Attentat raciste : les choix troublants des autorités françaises


Huis-clos, déresponsabilisation, changements, poursuites à minima…


Le 23 décembre William Mallet, 69 ans, commet une attaque armée contre le Centre Démocratique Kurde à Paris et plusieurs commerces, peu avant une réunion avec les cadres du mouvement. Le tueur revendique immédiatement la portée raciste de son acte.

Une responsable politique des femmes kurdes, qui a combattu Daesh en Syrie et a été blessée au combat, et qui venait de trouver refuge en France, est parmi les victimes. Elle aura bravé la mort au cœur d’une zone de guerre pour être assassinée à Paris. De même qu’un chanteur célèbre de la communauté kurde, qui avait été emprisonné en Turquie et qui était réfugié en France…

Le tueur avait déjà essayé de tuer des exilés en décembre 2021, attaquant des réfugiés soudanais à coups de sabre, trois jours après un grand meeting de campagne d’Eric Zemmour dans la capitale. Il avait aussi été condamné pour «violences avec armes» pour des actes commis en 2016. Pourtant, aucun média ne parle d’un acte politique, dont la portée est évidente.

De même, la justice refuse de parler d’attentat. Les services anti-terroristes ne sont pas saisis, alors qu’ils ont pu l’être récemment contre des écologistes. Cela ne permettra donc pas d’investigations poussées sur d’éventuelles complicités, sur la fourniture d’armes, sur les réseaux et les idées du tireur. C’est un «fou», un raciste isolé. Voilà la version officielle.

Tout semble fait pour déresponsabiliser le tueur. Les médias parlent d’un «conducteur de train retraité», d’un «suicidaire», d’un «déséquilibré» victime d’un «cambriolage». Jamais d’un individu d’extrême droite. On n’a jamais vu la presse prendre autant le parti d’un tueur en série. La garde à vue est levée une première fois au bout de 24h. Le tireur aurait avoué une «haine pathologique» des étrangers et a donc été transféré dans une unité psychiatrique. Il est finalement remis en garde à vue quelques heures après. Revirement.

Selon la version officielle, William Mallet voulait d’abord s’en prendre à des étrangers dans le centre de Saint-Denis, mais n’aurait trouvé aucune personne à tuer. Un vendredi matin, jour de marché. Il se serait donc replié vers la rue d’Enghien, dans le 10ème arrondissement, devant ce centre kurde, inconnu du grand public. Les enquêteurs ont-ils vérifié ce récit ?

Une perquisition menée au domicile des parents, où il logeait, n’a pas révélé selon la police de «lien avec une idéologie extrémiste». Les parents n’ont donc pas la télé ? Car on y entend des flots de propos d’extrême droite à longueur d’antenne.

Ce lundi, la justice ordonne le huis clos lors de l’audience qui concerne William Mallet. Alors qu’en France, la justice est rendue en public. Sauf cas et raisons exceptionnelles.

Ce soir, il est placé en détention provisoire dans le cadre d’une enquête «pour assassinats et tentative d’assassinats en raison de l’appartenance, vraie ou supposée, des victimes à une prétendue race, une ethnie, une nation ou une religion déterminée», ainsi que pour «détention illégale d’armes à feu». Aucune complicité n’est retenue, ni motif terroriste.

Déresponsabilisation du tueur, absence d’enquête sur les réseaux de ce raciste récidiviste, absence d’enquête sur la façon dont cet individu, pourtant connu, s’est procuré une arme, absence d’enquête sérieuse sur l’idéologie du tueur, tentative de psychiatrisation, puis volte-face, et enfin huis-clos.

Que cherchent à protéger les autorités ? L’extrême droite française et ses crimes ? Des puissances étrangères qui veulent s’en prendre à la diaspora Kurde ? Les organisations Kurdes ne veulent pas croire au hasard et dénoncent une attaque ciblée. Il y a 10 ans, un autre attentat commis contre des militantes kurdes à Paris n’avait jamais été élucidé et l’enquête avait été étouffée. L’attitude de la justice et son extrême opacité donnent, en tout cas, beaucoup de raisons de douter de la version officielle. Et donnent l’impression qu’il s’agit d’enterrer cette affaire gênante au plus vite, pour passer à autre chose.

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