Impunité : le Conseil d’État protège les pratiques illégales de la police

Des CRS armés et cagoulés posent devant leur camion : c'est la CRS 8, qui n'en a rien à foutre du Conseil d'État.

Le Conseil d’État, saisi en urgence, s’est prononcé sur la question du (non) port de RIO par la plupart des agents de police. Le 5 avril 2023, il a rendu sa décision : il refuse d’imposer cette obligation légale aux forces de l’ordre, alors que c’est, en principe, la règle. La police de ce pays est au-dessus de toutes les lois, et ce avec la complaisance des plus hauts fonctionnaires et des magistrats les plus hauts placés.

Le RIO est le matricule qui permet d’identifier les forces de l’ordre (tout en garantissant leur anonymat publiquement). Le port de ce RIO est obligatoire depuis 2014. L’arrêté du 24 décembre 2013 relatif aux conditions et aux modalités du port de ce numéro d’identification individuel précise ainsi que «Les agents qui exercent leurs missions en tenue d’uniforme doivent être porteurs, au cours de l’exécution de celles-ci, de leur numéro d’identification individuel» (article 2). L’article 4 de ce même texte rappelle que sont également soumis à cette obligation «Les personnels qui exercent leurs missions en tenue civile». Le RIO doit alors être apposé sur le brassard réglementaire. Si l’interprétation de certaines lois, parfois assez floues, peut faire l’objet de débat jurisprudentiel, ce texte législatif est quant à lui particulièrement clair : tout agent de police ou de gendarmerie, en uniforme ou en civil, doit être identifiable et doit présenter un numéro d’identification individuel.

Face aux violations récurrentes et même systématiques de cette obligation légale par des personnes dépositaires de l’autorité publique, des associations de défense des droits humains, de magistrats et d’avocats ont saisi le Conseil d’État par une procédure d’urgence appelée référé-liberté, demandant ainsi à la plus haute juridiction administrative d’exiger le respect de cette loi et d’imposer des mesures contraignantes à cet effet. Ces associations considèrent en effet que la violation de cette obligation porte atteinte de manière «grave et manifestement illégale» au droit de manifester, au droit de la presse et au droit de demander des comptes à l’administration. Elle participe également à entretenir et à favoriser l’impunité des forces de l’ordre dans leur usage excessif de la force.

La décision du Conseil d’État est claire et se range derrière les chiens du pouvoir : celui-ci refuse «d’imposer au ministère de l’Intérieur d’agir pour rendre effective l’obligation faite aux forces de l’ordre de porter leur matricule d’identification en intervention», tout en reconnaissant le non-respect à grande échelle de cette obligation. Dans cette même logique : le gouvernement a offert des cagoules aux forces de l’ordre, les nouvelles tenues et casques de CRS sont entièrement noires. Simultanément, tout est fait pour que les détenteurs de la violences d’État soient impossibles à identifier, alors que les simples manifestants sont filmés, fichés, marqués, et démasqués en permanence. C’est la logique même d’une dictature.

Dans un contexte de répression démesurée, où l’usage des armes de la police est sans limite, hors de tout cadre légal ; où la police, protégée par le gouvernement, bénéficie d’une impunité la plus totale ; et où les arrestations arbitraires se multiplient, le Conseil d’État cautionne les pratiques illégales de la police et protège ainsi les policiers qui commettent des exactions.

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