Violences d’extrême-droite à Angers : la police blesse gravement deux hommes au visage à coups de LBD

«Le 3 juillet à Angers, un homme de 32 ans a perdu l’usage d’un œil après avoir été touché par un tir de LBD, selon des éléments médicaux» écrit le quotidien Ouest-France ce lundi 17 juillet. En effet, après la mort de Nahel, la ville d’Angers avait été secouée par des agressions d’extrême-droite, suivie d’une féroce répression contre celles et ceux qui s’opposaient aux fascistes.

Reprenant le récit des autorités, Ouest-France parle d’affrontements entre des «identitaires» et «des manifestants d’extrême gauche, puis des groupes de jeunes parfois armés et le visage dissimulé», mettant dos à dos les nostalgiques du fascisme et la jeunesse anti-raciste. Le journal ajoute que «la police est intervenue pour s’interposer». Un récit mensonger : selon de nombreuses images et témoignages, la police a travaillé main dans la main avec l’extrême droite pour protéger un local situé en plein centre-ville, servant de base arrière aux violences racistes dans la ville depuis des années.

Groupe dissout

Le groupe fasciste l’Alvarium est créé en 2017 par Jean-Eudes Gannat, fils de notable et ancien candidat du Front national. Depuis ce local, des agressions racistes, hurlements fascistes et intimidations ont été organisées. Ses membres sont plusieurs fois condamnés pour des violences en bande. Des conférences d’extrême-droite y sont toujours organisées, alors que le groupe a été dissout en 2021. L’Alvarium a aussi attaqué la manifestation du 1er mai 2022 à Angers… Imagine-t-on un collectif militant ou musulman dissout par le gouvernement continuer d’avoir pignon sur rue ? Inimaginable. L’Alvarium bénéficie d’appuis institutionnels, et les événements dramatiques du lundi 3 juillet le démontrent.

Ce soir-là, la police tire sans sommation au LBD sur des jeunes à proximité du local d’extrême-droite. En quelques minutes, deux tirs frappent à hauteur de tête. L’œil d’un homme de 32 ans explose à l’impact de la munition. Un autre est très gravement blessé, avec d’importantes fractures au visage. Il a frôlé la mutilation. Les militants d’extrême-droite présents, eux, n’ont pas été inquiétés. Cette répression est d’une violence inédite à Angers. Elle frappe deux jeunes habitants de banlieue.

Nous avons contacté un militant des quartiers populaire d’Angers qui nous raconte ce qu’il s’est passé.

«Il fallait dire stop»

Le 30 juin, trois jours après la mort de Nahel à Nanterre, une première manifestation contre les violences policières a lieu à Angers. La police gaze le cortège. Des membres de l’Alvarium patrouillent armés dans la ville, à la recherche de militants de gauche et de «jeunes de banlieue». Le commando est armé de barres de fer et passe à tabac plusieurs personnes, sous l’œil médusé des passant-es et dans une impunité totale. La scène, filmée, fera le tour des réseaux sociaux.

D., militant de quartier, explique : on a entendu dire que l’extrême-droite voulait «descendre dans le quartier de la Roseraie, qui est un quartier militant», «on a créé un groupe de rue antiraciste» Samedi, il y a un «premier coup de pression». En effet, à Angers et dans plusieurs villes, les fascistes se sont organisées en milices pour commettre des violences contre les habitant-es de banlieue. «Tous les quartiers se sont mis ensemble, la Roseraie, Belle-Beille, Monplaisir, Savary ou Grand Pigeon… La mairie était trop complaisante avec l’extrême droite. Il fallait dire stop». Une première incursion a lieu, «le local était très protégé». D. ajoute : «on a vu une proximité évidente avec la police».

Du côté de l’extrême-droite, «les fachos de l’Alvarium ont fait venir des membres de toute la France et même d’Italie». En effet, devant le local angevin, des figures notoires du néo-nazisme français ont été repérées et filmées. Notamment des membres des Zouaves Paris, groupe lui aussi dissout pour sa violence.

Mutilations

Lundi 3 juillet, une nouvelle mobilisation se dirige vers le local situé dans le centre-ville. «Ce soir là, il y a eu deux tirs de LBD, les deux ont touché des visages». Les policiers tirent du gaz lacrymogène sans sommation et des balles en caoutchouc. «Les policiers ont protégé la rue du Cornet [où se trouve le local], ils ont tiré directement. Les deux blessés ont été emmenés à l’hôpital et ont été opérés mardi». L’intention de mutiler est évidente : un seul policier a été photographié avec un LBD dans la rue. Deux munitions ont été tirées. Toutes deux dans le visage.

Complicité

«Il y a une longue histoire d’amour entre les flics et les fachos» nous explique D. Cette coopération entre les autorités et l’extrême-droite angevine n’est pas nouvelle. Les jours précédents, les membres de l’Alvarium sont filmés en train de fumer des cigarettes avec des policiers devant leur local.

Le 1er juillet, les fascistes patrouillent devant leur local avec des barres de fer, ils jettent des bouteilles, exhibent des boucliers à croix celtique, sans jamais être inquiétés. Une vidéo est même diffusée sur leurs réseaux pour revendiquer les faits. Un riverain aurait entendu un agent de la BAC dire «on est ensemble» aux membres de l’Alvarium. Une proximité qui n’est guère étonnante, puisqu’à Lorient au même moment, une «milice anti-casseurs» composée d’individus cagoulés avait frappé des émeutiers supposés avant de les remettre à la police.

Le même week-end, les membres de l’Alvarium sont de nouveau repérés et filmés en train de sortir des casques et des boucliers en pleine journée. Comme s’ils étaient prévenus par la police. En effet, le lundi, la police fouille le local suite aux violences filmée trois jours plus tôt. Mais les lieux ont été «nettoyés» en amont.

Autre fait troublant, des observateurs ont repéré des «appels lumineux» à l’aide de torche ou de phare, de la part des policiers vers les militants d’extrême-droite, comme «pour dire aux fachos de rentrer dans leur local» en cas de danger.

Quoiqu’il en soit, deux jeunes hommes sont gravement blessés par la police, dont l’un a désormais sa vie bouleversée pour être passé par là. Il vient de porter plainte et compte aller «jusqu’au bout». Face à cette mobilisation anti-raciste venue des quartiers populaires, les autorités ont déchaîné une répression jamais vue dans la ville. D. espère que cette histoire permettra au moins de nouer des liens partout entre les habitant-es de cité et les réseaux antifascistes face à l’extrême droite.

Appel à témoins

Si vous avez des images ou des précisions sur les tirs policiers qui ont eu lieu rue du Cornet à Angers le 3 juillet, écrivez-nous. C’est crucial pour la procédure, cela pourrait grandement aider la victime.

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