Ces derniers mois la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, la députée Mathilde Panot, les écologistes ou encore le rappeur Médine sont accusés en permanence d’antisémitisme, sur la base d’éléments inexistants ou malhonnêtes.

Cette semaine, Le Figaro, le grand journal de la droite française, qui touche d’importantes subventions publiques, réhabilite une des plus grandes figures de l’antisémitisme de notre Histoire : Maurice Barrès.
Dans un article paru cette semaine, le député Les Républicains Jean-Louis Thiériot écrit un portrait amoureux de cet écrivain nationaliste et antisémite, présenté comme étant «du parti de la rêverie, de l’enthousiasme, de l’émotion» et comme un «dandy, esthète, passionné d’art, en lutte contre « les barbares »».
L’auteur ose même, à propos de Barrès : «si la distinction entre patriotisme – l’amour des siens – et nationalisme – la haine des autres – a un sens, elle s’applique bien à Barrès», alors même que celui-ci était un fervent raciste.
Pour rappel, Maurice Barrès, né en 1862 et mort en 1923, fut l’un des fondateurs d’une forme de fascisme français : dès la fin du 19ème siècle, il menait une campagne politique pour un «socialisme national». Barrès était évidemment dans le camp anti-Dreyfusard, contre ce militaire juif accusé à tort de «complot». Il écrivait : «Que Dreyfus est capable de trahir, je le conclus de sa race». La trahison dans les gênes, théorie justifiant ensuite le génocide. Un autre antisémite forcené de cette époque, Édouard Drumont, invite l’écrivain à arbitrer un concours «sur les moyens pratiques d’arriver à l’anéantissement de la puissance juive en France». Maurice Barrès accepte.
Barrès le nationaliste est xénophobe, obsédé par la «revanche» contre l’Allemagne. Il fait partie des personnalités qui endoctrinent les esprits avant la guerre qui éclate en 1914 et provoque des millions de morts. Pendant le conflit, Barrès est bien planqué à l’arrière, loin des bombes, mais il met toute son énergie dans la propagande de guerre, en exaltant les combats par de grands discours enflammés.
Barrès est aussi un ennemi de l’égalité sociale. Il écrit cette phrase, d’un cynisme absolu, que Macron pourrait bien faire sienne aujourd’hui : «Que les pauvres aient le sentiment de leur impuissance, voilà une condition première de la paix sociale». Mais cette réhabilitation s’inscrit dans un contexte plus vaste d’offensive réactionnaire visant à dédouaner les personnalités d’extrême droite et antisémites.
En 2021, Emmanuel Macron créait France Mémoire, une institution indépendante de l’État qui faisait suite à la délégation aux Commémorations nationales, jusqu’ici rattachées au ministère de la Culture. France Mémoire a immédiatement proposé de commémorer l’écrivain Maurice Barrès. Mais ce n’est pas le seul exemple.
Le 30 octobre 2019, Macron invitait dans son avion personnel des journalistes d’extrême droite. Il accordait à l’hebdomadaire Valeurs Actuelles une interview exclusive. Lors de la discussion, il se lâche complètement et sort des réflexions clairement Lepénistes.
Quelques jours plus tard, l’ancien dirigeant de l’Action Française Elie Hatem, nostalgique de Pétain et de la collaboration, adepte de Charles Maurras et de «l’antisémitisme d’État», était reçu à l’Élysée. Le militant pétainiste fait même un selfie avec le président et sa femme.
Le 11 février 2020 : Macron intervient devant les députés de son parti. Il utilise tout le lexique du Front National et reprend à son compte une théorie de Charles Maurras, militant royaliste et pétainiste et dirigeant de l’Action Française : la distinction entre «pays légal» et «pays réel». Une référence à peine voilée à l’extrême droite antisémite la plus réactionnaire.
En mai 2020, Macron appelle pendant 45 minutes le pétainiste Zemmour, auteur de multiples discours racistes et condamné pour «provocation à la haine raciale», pour le «soutenir» après qu’il ait été insulté dans la rue.
Durant la campagne présidentielle 2022, le Ministre de l’Intérieur trouve Marine Le Pen «un peu molle» vis-à-vis des musulmans, et après les législatives le Ministre de la Justice de Macron appelle à «avancer ensemble» avec le Rassemblement National.
En novembre 2022, le ministre de l’Intérieur, surfant sur un fait divers atroce, appelait à «rendre la vie impossible» aux migrant-es. Le même ministre Darmanin publiait en 2021 un livre sur le «séparatisme islamiste». Dans ce court texte, on trouve un passage ouvertement antisémite dans lequel les juifs sont décrits comme des «usuriers» qui causent des «troubles et des réclamations». Rappelons que Darmanin a milité dans un groupuscule d’extrême droite, l’Action Française, royaliste, ouvertement pétainiste et antisémite.
Aucun de ces éléments n’a suscité la moindre controverse médiatique, la moindre condamnation, la moindre campagne appelant à des sanctions. Au contraire. Et ce sont ces mêmes politiciens, ceux qui connaissent parfaitement le sens des mots et de l’Histoire, qui savent parfaitement quelles références flattent les instincts antisémites et racistes, qui n’hésitent pas à diffamer leurs ennemis. Inversion permanente.
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