Lyon : 3 personnes en cellule pour un collage «La police tue»


La liberté d’expression recule de jour en jour


En France, il y a deux catégories de personnes intouchables, sacrées : les Présidents de la République et les policiers. Les uns et les autres sont au dessus des lois et il est même interdit de les critiquer.

Exemple hier 6 septembre 2022 à Lyon. Alors que trois personnes collaient des affiches, vers 19h, une véritable armada de policiers a débarqué et encerclé les colleurs avant des les embarquer. Les images montrent une équipe de Brigade Anti Criminalité et des policiers en uniforme. Une débauche de moyens pour emmener les trois colleurs vers un commissariat. Le motif ? Les affiches comportaient le slogan «la police tue». Dans les heures qui suivent, des sites d’extrême droite, repris par des médias officiels, balançaient le nom et l’âge des interpellés et les qualifiaient de membres de «l’ultra gauche» qui seraient «fichés S». Cela signifie que les policiers ont livré en pâture les identités de personnes arrêtées, un viol flagrant du secret d’instruction. De son côté, le procureur veut des poursuites pour «outrage par apposition d’affiches». Vivement le procès ! Cette affaire intervient quelques jours avant la visite à Lyon du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Cette censure d’une expression anti-répression est monnaie courante. Lors de la Fête de l’Humanité de 2021, les spectateurs et spectatrices d’un concert avaient repris le slogan «tout le monde déteste la police». Chant de manif ultra-classique. Le ministre Darmanin a publiquement «condamné» les faits, emboîtant le pas des syndicats policiers. Le chef du PCF s’est empressé, à son tour, de «dénoncer» le cri anti-répression.

À Lyon, le même slogan avait été chanté lors d’un festival contre l’extrême droite organisé l’année dernière dans une salle de concert de la ville. Les syndicats policiers ont obtenu l’arrêt des subventions de la salle de concert. Juillet 2021, les syndicats policiers montaient au créneau contre des affiche parodiques collées à Nantes. En septembre 2021, une marque de jus de fruits voulait commercialiser en France des smoothies baptisés «rentrée 2021», reprenant les codes de graffitis lycéens : «fuck le système», «file moi ton 06», ou encore «ACAB». Un marketing adolescent insupportable pour le syndicat d’extrême droite Alliance, qui a obtenu une condamnation au sommet de l’État, des reportages sur les grandes chaînes d’infos, et le smoothie retiré des rayons en un temps record. Du délire. Quelques mois plus tard, Alliance déposait plainte contre Philippe Poutou pour avoir dit «la police tue»… Et ce ne sont que quelques exemples parmi des dizaines d’autres d’arrestations, d’intimidations, de plaintes et de procès.

La police a déjà le monopole de la parole médiatique, mais cela ne suffit pas. Il faut aussi réduire au silence par tous les moyens toute expression critique, qu’il s’agisse de mots, de chansons ou d’affiches.

Même cas de figure pour Emmanuel Macron. Durant le confinement en 2020, des descentes de police avaient eu lieu dans le domicile de personne ayant affiché le slogan «Macronavirus» à leurs fenêtres. Il y a quelques jours l’Élysée obtenait la censure d’un article dans Le Monde et un chanteur était sanctionné pour avoir crié un slogan hostile au président lors d’un concert.

Revenons à l’affaire de Lyon. Des personnes sont donc enfermées et poursuivies pour avoir dit la vérité. En effet, la police vient de tuer la passagère d’un véhicule à Rennes et un conducteur à Nice. Cela monte le bilan à 10 morts par balles en 6 mois lors de «refus d’obtempérer». Ainsi, exprimer un simple fait, évident et vérifié, est dangereux. Ça n’est pas la Russie de Poutine mais la France de 2022.

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