Gilets Jaunes : l’État verse 580.000 euros à des sociétés d’autoroutes


L’État condamné pour n’avoir pas empêché les ouvertures de péages d’autoroutes par les Gilets Jaunes


Opération "péage gratuit" : un type d'action qui s'est déroulé sur de nombreuses autoroutes pendant les Gilets Jaunes.

Elle est passée plutôt inaperçue : la décision judiciaire est tombée le 23 juin 2022. L’État français a été condamné à verser plus de 584.000 euros aux sociétés d’autoroute SAPN – Société des autoroutes de Paris-Normandie – et Sanef – Société des Autoroutes du Nord et de l’Est de la France – pour les «préjudices financiers subis lors des manifestations des Gilets Jaunes», entre novembre 2018 et juin 2019. Le tribunal administratif de Rouen a reconnu le «préjudice» par ces entreprises lors de la mobilisation.

Les magistrats ont enregistré «32 manifestations» ayant entraîné notamment «des opérations permettant aux usagers d’emprunter l’autoroute sans s’acquitter du péage». Des actions non-violentes durant lesquelles des manifestants lèvent les barrières de péages et laissent passer gratuitement les voitures. Un mode d’action courant dans les luttes sociales, et généralement populaire auprès de la population. Pour le tribunal «l’État est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis (…) par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens».


Cette décision judiciaire est triplement scandaleuse :


L’argent public est utilisé pour engraisser encore plus des sociétés privées d’autoroute. Pour rappel, la gestion des autoroutes en France est un racket capitaliste : le réseau routier était public avant d’être privatisé. Des entreprises font désormais d’énormes profits en taxant les automobilistes sur des routes construites par l’État et augmentent chaque année le prix des péages. Non seulement ces entreprises ne méritent pas un centime de plus, mais les routes devraient redevenir publiques et gratuites.

Cette décision va entraîner plus de répression. En effet, ce que dit ce jugement, c’est que l’État doit compenser les pertes des sociétés d’autoroute car il ne les a pas débloquées assez vite. Il est donc «responsable». La conséquence, c’est que des actions aussi banales que des opérations péages gratuits seront plus fortement réprimées, car l’État préférera empêcher ces actions par la force que devoir payer des amendes ensuite. Une criminalisation supplémentaire d’une pratique de lutte sympa.

Les mutilés, eux, attendent toujours réparation. Quasiment 4 ans après le début des Gilets Jaunes, des dizaines de mutilés et blessés par la police n’ont toujours eu aucune réparation, ni judiciaire, ni financière. Par exemple, le Fonds de garantie des actes de terrorisme et d’autres infractions – FGTI – chargé de verser une somme aux victimes d’un préjudice, quel qu’il soit, refuse presque systématiquement d’indemniser les Gilets Jaunes blessés. En 2020, l’avocat Arié Alimi s’agaçait que la FGTI «s’oppose à tout» en ce qui concerne les Gilets Jaunes. Quant à une éventuelle condamnation des policiers tireurs et de l’État, n’en parlons même pas ! Au mieux, il faudra encore attendre des années avant d’éventuels procès.


Les sociétés d’autoroute qui ont perdu un peu de profit obtiennent plus vite satisfaction que des personnes touchées dans leur chair par la violence d’État…


Source : https://www.capital.fr/economie-politique/letat-condamne-a-verser-plus-de-580000-euros-aux-societes-dautoroute-sapn-et-sanef-1440115

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