Non, ce n’est pas une information du Gorafi, même si on aurait probablement ri devant cette nouvelle Une du journal satyrique s’il s’était agi d’une fausse annonce. Celle-ci est pourtant bien réelle, mais on doute quand même de la promesse d’un «fun infini» malgré le nom de la marque.
Pour 39,99€ (payable en trois fois) chez JouéClub et pour… 39,99€ chez KingJouet (à payer comptant, mais avec une super promo de 11%, technique bien connue des rapaces de la grande distribution) vous pourrez préparer le merveilleux Noël de vos chérubins. Vous nous avez bassinés avec vos jeux non-genrés, alors en voici un adapté à tous les petits qui veulent devenir grands.
C’est bien connu : tous les enfants veulent faire comme leurs parents. L’imitation est d’ailleurs la base de la socialisation des plus jeunes. Le jeu n’est donc pas du tout un simple moyen de divertir les enfants, les occuper en attendant de les envoyer trimer dans la vie active jusqu’à épuisement. C’est au contraire un champ de bataille idéologique, ou des camps sociaux s’affrontent pour transmettre dès le plus jeune âge un ensemble de normes, de façons de se comporter qui soient acceptables.
Quelle surprise donc de voir des multinationales du jouet développer chez nos gosses des modes de pensée capitalistes, intégrer la soumission à sa hiérarchie, la docilité ou le culte de la performance. Vous avez une vie de merde et vous subissez un ordre capitaliste injuste ? Ne vous en faites pas, les jouets d’InfiniFun rappelleront à vos gosses quelle est leur place dans la société, quitte à leur faire aimer l’exploitation. Les gosses peuvent ainsi apprendre dès le berceau à imiter un bullshit job et expérimenter l’absence de frontières entre la vie privée et le travail.
Le kit de télétravail est ainsi un outil de dressage des classes laborieuses, qui n’est pas sans rappeler ces «parcs d’attraction» capitalistes qui permettent aux enfants de découvrir le monde du travail. Le travail des enfants est interdit, mais on peut toujours faire semblant : il en restera bien quelque chose au moment de se faire recaler sur Parcoursup. Ce serait dommage que nos chérubins se transforment en fainéantes de chômeuses, partant cueillir des champignons les matins d’automne ou restant au lit pour regarder Le Roi et L’Oiseau avec un bon chocolat chaud à la cannelle.
Il faut s’y prendre tôt pour inculquer la valeur travail aux larbins de demain, ainsi qu’à leurs contre-maîtres. Le SNU c’est bien, mais ça arrive un peu trop tard : trop d’ados se sont déjà engagés sur la mauvaise pente !
Tandis qu’à 2 ans, avant même que l’enfant ne sache à quoi il adhère, c’est là que les Bonnes Valeurs s’impriment. Parce que le jeu, ça sert à ça chez les enfants : leur faire croire que la tablette, le smartphone et la visio seront indispensables pour être dans la réussite, pour être dans la win de la start-up nation. Autant leur faire comprendre rapidement pour leur éviter de faire partie des «gens qui ne sont rien» que l’on croise dans les gares…
Allez, comme on est sympa on vous propose quelques idées pour permettre aux enfants de rester immatures et joyeux aussi longtemps que ce seront des enfants. Iels seront peut-être pauvres, mais sans doute bien moins malheureux-ses !
- Les laisser s’imaginer leurs histoires dans leur monde d’enfants.
- Ne pas faire ses «devoirs» c’est pas si grave tant que c’est pour faire ce qu’il leur plaît et se construire une identité émancipée.
- Ne pas être employé-e, c’est pas si mal : on a du temps à la place du fric pour s’amuser, réfléchir, prendre le temps de vivre.
- Si tu t’inquiètes pour eux, reprends les dividendes des actionnaires de l’industrie du plastoc et file-les à tes gosses, ça fera un truc nuisible en moins et tout le monde sera plus heureux.
