Jusque là peu connus en métropole, les «Homes Indiens» ont été révélés au grand public il y a peu avec la parution du livre d’Hélène Ferrarini «Allons enfants de la Guyane».

Ces «Homes Indiens» ne sont autre que des pensionnats religieux dans lesquels sont envoyé-es les amérindien-nes de Guyane après avoir été arraché-es à leur famille. On y trouve aussi des descendants d’esclaves d’origine africaine. Les enfants y sont dépossédés de leur culture, de leur langue et de leurs croyances. Une évangélisation forcée, à la française.
Le premier pensionnat de ce type est créé dans les années 1930, avant même que la Guyane ne devienne un département français en 1946. S’ils sont gérés par des religieux-ses, c’est bien l’État Français qui les finance, malgré la loi de séparation de l’Église et de l’État de 1905 qui ne s’applique pas en Guyane. C’est la continuation des logiques coloniales : il faut assimiler de force les colonisé-es, effacer leurs identités.
Les témoignages, encore trop peu nombreux, ne permettent pas encore de se faire une idée précise du quotidien des enfants dans ces pensionnats. On peut cependant imaginer les répercussions sociales d’un tel traumatisme sur la population. On estime aujourd’hui que le taux de suicide des amérindien-nes de Guyane est 10 à 20 fois supérieur qu’en métropole.
Ce scandale rappelle celui des «enfants de la Creuse», ces jeunes de l’île de la Réunion, enlevé-es à leur famille, déclaré-es pupilles de l’État et envoyé-es de force en métropole pour réponde au «surpeuplement» de l’île de La Réunion. Là encore il s’agit d’enfants arrachés à leur famille par l’État français, dans sa toute-puissance, pour imposer son autorité. On pense aussi aux internats destinés à «assimiler» les enfants autochtones au Canada. Durant tout le XXème siècle, le «Département des Affaires Indiennes» encourage la création d’internats du même type que les «Homes indiens». Il s’agit de séparer les enfants autochtones de leurs familles, afin de «tuer l’indien dans l’enfant» et de les évangéliser de force. Les jeunes y subissaient des traitements violents, des sévices et parfois des viols. On estime que 150.000 enfants y ont été placés, et que plusieurs milliers y sont morts. Des restes de corps ont été retrouvés récemment près de ces pensionnats.
Si la majorité des «Homes indiens» de Guyane ont fermé dans les années 80, l’un d’entre eux est encore ouvert à Saint-Georges-de-l’Oyapock et accueille pas moins de 60 enfants. Leur village étant situé à 2 jours de pirogue, les enfants sont forcés de vivre dans ce pensionnat, éloignés de leur famille et soumis à l’autorité des religieux-ses.
Cette injustice rappelle qu’aujourd’hui encore, en Guyane comme ailleurs, l’histoire des peuples colonisés reste invisibilisée. Le débat devrait cependant permettre l’ouverture d’une Commission de vérité et de réconciliation afin d’accueillir la parole des victimes et de reconnaître leur traumatisme. Au travers de cette commission, les amérindiens de Guyane demandent la reconnaissance du préjudice causé par l’État aux enfants et à leurs familles.
Sources :
- Allons enfants de la Guyane. Eduquer, évangéliser, coloniser les Amérindiens dans la République, d’Hélène Ferrarini, préfacé par Alexis Tiouka, Anacharsis, «Les ethnographiques», 288 pages
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