Régime de l’hypocrisie : quand la cause prioritaire de Brigitte Macron est piétinée par la macronie elle-même
Brigitte Macron est ce qu’on appelle la Première Dame de France : une personne de pouvoir, à laquelle sont accordés un cabinet et des collaborateurs, pris sur le budget de l’Élysée. Elle n’a aucune légitimité démocratique si ce n’est d’avoir épousé le chef de l’État, mais Brigitte Macron mène sa barque avec une communication maîtrisée et des interventions bien choisies dans des médias “féminins”. Cela lui permet de mettre en avant des combats paraissant humanistes comme la santé des enfants et la lutte contre le harcèlement scolaire. Un article de Marie-Claire évoque ce programme : «L’éducation et la lutte contre le harcèlement scolaire ont toujours été des questions importantes pour Brigitte Macron, qui a décidé d’en faire ses engagements principaux durant le mandat de son mari Emmanuel Macron».
Pourtant Brigitte est peut-être plus macroniste qu’Emmanuel lui-même. Et le propre de la macronie, c’est l’hypocrisie, l’esbroufe. À ce jeu là, Brigitte Macron est virtuose. Une affaire survenue à la rentrée montre à quel point, derrière le vernis humaniste, le pouvoir macroniste est une machine à broyer tout ce qui fait notre humanité : un enfant de 15 ans s’est donné la mort le 5 septembre dernier. Brigitte Macron se précipite soutenir la famille en compagnie du ministre de l’éducation, pourtant la macronie en porte directement la responsabilité.
L’ado avait signalé des faits de harcèlement dès décembre 2022, les auteurs étaient identifiés et la famille mobilisée autour de son enfant. Pourtant les mesures mises en place ont été insuffisantes, hormis un suivi par le CPE du lycée rien n’avait été fait pour stopper réellement les brimades dont il souffrait. Rien d’exceptionnel jusqu’ici, le harcèlement n’est jamais vraiment pris en charge dans l’Éducation Nationale, principalement par manque de moyens. La famille s’est alors plaint dans un courrier : «Il est incompréhensible que vous puissiez laisser un adolescent subir une telle violence verbale et psychologique dans votre établissement sans réagir d’une quelque manière, aussi allons-nous déposer plainte et vous considérer comme responsable si une catastrophe devait arriver à notre fils»
En réponse, un courrier lunaire du rectorat de Versailles : «Vous avez remis en cause les fonctions et menacé de dépôt de plainte le personnel de direction du lycée professionnel (…) Vous avez reproché à ce dernier sa passivité face à un supposé harcèlement subi par votre enfant.» Le rectorat enjoignait alors les parents «d’adopter désormais une attitude constructive et respectueuse envers les membres de la communauté éducative» et les menaçait de porter plainte pour dénonciation calomnieuse : «Je serais contrainte, le cas échéant, de prendre toutes les mesures nécessaires tant au bon fonctionnement du service public de l’Éducation nationale qu’à la protection et la sécurité des personnels qui y concourent.»
Sauf que le jeune a été retrouvé pendu, chez lui, le lendemain de la rentrée scolaire.
La rectrice qui signe le courrier est Charline Avenel, et le moins qu’on puisse dire c’est qu’elle n’a pas retenu la leçon. C’est elle qui avait mobilisé l’équipe “valeurs de la République” et envoyé un inspecteur à Samuel Paty pour lui rappeler «les règles de laïcité et neutralité». L’enseignant n’avait pas besoin d’être recadré, mais protégé. La mort de Samuel Paty par décapitation aurait dû automatiquement amener Charline Avenel à démissionner, mais non. Reconnaître ses torts, faire amende honorable, ça ne rentre pas dans le logiciel de ces gens-là.
C’est que Charline Avenel est une macroniste zélée. Elle n’est d’ailleurs rectrice que parce que son ancien camarade de promo à l’ENA l’a bien voulu. Ce camarade, c’est Emmanuel Macron, qui a changé les règles d’admission des recteurs spécifiquement pour lui offrir ce poste. L’affaire avait fait un peu de bruit en 2018 car le copinage était trop évident, mais la polémique était vite retombée.
La rectrice s’était aussi illustrée l’année suivante lors d’une visite d’école maternelle, qu’elle avait écourté à cause de la présence de trois mères voilées dans l’établissement. À l’époque les signes religieux n’étaient pas encore interdit pour les parents accompagnateurs, ça l’est devenu suite à la polémique islamophobe.
Comble de l’hypocrisie, Charline Avenel n’est plus rectrice depuis juillet dernier. En effet, elle a rejoint un gigantesque groupe d’enseignement universitaire privé particulièrement lucratif. Elle dirige désormais le groupe Ionis, fort de 35.000 étudiant-es qui paient leurs études plein tarif, pendant que les recalé-es de Parcoursup sont éjecté-es de l’enseignement supérieur.
On peut donc résumer le parcours de Charline Avenel ainsi : obtenir un poste dans le public par copinage, y mener une politique autoritaire et inhumaine, puis profiter du prestige de son poste public pour en obtenir un grassement rémunéré dans le privé. La macronie porte l’hypocrisie et le pantouflage au rang d’art. Les dommages collatéraux de cette carrière dorée se comptent en vies humaines, tachons de lui rappeler.
Mise à jour : la réaction du gouvernement ne s’est pas fait attendre. Le lundi 18 septembre, au lendemain de la parution de cet article, un adolescent de 14 ans a été interpelé à Alfortville pour des faits de harcèlement envers une lycéenne en transition de genre. Les policiers sont venus le chercher au collège et l’ont menotté devant ses camarades de classe avant de le placer en garde à vue.
Entre ne rien faire et terroriser un adolescent harceleur, il existe pourtant une myriade d’actions éducatives qui pourraient se révéler plus humaines et efficaces contre le harcèlement. Mais le sens de la mesure ne semble pas faire partie de la panoplie du pouvoir macroniste, qui ne connaît que “l’ordre, l’ordre, l’ordre”.
Une réflexion au sujet de « Les dommages collatéraux de la macronie : la mort d’un adolescent sur la conscience »
Les commentaires sont fermés.