension maritime ferment leurs portes. La «forteresse ouvrière » disparaît, malgré plusieurs années de conflits sociaux. C’est une étape décisive et symbolique de la désindustrialisation de Nantes.

Cette fermeture, qui laisse une grande partie de l’île de Nantes en friches, en accompagne d’autres, notamment celle des célèbres biscuiteries Lefèvre Utile, ou encore de la Manufacture des Tabac. La main d’œuvre ouvrière qui vit et travaille dans la ville est progressivement évincée, par ce processus de désindustrialisation et par la logique de gentrification qui lui succédera à partir des années 1990. » La population des anciens quartiers populaires est progressivement remplacée par des catégories socio-professionnelles plus aisées.


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