Museler la contestation : procès bâillon contre le média Révolution Permanente


Le média indépendant Révolution Permanente poursuivi en justice pour avoir publié le texte d’un ouvrier en lutte contre un plan de licenciement dans son entreprise


Fronton du Palais de Justice de Toulouse

Le 20 juin prochain, Révolution Permanente se voit convoqué en justice au Tribunal de Toulouse pour répondre de faits de «diffamation». L’accusation porte sur la publication du texte d’un ouvrier de l’aéronautique dans la Somme qui dénonçait un «plan social », le terme managérial pour qualifier un plan anti-social, «ayant abouti à des licenciements massifs : 719 emplois supprimés sur 1587, soit 45% des effectifs (…) Alors que 10 millions d’euros de dividendes ont été reversés aux actionnaires de AAA sur les 4 années précédentes». Des centaines d’emplois supprimés, de vies bouleversées, pendant que les actionnaires empochent des millions sur le dos des travailleur-ses. Une situation scandaleuse qui passe bien souvent hors des radars des grands médias et qui est, heureusement, traitée par la presse indépendante.

Révolution Permanente est une organisation révolutionnaire qui anime depuis 2015 un quotidien en ligne engagé, qui traite de l’actualité et notamment des luttes sociales nationales et internationales. Elle couvre notamment les conflits ouvriers en France. Dans le cadre de cette mobilisations, ce média avait dénoncé «l’hypocrisie du directeur général de AAA, élu LR», ainsi que la répression policière subie par les travailleur-ses, notamment pour dissoudre un piquet de grève en septembre 2020.

Révolution Permanente avait même diffusé des informations exclusives sur ce conflit social. Leur site avait publié le témoignage anonyme d’un ouvrier qui dénonçait «le rôle de certains délégués syndicaux dans les suppressions d’emplois et leurs collusions avec la direction». Il avait ainsi mis en lumière le «rôle de syndicalistes ayant signé le plan social avec la direction et la promotion dont bénéficie un délégué syndical CFE-CGC à la même période». Un syndicaliste jaune, qui aurait vendu ses propres collègues pour obtenir un avancement.

C’est ce texte qui vaut aujourd’hui un procès en diffamation. La plainte initiale émane d’un délégué syndical CFE-CGC, désormais au poste de directeur adjoint des opérations de l’entreprise aéronautique AAA.

Cette plainte est portée alors même que le tribunal administratif a invalidé en 2021 le «plan social» en raison d’irrégularités, annulant ainsi le programme de suppressions d’emplois porté par la direction. Visiblement, ce qui dérange est d’avoir révélé les dessous de table de ce plan de licenciement avec des syndicalistes peu scrupuleux. Et de donner la parole aux exploité-es en lutte.

C’est une nouvelle attaque envers la liberté de la presse que subit aujourd’hui Révolution Permanente, mais aussi une attaque contre toutes les travailleuses et travailleurs qui se battent pour le respect de leurs droits face au patronat méprisant. La justice aurait pu ne pas poursuivre, le droit de la presse étant censé garantir une large liberté d’expression. Mais en collaboration avec le patronat, des magistrats ont choisi de donner suite à cette plainte et de faire comparaître l’équipe du média dans le cadre de ce procès pour diffamation. On ne peut s’empêcher de noter la détermination et les moyens que la justice se donne pour poursuivre ce type d’infraction, celle-là même qui classe sans suite par milliers les plaintes pour violences sexuelles et sexistes ou pour violences policières sans aucun remord ! Les faits confirment chaque jour que la justice n’est qu’un bras répressif au service de l’État et du patronat.

Les procès en diffamation ou les menaces de dissolution contre les médias indépendants et engagés se multiplient ces dernières années, à l’image de la tentative de dissoudre Nantes Révoltée, des arrestations de journalistes, des procédures baillons… Alors que les monopoles médiatiques sont aux mains de milliardaires, la liberté de la presse pour les petits médias indépendants est chaque jour plus menacée. Soyons solidaires !

Face à ces intimidations, Révolution Permanente appelle à un rassemblement de soutien devant le tribunal de Toulouse le 20 juin à 13h.

Faire un don à Contre Attaque pour financer nos articles en accès libre.

Pour ne rien manquer de nos publications, suivez-nous sur nos réseaux