Djihadisme, fascisme, répression : spirale infernale


Engrenage mortel : quand le pouvoir appuie certaines filières djihadistes dans le monde, et stigmatise les musulmans en France


L’horreur absolue à Nice, encore. Une femme d’environ 70 ans, venue prier jeudi matin, égorgée dans une église par un fanatique. Le sacristain et une autre fidèle assassinés également. Existe-t-il un acte plus lâche et plus ignoble que le meurtre barbare d’une dame âgée dans un lieu de culte ? Au même moment, à Avignon, un homme portant une veste du groupuscule néo-fasciste «Génération identitaire» armé et proférant des menaces est abattu. Les deux faces d’une même pièce. Dans la foulée, le gouvernement place la France en «alerte attentat», ajoutant donc à «l’état d’urgence sanitaire» une autre mesure d’exception. Verrouillant encore plus le pays, dans une ambiance de terreur et de dictature.

Il y a seulement deux semaines, c’était un professeur, Samuel Paty, qui était décapité en pleine rue par un islamiste. En deux semaines, quelles ont été les réponses du gouvernement ? Une surenchère raciste dans les médias. La dissolution d’associations musulmanes, notamment de charité. Des insultes et des calomnies à l’égard de la gauche, des universités, ou de personnalités non-blanches. Le licenciement du chef de «l’observatoire de la laïcité». Et le matin, le midi et le soir, l’extrême droite sur les plateaux télé. Ce jeudi, c’était même un célèbre néo-nazi de Nice, Philippe Vardon, qui s’exprimait en direct sur BFM TV pour commenter l’actualité. L’engrenage espéré par les fanatiques. La spirale fasciste.

Pourtant, depuis 40 ans, la France et les puissances occidentales soutiennent différents réseaux djihadistes. À la fin des années 1970, les USA vont appuyer les mouvances islamistes en Afghanistan, pour affaiblir le bloc soviétique, sur fond de guerre froide. La CIA collabore alors avec des services saoudiens et pakistanais, et permettent l’ascension d’une figure méconnue à l’époque : Oussama Ben Laden, chargé de recruter des volontaires djihadistes. Les médias français et des figures telles que BHL appellent à donner des armes à la guérilla. Le conflit va effectivement précipiter la chute de l’URSS : objectif atteint pour le bloc occidental. Mais en dix ans 35.000 djihadistes issus de 43 pays auront participé à cette guerre, et vont essaimer partout.

Dans les années 1990, l’occident favorise les forces réactionnaires en Bosnie, et appuie financièrement et militairement des filières islamistes. Au Kosovo, la milice de l’UÇK est formée par les services français, milice elle-même liée à Ben Laden, et impliquée dans des massacres et des crimes de guerre. En quelques années, le Kosovo deviendra le bastion du djihadisme en Europe. Sur fond de démantèlement de l’ex-bloc de l’Est, les USA vont aussi soutenir les groupes islamistes en Tchécthénie, pays aujourd’hui dirigé par un autocrate d’extrême droite musulman : Kadyrov. Pendant la guerre en Syrie, la France va appuyer certains groupes djihadistes, notamment le «Front Al Nosra». Le Guardian explique dès 2012 que «pour partie, l’argent français est tombé entre les mains de groupes islamistes qui étaient à court de munitions». Sans parler des accords entre l’entreprise française Lafarge et le groupe DAESH. Avec les conséquences que l’on sait.

Sur le plan économique, la France va renforcer ses liens avec les dictatures du Golfe, notamment avec l’Arabie saoudite qui devient le premier client de la France en termes de contrats militaires et le premier fournisseur de pétrole. Macron signe en 2017 un contrat de 11 milliards d’euros de ventes d’armes avec le Qatar. Ces pétromonarchies sont précisément les premières responsables de la diffusion de l’idéologie djihadiste fondamentaliste dans le monde, y compris par des appuis financiers. La dissonance cognitive est totale : le gouvernement qui réprime les musulmans qui vivent en France au nom de la «laïcité» fait des courbettes aux leaders mondiaux de l’islamisme.

En bout de chaîne de ces «stratégies» géopolitiques et de ces nébuleuses fanatiques, les populations paient le prix du sang. Attentats atroces, conflits confessionnels, stigmatisations et répressions. Chaque engrenage activant les autres, dans une spirale mortifère. Les autorités françaises ont donc à la fois porté appui à certaines forces du djihad mondial tout en s’en prenant aux musulmans qui vivent sur son sol. C’est exactement l’inverse qu’il aurait fallu faire : éliminer les filières obscurantistes et couper les ponts avec les dictatures religieuses qui les financent d’un côté, et protéger toutes les minorités de ce pays, qui subissent des discriminations de l’autre. L’État français a créé les conditions du pire. Celles d’une guerre confessionnelle, d’un retour du fascisme et de la barbarie. Leurs guerres, nos morts.


Cet article reprend largement l’excellent travail d’Acta, à retrouver et à partager en entier ici : https://acta.zone/loccident-et-les-djihadistes/

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