L’administration pénitentiaire interdit la diffusion d’une revue dénonçant les violences pénitentiaires
L’Envolée est un journal de solidarité avec les prisonniers et prisonnières et leurs familles, un pont pour les détenus avec le milieu libre et un pourvoyeur d’expression sur les conditions carcérales. C’est un journal militant qui s’inscrit aussi dans les luttes sociales, dénonçant la prison comme un outil de maintien du contrôle social par l’État, et comme un moyen d’enfermer la misère et les fragilités mentales. L’Envolée anime également une émission de radio (hebdomadaire, disponible sur toutes les plateformes de podcast), relatant les actualités carcérales, donnant la parole aux détenus et à leur famille maintenant un lien entre l’intérieur et l’extérieur, rejoignant le principe de l’émission Nantaise “Casse-Muraille”.
Ce journal est distribué gratuitement aux abonnés dans les prisons françaises depuis 20 ans, permettant aux détenus une fenêtre vers l’extérieur et un rayon de solidarité.
Le 4 janvier dernier, la direction nationale de l’administration pénitentiaire a décidé d’interdire la diffusion de l’Envolée dans toutes les prisons de France suite à la parution du N°52. Une atteinte claire aux droits des détenus et surtout, à la liberté d’expression dont on ne manque pas en France de louer la nécessité, quand ça arrange le pouvoir…
Cette censure, est “justifiée” par l‘administration pénitentiaire pour “incitation à la haine envers le personnel pénitentiaire” suite à un article de l’Envolée relatant des morts suspectes au sein de plusieurs prisons. En effet, soulignons que l’espérance de vie en prison est plus basse que la population générale : outre les suicides, très nombreux (7 fois plus fréquents que dans la population générale !), certains détenus sans problèmes de santé connus sont retrouvés morts dans leurs cellules sans explications, poussant les familles à s’interroger légitimement. Car la violence de la part des surveillants est de mise en détention, les témoignages en ce sens ne manquent pas : insultes, coups, torture psychologiques, interdictions arbitraires de droits élémentaires… L’Envolée, dans son dernier numéro, a mis le doigt sur la problématique, avec les cas de plusieurs détenus.
Idir est mort au mitard de la prison de Lyon. Le mitard, c’est une pièce lugubre, une sorte de cachot grillagé où on enferme les détenus qui se sont un peu énervés. La prison dans la prison quoi. Idir devait être libéré dans les deux semaines suivantes, la famille ne croit donc pas un mot de l’explication avancée par l’administration pénitentiaire qui soutient qu’il se serait pendu. La version de violence par des surveillants est corroborée par d’autres prisonniers, la famille a appris notamment que Idir s’abreuvait avec l’eau des toilettes après que les surveillants lui aient coupé le robinet… Deux ans auparavant, c’est Jaouad qui était retrouvé mort dans une cellule du mitard : Ce sont là aussi les témoignages directs des voisins de cellules qui mettent en doute la version officielle, ceux-ci ayant dénoncé le maquillage d’un suicide par une équipe de surveillants particulièrement cruels surnommée “L’escadron de la mort”… L’Envolée cite aussi Taoufik, mort dans sa cellule de Perpignan. Ici, l’administration pénitentiaire avance une explication incroyable : Taoufik se serait étouffé…en mangeant. Sa famille n’a même pas été prévenue, c’est un détenu en permission qui leur apprendra la nouvelle plusieurs semaines plus tard. Inhumain.
Des reporters de Nantes Révoltée ayant déjà travaillé en prison témoignent : “Certains détenus décrivent des blessures causées par des surveillants et vous disent “de toute façon que voulez-vous qu’on fasse ? On aura toujours tort” ”. “Un jour, un surveillant de la prison m’a dit “ici, il y a des collègues qui font des choses aux détenus qui méritent davantage la prison que les détenus eux même… Mais rien n’est jamais fait, c’est tabou de critiquer les violences contre les détenus”” “Un jour, un détenu a été retrouvé mort, les médecins ont conclu à un arrêt cardiaque. Ses codétenus et les voisins de cellules ont témoignés toute la même version : il avait crié à l’aide toute la nuit parce qu’il ne se sentait pas bien, il faisait un malaise. Les surveillants dans le couloir l’ont entendu, ont rigolé, mais n’ont rien fait. Ils sont venus plus de 5h après, il était mort”.
L’administration pénitentiaire a donc placardé un avis de censure contre l’Envolée dans toutes les prisons et s’est même fendue d’une plainte pour “diffamation et injures”. Rien que ça… L’administration pénitentiaire ne veut pas reconnaître les morts en prison. La prison, ce lieu où sont invisibilisés les opprimés de cette société, qui peuvent mourir en silence.
Critiquer la prison, les atteintes aux droits dans les milieux de détention, dénoncer les morts suspectes : c’est donc cible de censure, de poursuites judiciaires et d’intimidation. Les murs et les barbelés cachent la violence pénitentiaire, l’Envolée l’expose au grand jour.
Justice pour Idir, Jaouad, Taoufik, Sambaly, Jules… et les autres !
Solidarité avec l’Envolée et tous les prisonnier.es !
Le communiqué de l’Envolée : Y a que la vérité qui blesse ! – L’envolée (lenvolee.net)
Le point de l’Envolée sur les violences pénitentiaires :
Dans l’angle mort des violences d’État : les violences pénitentiaires – L’envolée (lenvolee.net)
Notre article paru sur les violences en prison : https://www.nantes-revoltee.com/violences-carcerales-breves-prison/
Pétition pour demander la fermeture des mitards :
Pétition : Pétition pour radier les quartiers disciplinaires qui sont dévastateurs
Cagnotte de soutien pour Jimony, en état de mort cérébrale après avoir été passé à tabac par des surveillants de la prison de maux :
https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=2940962252857345&id=1746621668958082
Cagnotte de soutien à la famille de Idir :
https://www.cotizup.com/pour-idir-mederres