Un remake du dîner de cons
Pierre-Jean Chalençon, qui se pavanait dans la presse d’avoir accueilli des ministres dans son palais pour un restaurant clandestin, est tourmenté. Mais manifestement par tout autre chose que l’éventualité inexistante de poursuites : en sortant de garde-à-vue, P-J Chalençon déclarait récemment que la lutte des classes revient en 2021, et que c’est «terrible» et «très angoissant». Avant que cet équivalent de François Pignon (mais sans une once d’humanité) se mette ensuite à chouiner sur le fait qu’il est fauché, que son Palais Vivienne acheté à 6 millions d’euros est une charge pour lui, qu’il est interdit de travailler par l’État en raison des mesures sanitaires et qu’il ne reçoit pas d’aide. Ce fan de Napoléon empêtré dans le scandale des dîners clandestins à Paris axe sa défense sur des larmes de crocodile qui n’émeuvent personne. Ce pauvre homme qui, en 2020, se prenait en photo avec Dieudonné ou Florian Philippot au cours de l’anniversaire de Jean-Marie Le Pen… et qui larmoyait encore à la télé pour se justifier.
Son binôme Christophe Leroy, lui aussi mis en examen pour mise en danger de la vie d’autrui, est tout aussi arrogant dans sa défense, sans parler des justifications à apporter à propos de ses plats rebutants à 400 euros. Assumant avoir mis en place un «club privé» dans sa résidence depuis plusieurs mois, il estime qu’il n’y a rien de mal dans le fait de préparer à manger pour les personnes invitées et de vendre ses mets, puisque c’est son métier. Et que vendre des plats chez lui ne signifie pas que c’est un restaurant clandestin, puisque c’est chez lui. Le binôme infernal joue avec le feu : il assume contourner la loi en expliquant qu’il ne s’agit pas de restaurant clandestin, puisque les soirées se passent chez lui, dans son « club privé ». Certes, on ne peut qu’approuver le fait que ce qui se passe chez les gens concerne leur vie privée, sauf qu’en l’occurrence, l’entrée est payante, les convives sont des client.es et les plats sont vendus à plusieurs centaines d’euros. Mais ça n’a rien à voir avec un restaurant, vous dira-t-il. En outre, les employé.e.s ne sont manifestement pas déclaré.e.s ; l’un d’entre eux a même affirmé qu’ils touchaient le chômage partiel sans que les heures chez Chalençon et Leroy ne soient comptées.
Mais quand on insiste sur l’évidence de repas non autorisés à coups de champagne et de caviar à plusieurs centaines d’euros le repas, Christophe Leroy est un peu plus gêné et dit du bout des lèvres que c’était une erreur. Forcément, depuis que son nom est sorti dans les médias, il peut dire que c’était une erreur. La honte et la malhonnêteté n’ont pas de limite dans cette sphère ploutocrate.
Ainsi, Brice Hortefeux, qui compte aussi parmi les clients de dîners fastueux et les nombreux politiciens à surpasser leurs propres lois, déclarait quant à lui que “rien ne semblait illégal”. Rappelons qu’il a été ministre de l’Intérieur…
Cerise sur le gâteau à 120€ : Leroy annonçait ses menus avec les prix publiquement sur Instagram ! La police est d’ordinaire très prompte à scruter les réseaux sociaux pour surveiller les rassemblements qui pourraient se tenir et anticiper leur répression, voire réprimer à l’avance les personnes qui pourraient y participer. Mais visiblement la répression s’arrête là où commencent les privilèges.
Cette farce vient s’ajouter aux restaurants qui ont ouvert en secret pour accueillir policiers et magistrats ces dernières semaines. La liste est trop longue pour tous les compter. Combien d’autres affaires comme celle-ci ne seront jamais connues ?
Et lorsqu’ils font une garde-à-vue, c’est seulement lorsque l’affaire sort dans les médias et qu’il n’y a guère le choix que de faire semblant de mener une enquête. Les deux nantis lymphatiques, un temps retenus au commissariat, sont sortis sans encombre en quelques heures. La stratosphère sociale des gens fortunés ne font pas 48h. On se souvient de Sarkozy, autorisé à rentrer chez lui pendant ce qu’ils ont appelé une “garde à vue”.
Pendant que des teufeur-ses, des manifestant-es, des habitant-es des quartiers qui font un barbecue se voient infliger des amendes, des coups de matraque et de Taser, des gardes-à-vues, des instructions, des contrôles judiciaires, les riches se sentent tellement impunis qu’ils organisent des repas à plusieurs centaines d’euros dans des palais de luxe payés plusieurs millions d’euros, avec des employé-es même pas déclaré-es qui touchent le chômage partiel.
Ici, personne en “garde-à-vue”. Ils ne sont pas déférés au tribunal ou devant un juge d’instruction. C’est pour les teufeur-ses, les jeunes de quartiers, les militant-es. L’humiliation de la garde à vue, des cellules insalubres, de supplier pour aller aux toilettes, les perquisitions, se faire retourner son logement, saisir tout son matériel informatique… : seulement pour le reste de la société.
Même si le gouvernement se confond en communiqués pour tenter de faire croire qu’aucun membre de l’exécutif n’a participé à ces dîners, ce qui est hautement improbable, le scandale est là : des riches peuvent se faire des soirées luxueuses pendant que des jeunes qui font la fête se font briser. Justice de classe.
Mr Chalençon a peur de la lutte des classes. Il a peut-être bien raison. Cette affaire va-t-elle mettre le feu aux poudres ? Les Bourgeois l’auront cherché.
Peur de la lutte des classes ? Vous serez terrorisés par l’intersectionnalité !
Le Premier Mai pourrait être l’occasion de le prouver.
Mangeons les riches !