CRS jeteur de pavé : diversion médiatique et vraie impunité


Le parquet demande 3 mois de sursis pour un simple «jet réflexe»


Des centaines de milliers de grenades lacrymogènes tirées. Des milliers de balles en caoutchouc, de grenades explosives. Des éclats de métal ou de caoutchouc innombrables. Des plaies dans des centaines de visages. Des chairs lacérées. Des mains arrachées. Des yeux crevés. Du sang, des os fracturés. Des vies brisées.

Depuis un an, c’est un gigantesque déluge répressif qui s’abat sur le mouvement des Gilets Jaunes. Depuis un an, des milliers de personnes ont été marquées dans leurs corps par la répression d’État. Près de 300 enquêtes dorment dans les tiroirs de la «police des polices».

Pourtant, c’est une affaire qui paraît presque anodine qui passe en procès jeudi 21 novembre. Le 1er mai dernier, un policier en tenue de maintien de l’ordre, jetait de toutes ses forces un gros pavé dans une foule compacte. Évidemment, l’affaire est grave. Choquante. Mais en France, comparé aux centaines de mutilations, aux morts, elle paraît presque dérisoire. D’ailleurs, à ce jour, aucun blessé par ce jet de
pavé ne s’est manifesté. Ce qui est jugé, c’est donc l’usage d’une arme «non réglementaire».

Il est évident que si ce CRS avait lancé une grenade explosive à la place d’un pavé, il n’aurait jamais eu de procès.

À l’audience, les magistrats, les policiers, les avocats, trouvent tous des circonstances atténuantes au CRS. On décrit longuement les conditions «difficiles», les prétendues «pluies de projectiles» sur la police, la chaleur. Bref, tout est fait pour contextualiser l’acte du CRS, pour le rendre «compréhensible».

À la barre, le CRS vante «l’esprit d’équipe» de sa compagnie. Il voulait s’engager dans l’armée avant d’entrer dans la police. Il décrit les «black blocs» comme des adeptes du «chaos, qui sont contre l’État, le gouvernement et les institutions».

Pour expliquer son geste, il raconte : «notre capitaine est blessé. Nous, on est en tension car ça bouge de partout. Ça fait 6 heures qu’on est là. On n’a pas le temps de descendre en pression». Il a jeté ce pavé pour «se faire une distance de sécurité avec les manifestants».

Notez l’argument.

Imaginez un manifestant justifier un jet de pavé au tribunal parce qu’il est «en tension» et qu’il veut «une distance de sécurité» avec la police.

La procureur prend la parole. Elle ne veut pas faire du CRS «un exemple ou une victime expiatoire», ce n’est pas «le procès de la police». Elle dit «entendre et comprendre» ce «geste de réflexe».

Elle demande 3 mois de prison avec sursis. Pourtant les faits sont établis. Filmés. Prouvés. Reconnus par le CRS. Un jet de pavé sur des personnes bien moins protégées que les CRS peut tuer. Et pourtant, c’est une très légère peine qui est demandée. L’avocat du CRS réclame «la relaxe et sans mention sur le casier judiciaire». La décision sera rendue le 19 décembre prochain.

Ce procès est donc une double arnaque.

D’abord parce qu’il s’agit d’une mise en scène : on juge un CRS filmé en train de jeter un caillou, comme pour montrer qu’il s’agit d’un «dérapage» isolé, alors que les milliers de policiers qui ont tiré des grenades, des balles en caoutchouc et tabassé des gens à coups de matraques ne sont pas inquiétés. Derrière ce procès médiatique, on couvre les violences quotidiennes de la police.

C’est aussi une arnaque parce que la peine demandée est dérisoire. Et que celle qui sera prononcée dans un mois sera probablement inexistante, ou presque. Des milliers de personnes ont subi de longues gardes à vue sur de simples présomptions. D’autres ont été jetées en prison, en comparution immédiate, pour des «violences» non prouvées et bien moins graves que l’agression commise par ce CRS assermenté. C’est donc, à nouveau, la consécration d’une impunité policière.

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