Le Ministre de la Justice… devant la Justice !


Une nouvelle fois ce gouvernement de la honte bat tous les records ! Pour la première fois de l’histoire de la Vème République, le ministre de la justice Éric Dupond-Moretti, toujours en exercice, comparait devant la Cour de justice de la République, pour des faits de prise illégale d’intérêts dans le cadre de ses fonctions.


Dupond-Moretti est mis en cause pour avoir usé des pouvoirs que lui accordaient ses fonctions pour «mener une vendetta personnelle contre des magistrats avec lesquels il était en conflit quand il était avocat» résume Médiapart. Il a en effet «engagé en septembre 2020 des poursuites disciplinaires contre trois procureurs du Parquet national financier (PNF) qu’il traitait quelques semaines plus tôt, comme avocat, de «barbouzes» et de «dingues» en marge de l’affaire Bismuth, dans laquelle étaient mis en cause l’ancien président Nicolas Sarkozy mais aussi l’avocat Thierry Herzog, qui se trouve être l’un des meilleurs amis d’Éric Dupond-Moretti».

On lui reproche également de s’être attaqué à un ancien juge d’instruction dans une enquête de corruption où le ministre était à l’époque avocat de l’accusé, ancien directeur de la police locale.

Une affaire «grave, puisqu’elle met en cause la probité du ministre de la justice (…) chargé de par ses fonctions d’édicter la norme en matière de transparence et de morale de la vie publique», déclare le procureur général lui-même. Des faits qui font encourir la peine de cinq années d’emprisonnement au ministre.

L’affaire, si elle n’était pas si grave, pourrait donc prêter à rire au point où elle frôle le ridicule vu de l’extérieur : le plus haut représentant de la justice, même pas suspendu de ses fonctions, se retrouve sur le banc des accusés devant des magistrats et des parlementaires dont quatre sont issus de la majorité présidentielle !

Comment alors imaginer pouvoir juger en toute impartialité et indépendance ? Comment envisager que les témoins, la plupart magistrats, et notamment magistrats du Parquet, dont la carrière dépend directement du ministre de la Justice, pourront s’exprimer en toute liberté et sans crainte ?

Le procureur général près la Cour de cassation le reconnaît lui-même : «Nous sommes face à une situation totalement inédite puisque comparaît aujourd’hui devant votre cour un ministre en exercice, ministre de la justice de surcroît. Ce n’est pas bien sûr sans poser difficultés», en particulier pour «les témoins (…), dont la carrière dépend de celui là-même que vous devez juger».

Le procès se tiendra jusqu’au 17 novembre devant la Cour de Justice de la République (CJR). Une instance créée en 1993 dans le contexte de l’affaire du sang contaminé, justement pour «sortir de l’impunité» et permettre de juger les membres du gouvernement pour des actes commis dans le cadre de leurs fonctions.

Cette juridiction est ainsi composée de quinze membres : trois magistrats du siège à la Cour de Cassation (des juges donc théoriquement indépendant-es), mais également de
douze parlementaires (dont 6 élu-es par l’Assemblée Nationale et 6 élu-es par le sénat).

Parmi ces juges, quatre parlementaires macronistes, quatre autres «les Républicains», un sénateur du PS, un de l’UDI, un autre du Rassemblement National ainsi qu’une parlementaire de la France insoumise. Un tribunal composé donc à majorité de parlementaires issus de la même majorité présidentielle ! Pour un tribunal impartial et indépendant, on est loin du compte…

Sans surprise, dès cette première journée d’audience le prévenu, confiant, donne le ton et s’indigne que «ce procès est une infamie», lui qui a toujours nié la situation de conflits d’intérêts… ne voyant pas du tout où était le problème. Ironie du calendrier, l’ancien président des USA Donald Trump passe actuellement en procès et adopte une ligne de défense identique au ministre de la justice français : il qualifie le procès «d’escroquerie». Le macronisme s’inscrit bien dans le sillage des autres régimes d’extrême droite post-vérité qui se développent dans le monde.

Nous sommes d’accord sur une chose avec Dupont-Moretti : ce procès risque bel et bien d’être une mascarade !

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