La chasse à courre, une tradition élitiste et violente
Un lieutenant-colonel de gendarmerie participait à la chasse
La chasse à courre est une tradition héritée du Moyen-Age. Un groupe de cavaliers traquent un animal sauvage dans la nature, avec une meute de chiens. Les aboiements, la course dans la forêt, les chevaux, la bête en fuite, paniquée. Le bruit des cors qui résonnent : les participants soufflent dans des trompettes de chasse, pour exciter les chiens. Jusqu’à l’épuisement de l’animal. Pourchassé, le gibier finit par abandonner, écrasé par la fatigue et la peur. C’est l’hallali : la meute saute sur la proie, déchire ses chairs. La bête, agonisante, est achevée avec une pique, ou plus rarement un fusil. Puis c’est la curée, on dépèce et éviscère l’animal encore tiède pour en donner aux chiens.
Cette chasse est de tradition aristocratique. Elle était pratiquée par la Noblesse, et reste réservée à un public riche : elle nécessite une meute de chiens dressés, des montures, et des outils spécifiques. Comme sous l’Ancien Régime, les chasseurs et leurs meutes traversent les champs, les propriétés, allant parfois traquer un animal jusque devant des maisons particulières, comme des seigneurs sur leur domaine.
En 2017, la vidéo d’un cerf, épuisé et allongé, froidement abattu dans le jardin d’une maison privée avait choqué sur la barbarie réservée à l’animal. Une plainte déposée a depuis été classée sans suite….
Samedi 16 novembre, dans l’Aisne, une chasse à courre est organisée, pour la Saint-Hubert, jour de la fête la chasse. Une cérémonie religieuse a lieu, avec une messe le matin pour bénir les chiens de chasse. À 12h30, la chasse démarre, l’équipage va au nord de la forêt de Retz pour y traquer le chevreuil, qu’il était d’ailleurs prévu de noyer à la fin de la chasse, pour ajouter au sadisme. À 13h30, au même endroit, une jeune femme enceinte, Élisa, partie se promener, est tuée par une meute de chiens.
Son mari raconte : «elle m’a envoyé un message en me disant qu’elle était inquiète et qu’il y avait beaucoup de chiens». À sa recherche, il dit avoir aperçu le véhicule de sa compagne, «puis croisé des chiens de chasse avec un cavalier». Le chien de sa compagne le prévient «en aboyant». «Quand je vais pour regarder dans le précipice, je vois une trentaine de chiens arriver sur moi donc je m’écarte». Il s’approche. «J’ai vu le ventre de ma femme car elle a été déshabillée entièrement». Élisa est décédé suite aux morsures de plusieurs chiens, notamment à la tête. Un drame effroyable. On apprendra un peu plus tard qu’un lieutenant-colonel de gendarmerie faisait partie de l’équipage de cette chasse. Cette implication plus que gênante conduit la justice à confier l’enquête à un service qui n’est pas sous l’autorité du gendarme.
Si l’enquête confirme qu’Élisa a été tuée par une meute de chiens de chasse, ce drame terrible sera aussi un symbole. Le symbole d’hommes riches, dont un gendarme, pratiquant un loisir sanglant, hérité de l’aristocratie, qui détruisent la vie d’une jeune femme enceinte partie se promener en forêt.
Quelles que soient les conclusions de cette enquête, cette mort tragique ne peut pas rester impunie.
LA CHASSE : UN «SPORT» MEURTRIER, UN LOBBY PROCHE DU POUVOIR
Pour rappel, la chasse est un loisir extrêmement meurtrier. Outre les dizaines de millions d’animaux tués chaque année en France, il y a aussi des dizaines de personnes blessées et des tuées accidentellement par des chasseurs. Par exemple, samedi dernier, un cueilleur de champignon était abattu par un chasseur en Charente Maritime. La semaine d’avant, deux autres promeneuses sont mortes dans le Poitou. En 20 ans, 410 personnes ont été tuées lors de parties de chasse, et plus de 2500 blessées. À titre de comparaison, les attentats terroristes ont fait un peu moins de 300 victimes.
C’est aussi un loisir très polluant. 30 à 40.000 tonnes de plomb polluent l’écosystème en Europe, issu pour l’immense majorité des cartouches de fusils de chasse. Une pollution de masse, majoritairement concentrée en France, où l’on compte un million de détenteurs d’un permis de chasse.
Macron est un proche de Willy Schraen, patron de la Fédération nationale de la chasse. Ils ont même passé un accord au début du mouvement des Gilets Jaunes. La fédération a appelé à boycotter le mouvement des ronds-points. En échange, le gouvernement fait de gros cadeaux aux chasseurs. Aux Élections Européennes, la Fédération appellera à voter En Marche. Deux ans plus tôt, Schraen avait déjà été reçu en grandes pompes au château de Chambord par le Président en personne. Macron est plus conciliant avec les chasseurs qu’avec les écologistes !